Cinéaste qu’on adore détester, Michael Bay est de retour ! Après une décennie compliquée à base de films destinés au streaming ou bien de suites poussives à la saga Transformers, le pyromane fou revient avec Ambulance. Remake beaucoup plus musclé d’un film danois, le métrage peut se targuer d’être un retour en force du Bayhem, tout en proposant la course-poursuite la plus longue de l’Histoire du cinéma (rien que ça !). Un festival d’action qui sent bon les 90’s, porté par Jake Gyllenhaal et Yahya Abdul-Mateen II.
Après des années de blockbusters décérébrés (et efficaces), mais prônant toujours une recherche de l’épique via une maîtrise des plans, on pensait Michael Bay légèrement perdu. En effet, cette dernière décennie aura été moins flamboyante d’audace : après le très réussi No Pain No Gain (son meilleur film), le bougre aura enchaîné des suites à Transformers (dont un 5e opus ayant mis au point mort la saga avant un reboot), avec un curieux crochet vers le film de guerre (le plus noble 13 Hours) et le blockbuster Netflix (le moyen 6 Underground). Mais le voilà de retour, pour un film d’action en bonne due et forme, où le réalisateur va pouvoir expérimenter, Ambulance.
Ambu – LA- nce
Remake blockbusteresque du film danois « Ambulancen » sorti en 2005, Ambulance conte l’histoire de 2 frères : Danny (Jake Gyllenhaal) et Will (Yahya Abdul-mateen II). Alors que ce dernier est un père de famille ex-marine en grands besoins financiers (sa femme est demandeuse d’une greffe), le premier est un criminel suivant les traces de leur truand de père décédé. Lorsque Danny va lui proposer le braquage d’une banque fédérale en plein centre de Los Angeles (avec à la clé un butin de 32 millions de dollars), Will va également se lancer dans ce casse. Bien évidemment, les choses vont mal tourner : les 2 compères vont prendre en otage un policier blessé par balle, ainsi qu’une infirmière urgentiste capable de le maintenir en vie. Le tout dans une ambulance poursuivie par la police et le FBI !
Avec un tel canevas de base, Ambulance semble renouer avec une philosophie très 90’s de l’actioner… et c’est vrai ! Un synopsis simple, prônant l’efficacité, pour un ride (un peu épuisant certes) de 2h15 à travers la Cité des Anges californienne. Et à ce titre, il faut saluer un métrage assez peu balourd et plutôt concis dans sa narration. Un scénario signé Chris Fedak (Chuck, Prodigal Son) qui n’a rien de profondément original (les ressorts narratifs ont tous plus ou moins été déjà vus), mais qui demeure bien tenu, sans gros morceau de gras. Bref, on a connu Bay bien plus plombé par des scripts ampoulés (remember le récent 6 Underground), il s’agit donc d’une petite bouffée d’air frais dans sa filmo !
On ne tire pas sur l’ambulance
On connait Michael Bay via son amour pour les effets spéciaux explosifs, les blagues beaufs/misogynes/racistes gentiment douteuses, l’appétence pour l’épique et les plans mobiles en contre-plongée. Et curieusement, Ambulance est un Bay plus sage et « plus sérieux » que d’habitude. Si le film singe un tantinet Heat (toute proportion gardée) lors de sa séquence de fusillade dans les rues de LA, soyons rassurés : l’humour est là (avec parcimonie et bon dosage), avec même par instants le mauvais goût qui passe une tête par la fenêtre (une opération de rate sans queue ni-tête). On aurait même pu penser que certains seconds rôles soient bazardés, mais via de petits détails (un flic attaché à son chien ou bien une tech-girl avec son répondant : Michael Bay caractérise et fait exister ces persos de manière rapide et efficiente, à l’image du film.
Bien sûr, ce sont les protagonistes principaux qui restent à l’honneur, dont le personnage féminin principal (jamais sexualisée en bonus !). On ne présente plus Jake Gyllenhaal (Nightcall, Nocturnal Animals), qui ici inonde l’écran de son énergie. Danny Sharp est la tête brûlée du trio principal (et pourtant jamais dans le cabotinage), et représente en l’état un anti-héros qu’on apprécie suivre, notamment via sa dynamique complémentaire avec un Yahya Abdul-mateen II (Aquaman, Matrix Resurrections) attachant et vecteur d’émotions sur la fin.
Oui, Michael Bay arrive à proposer quelques moments touchants (via des morts jamais bazardées par dessus la jambe), un registre qu’on ne lui connaissait que trop peu ! Il faut également parler d’Eiza Gonzalez (Alita Battle Angel, Baby Driver), trouvant ici son meilleur rôle. Cam est non seulement la boussole morale d’Ambulance, mais également celle qui trouve un arc plus complet. Bay aurait pu céder à l’imagerie facile de la jolie bimbo, mais la traite sans regard lubrique pour la magnifier in fine. Pas un personnage marquant, mais qui à l’image du reste a le mérite d’être tenu, sincère et sans filets !
Michael Bay-se
Assez parler fond de l’histoire : on est là pour que ça soit explose en mode vénère ! Et Ambulance (loin d’avoir le budget d’une superproduction) délivre absolument à cet égard. Michael Bay montre encore une fois sa faculté à emballer des morceaux d’action en dur et par du practical effects (peu d’effets visuels sont présents et cela se sent), et ce de manière impressionnante. Le tout se transforme en roller-coaster plutôt intense, et également épuisant sur la fin, via un réel amour pour les cascades et la ville de LA. On connait le montage rapide et parfois bordélique du cinéaste, ici l’entreprise reste bien lisible, avec une spatialisation largement aidée par un usage inédit de caméras-drones. Michael Bay réussit donc à renouveler sa mise en scène, et proposer des plans tout bonnement jamais vu au cinéma auparavant !
Tel un Tsui Hark période Time and Tide (toute proportion gardée là encore), Bay utilise ce nouvel outil afin de porter un autre regard sur des décors urbains et des scènes d’action, de manière ultra immersive. Si là encore le montage méritait un certain coup de polish par instants, on est régulièrement happé par des plans tout simplement jouissifs (caméra virevoltant en intérieur, ou entre des pylônes en pleine course-poursuite, là encore sans trucage !) malgré l’explosion du raccord.
Enfin, la BO de Lorne Balfe (Mission Impossible Fallout) contribue à créer une tension et une implication permanente, via des percussions et autres sonorités électroniques pas si éloignées d’un certain Tenet. Et quand le drama survient, on peut compter sur un peu de gravitas musical (comme le morceau « The Rescuers« ) pour rentrer en symbiose avec les plans de Michael Bay. Bref, visuellement on est servit et pas qu’un peu !
C’est de la bombe Bay-Bay !
Au final, même si Ambulance aurait mérité un chouilla plus d’idées dans le déroulé de son intrigue, ainsi qu’un peaufinage de raccords, on ne peut lui enlever la sacrée bonne fabrication et efficacité de l’ensemble. Bien interprété, régulièrement percutant et relativement touchant, on tient là un film d’action vraiment réussi, comme testament d’un artisanat analogique d’antan.
Et à l’heure où l’ensemble de l’industrie Hollywoodienne déserte sa terre natale, il fait du bien de voir un réalisateur attaché à la ville de Los Angeles, nous la montrant sous absolument toutes ces coutures (du Downtown jusque dans la banlieue), via un écrin visuel des plus travaillés. Et rien que cela fait d’Ambulance un véhicule (vous l’avez?) parfait à découvrir en salles. Très efficace !
Ambulance est sorti au cinéma le 23 mars 2022
avis
Si le festival pyrotechnique et le montage énergique épuisent sur la fin, Ambulance peut se targuer d'être une belle réussite pour Michael Bay. Concluant sa trilogie Grand Theft Auto (après Bad Boys 2 et No Pain No Gain), on tient là un vrai film d'action à l'ancienne, chaotique certes mais inventif et souvent jubilatoire. Servi par un bon casting et de chouettes personnages, Ambulance fait office de renouveau pour un cinéaste qu'on avait pas senti aussi inspiré depuis pas mal d'années !