Après La Folle Histoire de Max et Léon et Les Vedettes, l’équipe du Palmashow passe la 3e avec Bonne Conduite. Le réalisateur Jonathan Barré nous livre un film bien différent, tout en mettant le duo Grégoire Ludig – David Marsais au second plan. Cette fois, Laure Calamy prend le volant, dans un revenge movie comique digérant avec aisance tout un pan du cinéma US !
Après plusieurs années de Palmashow, la team a su franchir le pas vers le cinéma avec La Folle Histoire de Max et Léon en 2017 et Les Vedettes en 2022. Mis en boîte par Jonathan Barré, ces comédies se voulaient avant tout des prolongements filmiques de ce qui faisait la recette du Palmashow, à coup de sketchs mordants et autres ruptures de ton bien senties.
Avec Bonne Conduite, l’équipe s’essaye à un autre registre, en abandonnant toute structure possiblement décousue dans un récit pris premier degré, contre-balancé par ses irruptions humoristiques. Le résultat est on ne peut plus savoureux, via un métrage lorgnant entre enjeux dramatiques tenus et saillies comiques pour détourner le genre du polar urbain US sauce 80s-90s !
Bonne Conduite nous emmène dans le Finistère, au sein de la petite ville côtière de Douarnenez. Nous y découvrons Pauline Cloarec (Laure Calamy), une animatrice de stages de récupération de points pour les malheureux ayant perdu leur permis de conduire. Le jour, l’exubérante Pauline oscille entre son travail et une vie plus morne depuis le décès de son compagnon Dorian 5 ans plus tôt. Mais la nuit, cette dernière se transforme en dangereuse justicière cagoulée et as du volant !
Prête à tout pour tuer les divers chauffards qu’elle rencontre, et ainsi venger la mort de son âme-sœur , Pauline va malencontreusement rater sa nouvelle cible, un trafiquant nommé Jean-Yves Lapick (Tchéky Karyo). Obligée de s’immiscer un peu plus dans le milieu criminel, cette dernière devra également échapper au flair de deux inspecteurs de police (Grégoire Ludig & David Marsais) !
Polar urbain sauce Palmashow
Au vu du pitch, Bonne Conduite s’apparente à un thriller dopé à la joyeuse série B décomplexée, saupoudrée de la verve comique inhérente au Palmashow. Et Jonathan Barré tient effectivement son concept du début à la fin, en s’attaquant pour la première fois au scénario sans ses compères Ludig-Marsais, mais épaulé de Laurent Vayriot, co-scénariste et co-dialoguiste du métrage. La résultante est donc un film de genre digérant avec malice et pastiche tous les codes des innombrables références du film !
Pêle-mêle on retrouve du cinéma de Michael Mann ou Friedkin (la BO 80’s au synthé renvoyant parfois même à du Carpenter) ou Walter Hill (Driver étant l’hommage le plus évident dès l’introduction), mais également des frères Coen (Fargo en tête de liste) avec cette velléité d’infuser le genre dans un patelin éloigné et aux individus hauts en couleur. Il y a donc quelque chose d’à la fois improbable de placer le thriller et son lot de tueurs/dealeurs en pleine Bretagne profonde, et de revigorant dans le manière d’investir ce contexte franco-français de tout un lot référentiel parfaitement digéré.
Quelque part, Bonne Conduite réussit là ou L’Année du Requin échouait, à savoir réussir un numéro d’équilibriste entre drama premier degré (qui drive donc toute l’intrigue) et accents de comédie, sans jamais s’auto-annuler ! Le duo Ludig-Marsais est encore une fois impeccable, sorte de « Starsky & Hutch rencontre Miami Vice version Brocéliande » et principale source de rire du métrage !
Bonne Conduite d’une Laure Calamy au volant
Outre le fameux duo, il faut évidemment parler de l’excellente Laure Calamy (À Plein Temps, Annie Colère), encore une fois brillante dans un double registre et toujours crédible. Alors que le personnage de Pauline Cloarec se veut bien vrillé du bulbe (un certain »caméo » hilarant de Thomas Ngijol saura d’ailleurs en témoigner), c’est finalement le traitement de sa détresse émotionnelle profonde et de la solitude consubstantielle qui surprend !
Calamy amène donc tout son professionnalisme, tandis que Jonathan Barré parvient à en capter les nuances, jusque dans une scène de dîner couronnée d’un traveling vers le visage de l’actrice, laissant progressivement la place à l’émotion alors que le burlesque gouvernait les minutes précédentes. Une manière de jongler entre les genres et les registres donc, avec comme superbe prisme une Laure Calamy sans fausse note !
Le reste du casting a beau être utilisé avec adéquation (du rôle de Sixtine Aupetit en passant par celui d’Olivier Marchal), on retiendra particulièrement ce bon vieux Tchéky Karyo, figure emblématique de tout un pan du cinoche de genre des 90’s (de Bad Boys à Dobermann en passant par Nikita ou bien GoldenEye). Avec Bonne Conduite, ce dernier revient dans le registre du bad guy directement charismatique qu’on aime détester, tout en jouant allègrement avec cette image !
Aucune sortie de route
Si tout ce joyeux hommage a finalement bonne allure (on y trouvera même des easter eggs à Rocky, Predator, Commando ou un super point pivot autour d’Usual Suspects), allié à un sens de l’humour inspiré, la vraie charpente de Bonne Conduite tient finalement en peu de choses : un vrai personnage principal, traité de A à Z, avec son trauma originel, sa douleur, ses erreurs et une volonté de rédemption ! Bref de l’humour oui, mais de l’amour pour son matériau de base avant tout !
Au final, Bonne Conduite représente tout ce qu’une bonne comédie de genre devrait être ! Une lettre d’amour au polar urbain américain d’antan qui se veut carrée, faite avec sincérité et métier, tout en s’affirmant singulière de par son cadre et son ADN du Palmashow. Une réjouissante réussite tout simplement !
Bonne Conduite sortira au cinéma le 29 mars 2023
avis
Avec Bonne Conduite, la team Palmashow et Jonathan Barré signent leur meilleur film. Un pastiche du polar urbain 80's qui n'annihile jamais sa dramaturgie au profit du rire, et qui structure son récit avec aisance pour en détourner les codes du genre. Une comédie efficace, portée par un bon casting et une Laure Calamy encore une fois impeccable !