Ma palme d’or est le récit sensible, drôle et poétique de retrouvailles entre une quinquagénaire et l’amant de ses 30 ans.
Ma palme d’or est une histoire universelle… Celle d’un amour fugace et passionnel que le temps n’a jamais vraiment effacé mais qui a trouvé sa place parmi les souvenirs. Celle de retrouvailles imprévues, de questionnements sans fin, du passé qui redevient présent. Une histoire dans laquelle chacun pourra se retrouver quelque part puisqu’elle parle d’amour. Un joli moment.
L’amour à tous les temps
Cela fait 24 090 repas qu’elle n’a pas vu Louis. Une histoire d’amour d’il y a 22 ans, de l’éphémère, de l’intense, le printemps tout entier dans le ventre. Trois mois qui à eux seuls valent bien des années. Elle n’est plus celle qu’elle était à 30 ans, lui non plus sans doute. Qui est-il devenu ? Que sont-ils devenus ? Et si le présent n’était pas à la hauteur de ses souvenirs ? Faut-il prendre le risque de recommencer à attendre ?
Tandis qu’elle s’apprête à retrouver cet amant d’une autre époque, elle nous entraîne dans les souvenirs d’un amour qui est bien plus que ça. Sa palme d’or. Les images du passé semblent alors prendre vie sous ses mots. On revisite avec elle ces moments gravés dans sa mémoire tandis que le présent vient se superposer, en alternance, pour nous immerger dans la scène des retrouvailles.
Une palme d’or universelle
Si tout nous paraît si authentique, si familier, c’est parce que c’est de nous que nous parle cette femme à travers son histoire. Qui n’a pas ressenti les frémissements de la passion qui transforme tout en caresse ? Qui n’a jamais passé de longues minutes à écrire et réécrire un texto avant de l’envoyer à celui ou celle qui s’est mis(e) à hanter les pensées ? Et qui n’a pas, dans son dressing, cette doudoune fine à glisser sous le manteau l’hiver pour avoir chaud ?!
Parce que c’est aussi ça, ce texte, cette pièce : des commentaires, des références, des réactions dans lesquels on se retrouve et qui font parfois sourire, qui d’autres fois font poindre la nostalgie. Mais aussi des ruptures de rythme qui créent une forme de spontanéité, et qui amènent des temps de rire et de connivence. Car cette femme nous ouvre les portes de son passé, mais aussi celles de ses pensées dont on suit le flot comme s’il se déroulait sur grand écran. Nous devenons complices, confidents.
Une valse à deux temps
Véronique Viel nous charme par son naturel, son élégance et cette fraîcheur de jeu qui font pétiller son interprétation et nous la rendent attachante. Vêtue d’une simple chemise, elle se laisse tomber à la renverse sur son fauteuil en cuir comme si elle plongeait dans le passé et le laissait l’envelopper. Un passé sur lequel elle pose un regard attendri, amusé aussi sur le temps qui a filé en laissant des traces sur le cœur, le corps, les relations, les envies… Sur « une vie avec des « s » qui s’ajoutent aux mots » quand elle s’est conjuguée à une autre…
« Le temps et l’espace se sont embrassés et on s’est retrouvé dans la réalité«
Elle revêt ensuite son trench pour nous ramener au temps présent des retrouvailles, des constats. On se promène ainsi entre passé et présent, au fil de ses pensées, au rythme des émotions qui la traversent, ou encore de la chorégraphie fluide et élégante de ses déplacements sur la toute petite scène de la toute aussi petite salle des Déchargeurs qui lui sied à merveille ; au rythme aussi des bruits de pas qui résonnent sur le pavé, parfois hâtifs, parfois hésitants, d’autres fois apaisés.
À travers cet univers sonore, mais aussi les jeux de lumière, les tenues, ou encore le choix d’un décor restreint à un fauteuil de cinéma, la mise en scène de Lisa Schuster (qui se glisse d’ailleurs dans ce rôle en alternance) file la métaphore du septième art. Jusqu’à l’évocation des amants du Pont-Neuf qui vient boucler la boucle là où la pièce se termine, mais certainement pas l’amour…
Ma palme d’or, de Véronique Viel, mise en scène de Lisa Schuster, avec (en alternance) Véronique Viel ou Lisa Schuster, se joue jusqu’au 24 mars 2023, les jeudis et vendredis à 21h15, au théâtre Les Déchargeurs.
[UPDATE 2023] Se joue du 07 au 29 juillet, à 17h30, au Théâtre Pierre de lune au Festival OFF d’Avignon.
Retrouvez tous nos articles consacrés au Festival Off d’Avignon ici.
Avis
Il y a du rythme, de la poésie et beaucoup de tendresse dans ce seule en scène aux airs de comédie romantique intemporelle. Cette femme sans nom et finalement sans âge nous emmène dans son cinéma intérieur. Et nos yeux pétillent en même temps que les siens.