Seth – Face aux murs retrace dix ans de voyages et de création à travers le monde de l’un des plus célèbres street-artistes.
Dans Face aux murs, Seth nous ouvre grand les portes de son univers, si inspiré et inspirant. Ses enfants peints font le tour du monde et racontent avec subtilité et poésie les transformations qui secouent notre planète.
Et tandis que sa nouvelle exposition parisienne « Empreinte / Carbone » nous offre actuellement une nouvelle échappée poétique au centre d’art urbain Fluctuart, cette première monographie de l’artiste globe-painter retrace dix ans de voyages et de création. Un vrai bijou !
Les murs comme terrain de jeu
C’est d’abord sur les murs de Paris, dans le milieu des années 90, que Seth a laissé son talent s’exprimer avant de partir conquérir le monde et de nouvelles manières de peindre, à partir de 2003. Ses silhouettes d’enfants aux visages souvent dissimulés et ses couleurs qui font exploser la vie rendent son Art immédiatement reconnaissable et hypnotique.
En effet, son univers a ce quelque chose en plus qui met immédiatement en branle notre imaginaire. Il en jaillit une certaine forme de douceur, d’espoir sortis tout droit de l’univers de l’enfance, si cher à l’artiste. Mais un espoir toutefois teinté d’une sorte de mélancolie à laquelle aucune de ses œuvres ne semble échapper. Car la lumière a aussi ses ombres.
Sans doute est-ce dû à ces personnages aux postures souvent voutées et dont les visages bien souvent nous échappent, qu’ils soient peints de dos, masqués, plongés dans un vortex chromatique ou dissimulés par la mise en scène, comme pour préserver une part de mystère, laisser suffisamment d’espace à l’imaginaire. « Surtout ne pas imposer ; suggérer. » explique-t-il.
Seth nous livre le monde en peinture
Au fil des pages, on voyage ainsi de mur en mur à travers le Cambodge, La Réunion, la France, la Chine, l’Ukraine, la Nouvelle-Zélande, l’Italie ou encore les États-Unis, entre autres destinations. Ainsi, des ruines de territoires palestiniens occupés ou celles de quartiers en démolition du vieux Shangaï se changent en toiles éphémères, tandis qu’à Madagascar, une régate sur l’océan tient lieu de vernissage pour une dizaine de toiles géantes de pirogues.
Et puis, le dessin se fait parfois l’outil privilégié d’un travail de résilience, comme dans cette région du sud de Java, en Indonésie, où l’on découvre des jeunes femmes réfugiées, privées de leur foyer et de leur monde après l’éruption d’un volcan, peindre aux côtés de l’artiste sur les ruines de leurs maisons… Des photographies absolument superbes et émouvantes qui apparaissent comme des hommages d’une grande délicatesse.
La poésie à tous les coins de rue
Ainsi, chacune de ces peintures abrite une histoire. Celle d’une rencontre, d’un lieu, d’un évènement, d’une culture. Mais leur récit appartient à chacun des regards qui se poseront sur elles. Car c’est de la rencontre entre une peinture, son contexte, l’histoire personnelle que porte celui ou celle qui l’observe, et le hasard de l’instant, de sa lumière, que naît le sens éphémère d’une œuvre.
À travers un Art qui puise son inspiration dans ses voyages, le street artiste célèbre la diversité du monde dont il touche subtilement du doigt les ténèbres, ne s’y laissant jamais happer complètement. Car la poésie l’emporte, toujours. C’est aussi ce qui fait toute la magie du travail de ces artistes grâce auxquels l’Art sort du cadre, comme C215, Banksy, Miss.Tic, Shepard Fairey (Obey) ou encore Jef Aérosol pour n’en citer que quelques-uns. De celui de Seth peut-être un peu plus encore.
Seth fait tomber l’Art-mur
Car les œuvres de Seth ne se fondent pas dans le décor. Elles viennent avec beaucoup d’audace et d’inventivité le compléter, l’enrichir, le faire vivre, jouer avec lui. Elles se frayent un chemin à travers les murs qui abritent, qui protègent, qui séparent, qui s’effondrent, jusqu’à ouvrir parfois l’horizon là où il n’y en avait pas, créant parfois de véritables et étonnants trompes l’œil.
« Après des années passées à couvrir les murs, j’ai décidé de peindre pour les dévoiler. »
C’est un livre que l’on n’a pas envie de feuilleter mais de lire, page après page. On est littéralement happé, aussi bien par les photos de toute beauté que l’on contemple parfois de longues secondes, que par les textes et anecdotes qui les accompagnent. Car, tout aussi vivants que les peintures, ils nous permettent de mettre ces œuvres en perspective, et de mieux cerner la personnalité de Seth et l’âme de son Art qui fait émerger la poésie partout où elle manque.
Seth – Face aux murs, paraît le 10 novembre 2022 aux Éditions de la Martinière.
Avis
Aux superbes photographies des peintures, commentées et expliquées par l'artiste, s'entremêlent le récit de coutumes, de faits historiques ou politiques, ou encore de témoignages. Un livre vivant, et l'un des plus réussis sur le street-art.