Après des expérimentations sous toutes les coutures, Taylor Sheridan revient à ses premiers amours, cette fois loin des grandes plaines, pour nous proposer avec Lioness un thriller haletant et percutant très maitrisé.
Une jeune militaire est engagée par un corps d’élite pour infiltrer une cellule terroriste. Un scénario somme toute assez simple pour Lioness qui permet à Sheridan de briller une fois de plus en développant un propos sombre et fortement dépressif au milieu d’un actionner malin, mêlant avec grâce un récit agressif et des considérations sur les syndromes post traumatiques chez les militaires sans oublier de dénoncer gentiment les hautes sphères décideuses. Du super boulot, comme d’habitude.
Encore une fois diffusée sur Paramount +, villégiature de Taylor Sheridan qui s’amuse comme un fou à construire son propre univers sur la plateforme, qui doit à peu près se reposer à 80% sur ses propositions, Lioness (ou Opérations Spéciales : Lioness chez nous), permet donc au bonhomme de se reposer quelque peu de son Yellowstone-verse pour replonger dans des tropes plus stéréotypés mais tout aussi pertinemment mis en place. Pour ce faire, toujours créateur et showrunner de son nouveau-né télévisuel, il fait appel à Anthony Byrne, Paul Cameron ou John Hillcoat, rien que ça, pour réaliser les différents épisodes qu’il se charge d’écrire lui-même entièrement. Encore une fois, du bon boulot.
Sicario
Renouant aux intrigues à multiples protagonistes, et loin des soap-operas qu’on adore chez Yellowstone, Sheridan revient à quelque chose de plus terre à terre. On tombe dans le patriotisme grandiloquent tout en enfonçant certaines portes ouvertes. Certes, on trouve chez Lioness une certaine propagande militaire, comme dans à peu près toutes les œuvres américaines soyons honnêtes, et forcément un certain culte du soldat américain, le meilleur du monde.
A ceci près qu’ici, et pendant les 8 épisodes de Lioness, Sheridan et ses copains Hillcoat ou Byrne pour citer nos chouchoux, choisissent l’approche inclusive de cette facette guerrière. Ainsi, adapté d’un fameux fait notable de 2003 où des femmes avaient été sélectionnées dans l’armée américaine pour traquer des terroristes féminines en Irak, la série de Paramount+ décide de mettre l’accent sur des protagonistes principalement féminins tandis que les personnages masculins n’en deviennent donc que vaguement secondaires, ou presque. En résulte une anomalie dans le paysage télévisuel US, pour une proposition sinon révolutionnaire, au moins inédite et intéressante.
On suit donc deux personnages principaux. D’un côté la jeune recrue instable et malmenée pendant sa formation et sa mission, jouée par la talentueuse Laysla De Oliveira et de l’autre, sa formatrice et agent d’élite également traumatisée par ses missions de plus en plus dangereuses et émotionnellement difficiles, en plus de sa vie de famille, jouée elle par la toujours géniale Zoe Saldaña. A côté on trouve la patronne de cette section incarnée par Nicole Kidman pour clôturer ce trio moteur du show tandis que Michael Kelly ou l’anecdotique Morgan Freeman essayent de faire bonne figure à côté de ces lionnes au premier plan.
Un casting monstrueux pour peindre une intrigue assez classique mais qui fonctionne bien tant les rebondissements semblent assez plausibles pour avoir lieu et tant le discours apposé à ces opérations clandestines semble également plausible. Les faveurs entre services s’accumulent, les opé foirent, la vie de famille morfle, les sentiments pendant la mission se développent, en bref, l’humain prime sur le reste et c’est ça qui fait de Lioness une belle surprise.
Car non content de nous emporter dans une ambiance sombre de thriller carré filmé en admirablement à la courte focale et montée soigneusement en alternant entre les protagonistes, la série de Sheridan montre surtout les ratés ou les magouilles inhérentes à ce genre de missions. Les rattrapages sont gérés en interne alors même que l’ordre établi doit être perturbé sans trop déstabiliser le cours de la bourse en éliminant un adversaire, certes redoutable mais bien connu et donc rassurant. Le paradoxe de la justice expéditive.
A ce jeu notre Taylor Sheridan est très fort et si Lioness pâtit de petites zones d’ombres ou d’évidences qui viennent ternir un peu le tableau global avec une over dose de patriotisme militarisé, le reste demeure un très bon cru en matière de série et ce grâce à un casting magnifique et une mise en scène efficace. Good job team.
La saison 1 de Lioness est disponible sur Paramount+
Avis
Malgré quelques poncifs militarisés bien américains, Lioness est un nouveau bon cru de Taylor Sheridan qui revient avec style au thriller sombre, rondement mené et comme toujours, diablement efficace.