Madonna revient dans une édition Blu-ray-DVD remasterisée chez Bubbel Pop Edition. L’occasion de porter un regard plus actuel sur le documentaire présenté à sa sortie lors du Festival de Cannes en 1991.
In Bed with Madonna (de son titre original : Madonna: Truth or Dare) est un film documentaire américain réalisé par Alek Keshishian sorti en 1991. Le film propose de visiter les coulisses du Blond Ambition Tour, la tournée mondiale de Madonna qui s’est déroulée en 1990 de Tokyo à Nice, en passant par les États-Unis. L’objectif est de dévoiller l’intimité de la star et de sa troupe aussi bien lors de ses concerts que dans le cadre de leur vie privée.
Un coffret pour une mise à jour
Le coffret propose une version Blu-ray et une version DVD, le tout en remasterisé respectivement en DTS HD et Dolby audio. Un rafraichissement bien apprécié pour mettre à jour le matériel en regard du matériel de visionnage actuel. Car il s’agit bien de remettre cette expérience dans son époque, près de 35 ans après. Preuve en est le livret d’accompagnement qui présente Madonna sous l’angle de l’icone de mode avant-gardiste. Egalement il y a les interviews en bonus qui orientent ce propos, comme 35 ans après, par Olivier Cachin. Les interventions sont très pertinentes, mais hélas on a l’impression qu’elles ont été réalisée dans un photomaton, ce qui peut perturber la reception des messages. Dommage, car ce n’est pas moins que Michel Burstein, le critique et auteur Samuel Blumenfeld, et le directeur artistique de Warner, Jérôme Brucker, qui viennent apporter également leur vision du projet.

Le projet avait été d’abord été proposé à David Fincher, qui s’en est retiré. A l’époque d’autre films concerts étaient sortis avec un succès mitigé, comme U2: Rattle and Hum, si bien que l’entourage de la star lui a déconseillé plusieurs fois d’annuler elle aussi. Mais elle est tout en controle, et ce que Madonna veut, Madonna l’obtient. Le film en lui même est en noir et blanc, sauf pour les images du concert. Le grain est épais comme en photo, et le cadrage rend volontairement chaque scène photogénique d’une simple capture d’écran. Tout est maitrisé, sauf les problèmes rencontrés lors de la tournée. C’est certainement la partie la plus intérréssante (et authentique) du documentaire, car ils permettent de comprendre la difficulté d’un tel exercice. La troupe fait face à des conflits internes qui se jouent dans la presse, des problèmes techniques, des agressions, ou encore la police des moeurs, qui a tenté de faire annuler quelques représentations. Sans succès.
Pas d’Instagram ? Pas de problème !
Qu’on ne s’y trompe pas. Madonna est une professionnelle et une femme d’affaire, obsédée par le contrôle de son image. Les caméras sont placées où elle a voulu qu’elles soient, et les scènes de pseudo intimité restent des morceaux choisis. Le film documentaire est aussi authentique qu’un profil sur Instagram, dans lequel on sélectionne soigneusement les « moments d’intimité » partagés. Elle est présentée comme une mère, amie, soeur, confidente pour les personnes de sa troupe. Et on ne verra pas grand chose d’autre, sinon sa relation avec Warren Betty.

Paradoxalement, si Madonna est en avance sur son temps (nous y reviendront), lui appartient désormais à une époque révolue. Une scène marquante illustre cet écart entre les deux artistes, lorsqu’il demande à Madonna pourquoi elle a besoin de faire filmer sa tournée et de partager un simple check up de ses cordes vocales. On ne le verra plus dans la suite du documentaire, et c’est par ses avocats qu’il demande à faire couper certains passages peu valorisants pour son image. On ne le verra plus tout court, sur les écrans ou ailleurs. C’est la fin de sa carrière, et le début d’une nouvelle ère où Madonna prend à la gorge la mode et la culture pop.
Madonna, premiere icone de la pop culture
Madonna porte sa lingerie en publique (signée Jean Paul Gauthier s’il vous plait), et par ses textes et son attitude, elle devient un symbole d’émencipation féminine. L’auto marketing de son image va plus loin que la promotion de ses chansons. C’est la première fois qu’une star a un tel impact visuel sur une génération. La dentelle et la résille déchirée deviennent tendance, c’est la naissance des Wannabees, des fans qui copient le look de lrur idole (ou Madonnabees dans le cas présent). Madonna est dans les années 80 un nouveau rôle modèle, une alternative pour être une femme libre, qui prend sa place et fait du bruit sans demander la permission.

Aujourd’hui d’aucun diront qu’elle a emprunté son style aux Ball room américains (phénomèene LGBTQ+, qui peut se parraléliser avec les compétitions de Drag Queens), voir même que c’est de l’appropriation culturelle. Mais c’est oublier qu’elle fait partie de cette communauté, et qu’elle a fait exploser ces codes à la figure du grand public, pour que chacun et chacune se réapproprie sa propore image. C’est depuis Madonna que la pop culture et la mode sont indissociables, et c’est avec 35 ans d’avance qu’elle a secoué la société, la presse, le public, en placant l’image et l’identité au milieu des débats sociaux.
Si le film documentaire en lui même reste une infime partie de son histoire, il rappel que la Madonna des années 80 a été une pionniaire, femme d’affaire, acharnée de travail, avant-gardiste, et une icone qui a joué un rôle dans l’émencipation des femmes, et rend à César ce qui est à César.