Présenté au Festival de Cannes en Compétition Officielle, Asteroid City est le tout nouveau film de Wes Anderson. Un film choral se déroulant dans les années 50, conservant tout l’artisanat de son cinéaste, affublé encore une fois d’un casting all-star. Touchant et inspiré, même si son aspect maniéré en étouffe parfois la fibre émotionnelle.
Désormais un habitué de la Croisette, c’est toujours un plaisir de retrouver ce bon Wes Anderson via une nouvelle proposition de cinéma. Nouvelle, peut-être pas tant que ça, étant donné qu’Asteroid City nous accueille en terrain plus ou moins connu d’entrée de jeu. En effet, les ingrédients et la structure globale du métrage ne bouleverseront pas quiconque a déjà vu Grand Budapest Hotel, La Vie Aquatique ou plus récemment The French Dispatch.
Asteroid City se passe dans le grand Ouest des États-Unis, en 1955. Le titre du film est également le nom de la ville fictive (et théâtre des évènements de l’intrigue) où un météore s’est crashé, et où cette petite bourgade a érigé ses modestes habitations. Alors que le complexe militaro-scientifique du site accueille 5 jeunes surdoués (distingués par leurs créations), le quotidien d’Asteroid City va se voir chambouler.

Au même instant où Augie Steenbeck (Jason Schwartzman) y fait une escale affublé de ces enfants, et que les essais nucléaires voisins se font quotidiennement, un mystérieux OVNI débarque. Ainsi, Asteroid City va entrecroiser les histoires de plusieurs protagonistes : enfants, parent, scientifiques, actrices, gouvernement…jusqu’à un degré de lecture plus méta !
Coffre à jouets vintage
Au final, Asteroid City n’impressionne pas tant par sa trame globale, que par son impeccable fabrication ou sa direction d’acteurs sans grande faille. De par son aspect choral, le film a parfois ce caractère légèrement inconstant dans sa grande qualité, jonglant entre des arcs narratifs pas toujours égaux. Si tous les personnages n’ont donc pas forcément le même degré d’intérêt, Wes Anderson sait au moins s’entourer d’acteurs imprégnant d’emblée leur rôle, aussi minime soit-il (on pense en particulier à Jeff Goldblum et son apparition éclair).

De l’ouverture en mode Actors Studio d’époque avec Bryan Cranston, jusqu’à une scène impliquant Margot Robbie, en passant par un imposant trombinoscope de talents : Tom Hanks en grand-père acide, Tilda Swinton en scientifique excentrique, Jeffrey Wright en général bougon… Le casting n’a parfois qu’une minute top chrono de temps de présence (Edward Norton, Adrien Brody, Steve Carell…), offrant parfois à Asteroid City un aspect de galerie de caméos plutôt qu’une réelle dimension chorale.
Florilège de scénettes à Asteroid City
Et pourtant, cette dimension de films à sketches trouve ici plus d’incarnation que dans The French Dispatch, étant donné qu’Asteroid City justifie diégétiquement cette troupe par son postulat, à savoir observer le quotidien de cette bourgade et les diverses relations se télescopant. Néanmoins, le film n’est jamais meilleur que lorsqu’il se concentre sur Augie, sorte de looser magnifique impeccablement campé par Schwartzmann, et une romance emplie de non-dits entre avec le personnage de Scarlett Johansson.

Car il y a dans ce Asteroid City toute une narration méta à double niveau, où Wes Anderson semble à la fois se livrer de manière douce-amère sur sa capacité de conteur, traitant avec justesse le deuil et la résurrection émotionnelle à travers son protagoniste. Une feature qui fait de ce nouveau film une belle proposition, au potentiel certes contenu, mais à la délicatesse bienvenue.
Du Wes Anderson qui se la raconte bien
Et qui dit Wes Anderson dit forcément une fabrication qui à elle seule valide le visionnage du film. Des teintes pastel en passant par le sens de la symétrie, jusque dans le tempo verbal amenant l’humour, le réalisateur est encore une fois mettre absolu de son artisanat. Une réalisation mêlant habilement décors en dur, matte paintings à l’illusion parfaite, et maquettes plus vraies que nature (et ce dès sa superbe intro prenant place sur un train, émulant Bad Day at Black Rock de John Sturges). Bref, pas de quoi se priver !
Asteroid City sortira au cinéma le 21 juin 2023
avis
Asteroid City représente une nouvelle forme absolue du cinéma de Wes Anderson. Si son aspect choral étouffe quelque peu sa dimension émotionnelle, et que le tempo comique du réalisateur retrouve rarement l'équilibre parfait de la première demi-heure, difficile de rester impassible devant cette nouvelle preuve que Wes Anderson est un des cinéastes américains contemporains les plus singuliers et touchants.