Réalisé par Colin et Cameron Cairnes avec David Dastmalchian dans le rôle principal, Late Night with the Devil retrace la diffusion d’un épisode inédit du talk-show « The Night Owl » la nuit d’Halloween 1977.
Enfant chéri de la télévision, Jack Delroy est soudainement confronté à une chute vertigineuse de son audience. Il tente alors le tout pour le tout dans l’espoir de retrouver sa gloire perdue. Avec Late Night with the Devil, Colin et Cameron Cairnes explorent le genre de l’horreur à travers un plateau télé des années 70. Un film qui a conquis les États-Unis tout autant que le maître incontesté de l’horreur, Stephen King lui-même. Jack Delroy, présentateur de renom, est confronté à une baisse d’audience. Il décide alors de sortir le grand jeu pour une émission spéciale Halloween…
Une critique acerbe des médias
Colin et Cameron Cairnes revisitent avec Late Night with the Devil un genre horrifique assez subtil. Le contexte du show télévisé est ici une idée plus qu’intéressante. On en vient même à oublier parfois qu’on regarde un film, écoutant l’émission d’une oreille distraite, comme on le ferait pour un programme des plus classiques. Sur le plateau du talk-show, l’orgueil du personnage de Jack s’affronte à un mélange de croyances religieuses et de scepticisme accru face au paranormal. Véritable critique de la société, et en particulier de l’hubris démesuré des médias, Late Night with the Devil se déroule dans un cadre soigné et pour le moins original.
Cette émission, rappelons-le, se déroule dans les années 70. La colorimétrie orangée et jaune du plateau correspond à la charte classique des années soixante-dix. Des couleurs qui ne sont pas sans rappeler le fameux tapis des couloirs de l’Overlook… On comprend assez vite dans quoi on s’embarque en tant que spectateur. Entre ces plans colorés, des séquences en noir et blanc s’intercalent. Récemment, de nombreux films ont exploré cette alternance entre couleurs et noir et blanc, souvent à tort et à travers. Mais dans Late Night with the Devil, ce choix de mise en scène prend tout son sens. On sait qu’on assiste à un enregistrement inédit de l’émission, et c’est le changement de colorimétrie qui nous rappelle l’aspect exceptionnel des extraits dont nous sommes témoins.
Où le réel affronte l’horreur
Late Night with the Devil, c’est aussi un film porté par David Dastmalchian. Acteur que l’on connaît tous, David Dastmalchian a joué dans Dune, Blade Runner 2049, The Dark Knight, Oppenheimer etc. Il prête souvent ses traits à des personnages secondaires, c’est donc un réel plaisir de le voir endosser un rôle de premier plan ici. Souvent, Dastmalchian incarne des personnages au physique dérangeant, prompt à nous mettre mal à l’aise. Pourtant, si les grands yeux de l’acteur et son teint clair sont un atout pour de tels rôles, ici, c’est tout l’inverse. Il incarne un homme brisé par une perte profonde, ce qui nous inspire immédiatement une sympathie non négligeable.
C’est là aussi le coup de force du film des frères Cairnes. Late Night with the Devil est un petit bijou qui joue parfois de manière évidente avec les grandes références du genre horrifique tout en restant très proche du réel. En effet, il faut avouer que la disposition du plateau de « The Night Owl » ressemble fortement à celui du Late Night Show Starring Jimmy Fallon. Que ce soit par la présence du groupe sur scène, qui rappelle The Roots, ou la disposition des fauteuils, le cadre est des plus réalistes. Si la colorimétrie évoque Shining, l’interview de Lily fait sans conteste référence à L’Exorciste. De plus, un cinéphile retrouvera des ambiances du Late Show de fin du Joker.
Un virage inutile
Globalement, Late Night with the Devil s’annonce comme un sans-faute, le genre de film qui joue intelligemment avec nos nerfs. En effet, la progression vers une horreur toute en retenue se fait crescendo. Dans cette progression, où l’on constate que les choses vont de mal en pis, certains excès sont pourtant excusables. Sans trop abuser du cliché consistant à couper la musique pour caler un screamer, le scénario nous tient en haleine jusqu’à la fin. Cependant, l’intrigue ne peut s’empêcher de prendre quelques détours qui lui font perdre en qualité.
En restant dans l’ambiance de l’époque et en se calquant sur le genre des snuff movies, ces films un peu « crades », Late Night with the Devil verse dans une sorte de violence gratuite, un virage honnêtement non nécessaire. Ces quelques débordements, bien qu’ils servent le genre horrifique, font plutôt tache sur le reste du film, pourtant si bien tenu. Certaines scènes qui se veulent horrifiques paraissent mal placées au milieu d’un film si bien construit. Cet aspect inégal dans le scénario constitue donc un petit défaut du film.
Late Night with the Devil de Colin et Cameron Cairnes est un film d’horreur qui explore de manière originale le genre. Pourtant, ce tableau d’apparence parfaite présente quelques failles dans des débordements de violence non nécessaire. C’est peut-être là le seul défaut que l’on peut reprocher à ce long-métrage.
Late Night with the Devil est disponible en VOD depuis le 28 août et sera disponible en DVD et BRD dès le 11 septembre.
Avis
Late Night with the Devil coche toutes les cases du parfait film d’horreur bien mené. Avec une atmosphère soignée et des personnages portés par des acteurs convaincants, toutes les cases sont cochées pour un sans-faute. Seul bémol : un penchant non nécessaire pour la violence gratuite qui vient entacher un tableau d’apparence impeccable et donne une désagréable sensation de trahison.