Numéro 2 est l’adaptation du roman de David Foenkinos qui imagine le destin de celui qui a failli être Harry Potter.
En 1999 débutait le casting de l’un des rôles les plus marquants de l’histoire du cinéma : celui d’Harry Potter. Des centaines de jeunes acteurs furent auditionnés pour qu’il n’en reste finalement que deux. Mais deux, pour un seul rôle, c’est encore un de trop. Un pour qui la vie aura un goût d’injustice, de frustration, d’échec. Jusqu’à ce qu’une rencontre vienne remettre les choses en perspective.
Le casting d’une vie
Daniel Radcliffe. Voilà un nom dont la destinée fut à jamais changée… d’un coup de baguette magique pourrait-on dire. Le plus célèbre des petits sorciers à lunettes, c’est lui. Le numéro 1, le grand gagnant du casting pour une vie sous les projecteurs, dans la lumière. Quoi que plutôt dans l’ombre de l’un des plus célèbres personnages du cinéma à travers le monde.

Mais, pour qu’il y ait un numéro 1, il faut forcément un numéro 2. Celui qui « aurait pu », celui qui « a failli » et qui sera finalement le spectateur d’une success story vertigineuse, d’un succès planétaire qui aurait pu être le sien, à un coup de pouce près du destin. C’est l’histoire de ce « numéro 2 », Martin, qu’a imaginé David Foenkinos dans ce roman adapté sur les planches avec beaucoup de dynamisme et d’humour par Lénoard Prain.
« Je deviens à jamais cet autre garçon à qui il manquait ce petit truc en plus. »
Celle d’un jeune garçon contraint d’assister au déroulement d’une vie, d’un succès, d’un destin hors-normes qui lui a filé entre doigts. 7 romans traduits dans 80 langues, plus de 500 millions d’exemplaires vendus, 8 films avec plus de 9 millions d’entrées pour le premier rien qu’en France, un jeu vidéo, des parcs à thème, des expositions… bref, impossible pour lui d’échapper à ce phénomène mondial et à cette question qui le hante : « Pourquoi lui et pas moi ? » Comment vivre avec ce sentiment d’injustice ? Comment réussir à être heureux quand la lumière a décidé de se poser sur quelqu’un d’autre ?
Numéro 2 : un spectacle pour toute la famille
Dans le public, des moldus de tous les âges se mélangent. Ça, c’est l’effet Harry Potter, des plus réjouissants. Et les adeptes de la saga seront ravis de retrouver de nombreuses allusions à l’univers du héros, aussi bien dans le texte et dans le décor que dans la mise en scène très riche de Sophie Accard. Cette dernière apporte une atmosphère magique à l’ensemble grâce des effets qui s’invitent çà-et-là, des musiques ou encore des jeux de lumière bien sentis.

Pour autant, nul besoin d’être fan du jeune sorcier, ni même de connaître ses aventures pour se laisser embarquer par cette pièce. Car le sujet d’Harry Potter n’est qu’un (très bon) prétexte pour aborder une thématique plus profonde et universelle. Celle du rapport au succès, à la réussite et à sa frustration inhérente, qu’il s’agisse de notre succès comme de celui des autres d’ailleurs. Numéro 2 est avant tout une comédie, mais aussi une invitation à regarder les choses sous une autre perspective pour mieux les comprendre, en percevoir les nuances et se libérer ainsi de sentiments qui nous entravent.
Un excellent casting
Sur scène, les quatre artistes donnent vie à une trentaine de personnages avec une énergie folle et nous embarquent à leurs côtés dans un décor foisonnant. C’est Axel Auriant qui se glisse avec de jolies nuances dans la peau de Martin, également narrateur de l’histoire. Si Valentine Revel-Mouroz – que l’on adore également dans La course des géants de Mélody Mourey – est touchante dans le rôle de la mère de Martin et tout aussi juste dans ceux des autres personnages féminins, le choix de lui confier un peu plus tard celui de son amoureuse n’est en revanche pas des plus habiles.

Pierre Bénézit et Serge Da Silva nous régalent quant à eux avec une interprétation parfois un brin loufoque qui rend certaines scènes hilarantes. Comme avec ce journaliste qui interview J. K. Rowling d’une manière bien peu scrupuleuse, ou encore ce psy qui s’installe lui-même dans son divan pendant une séance ! Dommage toutefois que la réflexion essentielle qui s’ouvre dans la toute dernière partie ne soit pas poussée davantage car elle contient le message le plus important de l’œuvre. Un très bon moment de divertissement.
Numéro 2, de David Foenkinos, adaptation Léonard Prain, mise en scène Sophie Accard, avec Axel Auriant, Pierre Bénézit, Serge Da Silva & Valentine Revel-Mouroz se joue jusqu’au 5 juillet 2025 au Théâtre Tristan Bernard.

Avis
Quelle riche idée que d'adapter ce roman au théâtre ! Le résultat est très réussi. Une belle énergie s'empare du plateau, la scénographie nous transporte, on rit, on est attendri, on réfléchit. Il y aurait matière à aller encore plus loin avec le dénouement qui apporte sa vraie valeur ajoutée à l'histoire.