Paris Police 1905, malgré sa lointaine « belle époque », poursuit dans la veine de son excellente première saison en nous parlant de notre monde actuel.
Paris Police 1905 poursuit ce qu’avait brillamment entrepris Paris Police 1900. Après avoir traité de l’antisémitisme gangrénant et déchirant toute une société, cette seconde saison, toujours menée par les excellents Fabien Nury et Frédéric Balekdjian à la mise en scène, s’attaque de front à une épidémie, pas (encore) d’un certain COVID-19 mais celle, malheureusement toute aussi mortelle et contagieuse de la syphilis. Débats entre médecins et affrontements de points de vues, paranoïa et lutte sociale inégale, tout y est. Mais avec la maestria et la majestueuse reconstitution d’un Paris et d’une époque révolues, fourmillante de détails et toujours campée par un casting merveilleux.
Épidémie(s)
Quelques années ont passées depuis Paris Police 1900, et pourtant rien n’a vraiment changé pour nos personnages. Le flic Antoine Jouin (Jérémie Laheurte) est désormais père et marié, mais croule toujours sous le travail et le manque de reconnaissance de ses pairs, confronté à une mort bien plus mystérieuse qu’on ne veut bien lui faire croire. Fiersi (Thibaut Évrard) a repris contré son gré son rôle d’homme de main, tandis que le préfet Lépine (Marc Barbé) est usé par ses fonctions et Marguerite Steinheil (Evelyne Brochu), toujours accro à la morphine, se vautre dans la richesse grâce à ses soirées de jeux. Pourtant, tout menace de s’effondrer suite à la mort de l’enfant d’une prostituée injustement emprisonnée.
Et à l’instar de Paris Police 1900, qui s’étalait sur 8 épisodes et prenait, parfois trop, le temps de poser son poisseux décor et ses nombreux personnages, cette seconde saison, resserrée sur 6 épisodes, va directement à l’essentiel. Fabien Nury rend ainsi Paris Police 1905 encore plus haletante et toujours aussi documentée, même si son entreprise, toujours aussi fastueusement reconstituée, a ici des allures scénaristiques beaucoup plus modestes. Parce que si les sujets sont toujours aussi vastes et contemporains, des abus sexuels au sein de la religion, en passant par une épidémie et l’homosexualité, dont le fichier tenu par la police et recensant ce qu’on nommait encore des pédérastes, fut d’usage jusqu’en 1982, le final de la série semble pourtant gagner en efficacité ce qu’elle perd en ampleur.
Jugement expéditif
Parce que si ce qui paraissait comme une introduction quelque peu laborieuse dans Paris Police 1900, est ici transfiguré en une conclusion hâtive. On peut ainsi rester sur notre faim, au vu de l’exécution sans ménagement réservée à une intrigue menée tambour battant pour le meilleur, comme pour le pire. Cependant, l’écriture plus fouillée de Fabien Nury envers ses personnages, avec en tête les rôles féminins, permet de retrouver une satisfaction presque intacte dans ce qui paraît aisément comme l’une des meilleures séries jamais produites dans nos contrées. Cette seconde proposition gagne ainsi en humanité et en chaleur humaine, parce que l’on s’attache aux protagonistes, dans des scènes toujours aussi violentes mais qui n’oublient cependant pas d’apporter un brin d’humour bienvenu.
Parce que malgré son efficacité parfois trop mécanique retirant un peu de souffle à ce tableau toujours aussi tortueux et magistral d’une époque, Paris Police 1905 s’avère toujours aussi précise, fouillée que superbement interprétée et mise en scène. Là où le paysage télévisuel rayon enquêtes policières s’avère aussi terne que répétitif, CANAL+ vient rappeler de sa superbe en termes d’ambition, tant le retour dans le passé qu’opère Paris Police 1905 s’avère aussi qualitatif que nécessaire. Parce plus qu’une reconstitution fastueuse permettant de reproduire un schéma éculé, la série de Fabien Nury remet au goût du jour le genre du thriller policier en lui rendant en plus de ses lettres de noblesse, toute sa ferveur politique.
Paris Police 1905 est disponible sur CANAL+.
Avis
Paris Police 1905 gagne en efficacité ce qu'elle perd en ampleur d'un final trop rapidement exécuté qui pourra laisser sur sa faim. Le plaisir reste pourtant intact d'une série qui creuse ses personnages, apportant un peu de chaleur humaine et d'attachement au sein d'une proposition qui s'avère toujours aussi brillamment écrite, interprétée, mise en scène et surtout toujours aussi nécessaire.