The Jokers propose de découvrir Skin, bien au chaud dans son salon pour résister à cette séance choc et violente, même si un peu attendue.
Bryon « Pitbull » Widner, membre d’un gang suprématiste, tente de changer de vie en tombant amoureux, mais c’est sans compter sur son ancienne « famille ». Adapté de la vie du véritable ancien néo-nazi Bryon Widner, Skin est le premier film de Guy Nattiv, scénariste et réalisateur de ce biopic dramatique et virulent qui, malgré ses fortes dénonciations, ne gratte pas assez la surface de ce discours humaniste.
Pourtant, le bonhomme avait déjà chamboulé le public en remportant à juste titre l’Oscar du meilleur Court Métrage en 2019, pour une réalisation également intitulé Skin. Peut-être que le chemin de la fiction convenait mieux à Guy Nattiv que la lourde tache de porter à l’écran le véritable combat d’un ancien suprémaciste contre ses anciennes idéologies et sa propre peau, couverte de tatouages explicites. Une dénomination et un propos communs aux deux œuvres qui font de la production A24 une claque lourde de sens.
Faire peau neuve…
Forcément, quand on pense au drame et à la dénonciation des skinheads américains, difficile de ne pas associer l’idée au film American History X de Tony Kaye. Or, si l’histoire peinte dans Skin est originale, véridique, on ne peut s’empêcher de retrouver des éléments scénaristiques clés du métrage de 1998. Par exemple, le rôle clé joué par l’afro américain (ici joué par Mike Colter), est également à l’origine du changement de mentalité du protagoniste, la réalité rejoint presque la fiction. Mais là où AHX jouait astucieusement du rapport du grand frère pour sensibiliser à la radicalisation, le film de Guy Nattiv se sert d’une romance pour amener le personnage principal à changer. Un regard plus intimiste au milieu des familles recomposées pour dénoncer (trop faiblement) le recrutements des orphelins ou des laissés pour compte par des manipulateurs extrémistes et violents qui n’hésitent pas à afficher leurs faits d’armes sur leurs visages.
En ceci le court et le long-métrage s’opposent puisque le premier choisit de recouvrir entièrement de tatouages la peau de son protagoniste quand le film retrace lui le combat d’un homme pour se débarrasser des siens et laver son visage de ses hontes. A ce titre, le talent de Jamie Bell donne au skinhead une force peu commune, une personnalité bouillonnante derrière l’encre sombre. Une performance démultipliée par sa partenaire Danielle Macdonald, incroyable de sincérité. Un duo parfait, asymétrique mais parfaitement alchimique pour illustrer un film presque documentaire, à la caméra embarquée, brutale et sans concession.
Plus intime que le récent Imperium avec Daniel Radcliffe, moins fort que American History X, Skin est une plongée émotionnelle dans une vie marquée par la violence.