Blockbuster phare de l’été pour Netflix, The Gray Man est le nouveau film des frères Russos (Captain America Civil War, Avengers Endgame). Porté par une casting plutôt sexy (Ryan Gosling, Chris Evans, Ana de Armas, Regé-Jean Page, Billy Bob Thorton…), cet actioner à 200 millions de dollars divertit de manière régressive, sans réussir à s’imposer.
Après le succès planétaire de leurs Avengers (Infinity War et Endgame), la production du chouette Tyler Rake et l’arrivée prochaine du remake-live d’Hercule, les frères Russos reviennent avec The Gray Man. Si leur précédent film pour Apple (Cherry) n’était pas la réussite escomptée (de l’Oscar-bait qui faisait plouf), les voilà donc de retour avec le plus gros budget alloué à un film Netflix (juste devant un certain Red Notice).
Adaptation du roman éponyme de Mark Greany sorti en 2009 (ayant engendré une série littéraire par la suite), The Gray Man se veut un mélange d’action-espionnage où nous suivons le super espion renégat Court Gentry (Ryan Gosling). Ex-taulard aux talents prometteurs, ce dernier fait désormais office de machine à tuer sous le nom de code de Sierra Six, un programme d’agents d’élite chargés de faire le sale boulot de la CIA vite fait bien fait.
Alors qu’il est chargé par son supérieur Denny Carmichael (Regé-Jean Page) d’éliminer une cible à Bangkok, cette dernière se révèle être un autre agent Sierra. Désormais détenteur d’informations sensibles, Gentry/Six va être pourchassé par toute sortes d’organisations et groupuscules, notamment son ex-employeur. C’est ainsi que Lloyd Hansen (Chris Evans), un tueur sociopathe faisant office de mercenaire pour le gouvernement, entre en jeu pour supprimer tout allié de Sierra Six. Tout un programme donc !
L’Homme Gris bien Bourné
Inutile d’attendre un thriller d’action et d’espionnage bien retors : The Gray Man se veut un blockbuster à l’intrigue programmatique et bas du front, avant tout prétexte à faire péter tout et n’importe quoi à chaque séquence d’action. Sorte de Jason Bourne/Treadstone-like, le métrage enchaîne les poursuites et autres confrontations musclées, sans réellement se prendre la tête sur le développement de ses personnages ou les possibles retournements de situation. On soufflera donc assez fort lorsqu’on essayera de nous créer un lien émotionnel bien artificiel à la Man on Fire entre Sierra Six et la jeune Claire (nièce du mentor jouée par la néanmoins très bonne Julia Butters).
Passés quelques flash-backs un brin laborieux, The Gray Man nous entraîne dans cette course à travers divers pays d’Europe sans réellement nous lâcher (bon point niveau rythme), mais également sans une once de réelle dramaturgie (pas très bon point) : pas de doute, on est sur du film de yakayo où chaque personnage tient à nous montrer qu’il a la plus grosse, et préférant les coups de savate plutôt que la diplomatie polie. Malgré un casting avec du beau monde (on compte même Billy Bob Thorton, Wagner Moura, Alfre Woodard ou la caution « on vise le marché indien » avec le pourtant badass Dhanush), seuls un Regé-Jean Page classe (mais pas aidé par des dialogues clichés) et un Chris Evans délicieusement over-the-top arriveront un tantinet à donner de l’incarnation à leurs persos.
Ce dernier est bien loin de son image de Captain America, arborant sa plus belle moustache de contrôleur fiscal pour un antagoniste cabotin que l’on apprécie détester. Il faudra cependant se coltiner les classiques séquences de « bad guys regardant le héros via écrans d’ordinateur », une Jessica Henwick (Matrix Resurrections) totalement sous-exploitée et une Ana de Armas (Mourir peut attendre) tentant vainement de faire exister son personnage d’acolyte capable de botter (efficacement) des culs pour constater le gâchis d’un tel cast.
The Gray Action Man
Bien heureusement, chacun arrive par instants à compenser la faiblesse d’écriture par un certain charisme, à commencer par Ryan Gosling tous muscles saillants et regard de cocker affuté. L’acteur précédemment vu dans First Man assure le job en machine à tuer plus efficace que Sam Fisher, MacGyver et James Bond réunis, au point où la badasserie en devient presque comique. L’occasion donc d’aborder l’action de The Gray Man !
Si le rythme est sans gros temps mort, on saluera lors de courts instants la volonté des Russos de poser l’ambiance en profitant des décors permis par le gros budget de 200 Millions de dollars. On retiendra par exemple le setting d’introduction dans un Bangkok festif ou le climax au château de Chantilly, où l’utilisation plutôt brinquebalante des drones offre par instants quelques moments de dynamisme et de spatialisation (toute proportion gardée à côté d’un certain Ambulance ayant couté 6 fois moins cher). Même niveaux idées de mise en scène c’est la vache maigre, et on retiendra un gunfight menotté à un banc plutôt bien trouvé, avant que la machinerie trop huilée se remette en marche.
Pas avare en tatane (plus ou moins sur-découpée), The Gray Man est à la fois l’alpha et l’omega de leurs artisans : on oscillera donc entre une resucée de la séquence en avion d’Uncharted 3 (avec des CGI encore plus criards que pour le film) et un passage de destruction massive plutôt bien réjouissant en plein cœur de Vienne. Si l’exécution est pas toujours totalement satisfaisante, le côté bourrin régressif parvient à divertir de manière assez régulière, même si l’ensemble manque clairement de chair et de réel impact (à l’image des récents John Wick ou Nobody).
Vous savez combien ça fait 200 millions ?!
Bref vous l’aurez compris, The Gray Man c’est le minimum syndical du blockbuster d’action, malgré du combat de yakayos parfois réjouissant dans son aspect le plus élémentaire. Le tout reste cependant bien aseptisé et anonyme, à l’image de la BO passe-partout d’Henry Jackman (Captain America – Le Soldat de l’Hiver) et du casting bankable complètement sous-exploité. Une resucée de tous les films du genre au déroulé très prévisible, qui sera aussitôt oublié une fois le métrage visionné.
The Gray Man est disponible sur Netflix depuis le 22 juillet 2022
avis
The Gray Man est à l'image de son titre : terne ! Aussi bien visuellement qu'en terme d'écriture, le tout reste dans le minimum syndical et dans la formule de l'actioner fast-food malgré un impressionnant budget.
On sauvera l'aspect réjouissant d'un tournage en décors réels, la distribution plutôt classe et quelques moments de savate plus bourrins que réellement impactants.
Mais au final, un autre film Netflix d'hors et déjà oublié ! On espère que la suite montrera plus de muscle...