Red Rocket est le récit d’un ex-pornstar qui retourne chez son ex-femme dans son ex-patelin paumé au Texas et rempli d’industries pétrolières. De ce pitch, Sean S. Baker (The Florida Project) nous pond une petite pépite cinématographique.
Mise en scène brillante
En plus d’être un dialoguiste talentueux – cela rappelle un certain Quentin Tarantino – Sean Baker a beaucoup d’imagination dans sa mise en scène. Plus que cela, il a clairement sa patte esthétique, ce qui n’est pas donné à tout le monde. Par l’utilisation du grand angle, des contre-plongées et le jeu visuel avec le décor texan, ce patelin industriel et ses personnages loufoques prennent vie. Il a réussi à rendre cet univers palpable sans être dans la copie stylistique d’un genre de cinéma indépendant américain (n’est-ce pas Sean Penn ?) ou d’un autre cinéaste.
Néanmoins quand on découvre Red Rocket, on a des réminiscences des premiers films de Paul Thomas Anderson du fait d’un sens de la réalisation aiguisé, de la qualité de l’écriture des personnages, ainsi que de l’énergie déployée dans la narration. Et un peu comme Anderson, Baker ajoute différentes couches de lecture avec entre autres une déconstruction du mythe américain. Il filme la pauvreté dans un environnement industriel dans lequel on regarde Trump dire n’importe sans que cela ne déclenche un battement de cils, où l’herbe est bien verte – sauf qu’il n’y a que ça de « naturel » – et où on donne des noms aux cheminées des usines parce qu’elles font partie du paysage.
Le show Simon Rex
Pour interpréter un mec avec un tel bagou, baratineur hors pair et séducteur, il fallait un acteur capable de débiter des répliques à une vitesse faramineuse et d’être capable d’incarner physiquement ce mâle plutôt primaire. Baker a choisi Simon Rex (les Scary movie) et la lumière fût. Quelle performance ! Non seulement il est habité par son personnage, mais il transcende chaque instant du film. Il incarne à lui seul une certaine idée de la masculinité souvent pathétique et toxique où le guide suprême qui motive ses pas se trouve sous la ceinture. Pour l’accompagner, il trouve avec lui une partenaire de jeu de premier plan, Suzanna Son, une Lolita des temps modernes qui le fait renaître de ses cendres.
Au final, Red Rocket – dont on vous laissera le loisir de comprendre le choix du nom – se révèle être une des plus belles découvertes de ce Festival de Cannes 2021. Récompense en vue ?