Le Ministère de la Sale Guerre débarque discrètement sur Prime Video après son flop aux box-office américain. La confirmation de la petite forme de Guy Ritchie, pour qui l’on garde cependant ici toute notre sympathie.
Le Ministère de la Sale Guerre fait, malgré son patriotisme britannique, réveillant ici les figures de Winston Churchill et de Ian Flemming, immédiatement penser au Inglourious Basterds (en plus de la présence de Til Schweiger au casting) de Quentin Tarantino. Même si ce dernier peut aujourd’hui aisément paraître comme l’un des projets les plus faibles de la filmographie du cinéaste américain, la comparaison se fait cependant plus rude avec la carrière actuelle de Guy Ritchie. Enchaînant les projets et les échecs avec une triste régularité, de son Opération Fortune : Ruse de Guerre à The Covenant : Mission en Afghanistan, tous deux sortis directement chez nous sur Prime Video après leurs timides accueils au box-office américain, ce Ministère de la Sale Guerre, subit aujourd’hui un sort équivalent, malgré sa belle ambition.
Le Ministère de la Sale Guerre, adapté du roman éponyme de Damien Lewis, réunit de plus un prestigieux casting et des motifs incontournables de la filmographie de Guy Ritchie. Pourtant, on ne peut s’empêcher de penser, en plus de la présence d’Henry Cavill au casting, au récent Argylle de Matthew Vaughn, autre cinéaste britannique dont le style fut souvent comparé à celui de Guy Ritchie, et ayant connu, en plus d’un désaveu critique suite à une répétition quelque peu lourdingue de ses motifs, un échec cuisant au box-office mondial. Comme pour confirmer la petite forme commune de ces deux réalisateurs au service de sa Majesté au demeurant sympathiques, se frottant à des projets qui auraient dû exploser et ne réservent finalement que de petits artifices.
Inglourious British
Fin 1941, l’Angleterre est fragilisée par la présence U-Boat allemands. Ces derniers, limitent à la fois leur afflux de marchandises et leur empêchent une alliance forte avec les Etats-Unis pour tenter de renverser la mainmise de l’Allemagne nazie sur une grande partie du globe. Winston Churchill décide donc de monter une mission désespérée, portée par des bagnards et des malfrats pour tenter de détruire en Guinée équatoriale, les navires d’approvisionnement de ces redoutables sous-marins. Et rapidement, la maîtrise de Guy Ritchie pour nous rendre sympathique une équipée de gangsters au grand cœur, de dépeindre au sein de sa filmographie une énième mais toujours attachante amitié virile, relève de l’évidence.
Pourtant, malgré l’ambition de son histoire, le cinéaste signe ici une mise en scène étonnamment modeste, dénué d’effets explosifs, réussissant l’exploit de rendre par moments ce récit incroyable tout bonnement ennuyeux. La superposition de deux récits, l’un suivant l’équipée et l’autre deux agents du SOE, s’avère ainsi fatale pour le deuxième, faisant rapidement du sur-place et rappelant rapidement le scénario de la Shosanna Dreyfus de Mélanie Laurent dans Inglourious Basterds. De plus, bloqués sur un navire, le scénario de Guy Ritchie, Arash Amel, Eric Johnson et Paul Tamasy, ne sait que faire de sa prestigieuse bande, délivrant ainsi encore un peu de mou à un récit qui n’en avait pas besoin, pour une avancée parfois laborieuse vers un final tellement attendu qu’il finit irrémédiablement par décevoir.
Guerre en paix
Guy Ritchie serait-il donc fatigué ? Les occasions, pourtant, se multiplient, pour dynamiter un récit, qu’il se contente ici parfois de restituer sans la moindre vision. D’un numéro musical sacrifié porté par une très fade Eiza González, à une enfilade de tueries exécutées sans le moindre accroc, ni (presque) la moindre blessure, Le Ministère de la Sale Guerre ne laisse ainsi, à part une certaine sympathie pour ses héroïques et attachants personnages, aucune émotion dans cette mission de guerre menée avec beaucoup trop de paix. Jamais le récit ne se fait haletant, l’action n’impressionne où les multiples rebondissements ne tiennent véritablement en haleine. Tout est ainsi en pilote automatique, d’une mission et de tout un projet, que l’on s’imagine alors (avec raison) avoir déjà vu, en mieux, et ailleurs.
Pourtant, les visages des acteurs, d’Henry Cavill, d’Alan Ritchson à Danny Sapani, et leur évidente alchimie parviennent à sauver certaines scènes et à donner un petit intérêt à ce projet anecdotique au demeurant sympathique. Il suffira ainsi, d’une scène d’introduction en pleine mer, et d’une confrontation réussie avec quelques nazis, ou de simples regards et poignées de mains viriles pour éprouver autre chose qu’une certaine léthargie, et d’éviter de crier au plagiat, ou même à l’inutile, pour simplement se dire que si Guy Ritchie aurait pu faire bien mieux, il a également pu faire bien pire que cette simple déclaration d’amour à la camaraderie, qui elle au mois en pleine mer, ne fait pas appel à Madonna et ne s’appelle ni ne mène à une honteuse À la Dérive.
Le Ministère de la Sale Guerre est disponible sur Prime Video.
Avis
Le Ministère de la Sale Guerre déçoit de par sa mollesse de mise en scène et de récit. D'une incroyable histoire vraie, adaptée du roman éponyme de Damien Lewis, et d'un récit en forme de promesse d'un spectacle prenant, Guy Ritchie ne le traduit qu'en une sympathique déclaration d'amour à la camaraderie, qui au pire, rappellera dangereusement Inglourious Basterds, et pour le meilleur, demeurera perpétuellement décevant mais néanmoins sympathique.