Après une sortie au cinéma, puis en DVD repoussées, Ma vie avec John F. Donovan est enfin entre nos mains ! De quoi nous ravir puisque, pour son premier long-métrage tourné en anglais, Xavier Dolan nous offre une nouvelle réussite pleine de sincérité.
« Bonjour Leonardo, […] tu joues très bien et je t’admire. Je suis également un acteur. […] J’espère pouvoir jouer, un jour, dans l’un de tes films. » Voici, un morceau de la lettre – restée sans réponse – que le jeune Dolan, du haut de ses 8 ans avait envoyé à Leonardo DiCarpio. Deux décennies plus tard, il s’inspire de sa propre vie pour raconter l’histoire d’un petit garçon (Rupert), ayant écrit à son idole John Dovonan, qui, lui, lui a répondu.
De ce socle émergent alors des thèmes bien connus du réalisateur, qui peuvent paraître redondants voire rébarbatifs (cf notre dernière critique), et qui pourtant font toujours mouche en reflétant des éléments universels de notre société. A savoir : les relations mère-fils, l’amour et plus précisément l’amour homosexuel et la discrimination qui lui est inhérente.
Le personnage interprété par Kit Harington ne pouvant pas vivre sa vie comme il l’entend est au bord de la rupture. La notoriété qui l’étouffe lui empêche toute liberté et réconciliation avec lui même. L’ancien John Snow se glisse merveilleusement bien dans la peau de ce protagoniste complexe duquel découle un flegme énergique (oui, c’est possible) : à la fois détaché et à la fois prêt à exploser à tout moment. De quoi donner lieu à des scènes saisissantes d’émotion.
Ma vie en tant que Xavier Dolan
Mais le réalisateur et scénariste veut ici envoyer un message d’espoir puisque toute l’histoire repose sur le fait que le jeune Rupert, en correspondant à son acteur fétiche, a pu apprendre de son modèle et ainsi ne pas commettre les erreurs de ce dernier. Un message validé par la musique pop que l’on retrouve tout au long du film, nous donnant l’envie irrépressible de danser (et tout du moins de bouger). Le Rupert adulte semble avoir trouvé sa voie, tout comme le Dolan adulte des années après avoir tenté de communiquer avec DiCaprio. Ma vie avec John F. Donovan peut-être vu, d’une certaine manière, comme une oeuvre autobiographique témoignant de l’épanouissement personnel de Xavier Dolan dans le monde si particulier du cinéma; un univers tantôt rêvé, tantôt effrayant et dans lequel il est certainement difficile de ne pas perdre pied.
Qui de mieux pour représenter une détermination sans faille dans la tête d’un petit garçon que Jacob Tremblay ? Déjà incroyable dans Room et dans Wonder, il nous propose de nouveau une prestation époustouflante, passant de l’excitation à la colère et à la tristesse sans perdre une once de justesse dans son jeu, empoignant, à coup sûr, le spectateur à chacune de ses apparitions.
En comparaison, le Rupert adulte est beaucoup moins convaincant, tout comme la journaliste interprétée par Thandie Newton (pourtant fantastique dans la série Westworld). D’une manière plus générale, leur interview servant de narration au reste du récit demeure trop superficielle pour que l’on y croit vraiment, laissant naître une complicité trop rapidement advenue. Heureusement, le long-métrage se concentre peu finalement sur cette partie-là et préfère s’attarder sur le passé. C’est tant mieux !
Cependant, un regret demeure, celui de ne pas avoir vu le talent de Jessica Chastain s’exprimer dans cette version amputée de toutes ses scènes, dans lesquelles elle jouait une rédactrice en chef impitoyable. Des scènes introuvables dans le DVD ou le Blu-ray…