Peu importe le moment où on découvre une œuvre dont tout le monde parle, il n’est jamais trop tard pour rattraper ses classiques. Qu’ils soient reconnus ou ceux d’une génération. Alors aujourd’hui, je pars à la découverte du Diable s’habille en Prada, parce qu’il y a toujours une première fois.
Sorti en 2006, Le Diable s’habille en Prada de David Frankel est une adaptation du best-seller de Lauren Weisberger, autrice qui fut par ailleurs l’assistante d’Anna Wintour, la directrice britannique de l’édition américaine de Vogue. Si l’histoire ne reflète pas entièrement la réalité, il n’en reste pas moins qu’elle dépeint avec fougue le milieu de la haute couture, et s’inspire de la propre expérience de la romancière.
Le film retrace donc l’historie d’Andrea Sachs, une jeune femme que rien ne prédestinait à travailler dans la mode. Pourtant, contre toute attente, elle se retrouve scotchée au bureau de Miranda Priestly, directrice sans vergogne du prestigieux magazine Runway. En l’espace de quelques minutes, elle est projetée dans un univers qui lui est totalement inconnu et devient le sbire de cette rédactrice en chef tyrannique. Une plongée dans les limbes de l’Enfer…
Quelle réputation ?
A sa sortie, Le Diable s’habille en Prada a fait un carton au box-office, aux Etats-Unis comme en France. Au total, il aura rapporté 326,5 millions de dollars de recettes. Il faut dire que le film contient les bons éléments pour attirer la foule.
Tout d’abord, parlons casting et mettons en lumière le génie de Meryl Streep. Elle livre une Miranda tout à fait détestable mais qui possède sa petite touche attendrissante. Si le film pris dans son ensemble attire des critiques mitigées, elle est celle qui fait l’unanimité : son talent se retrouve dans tous les papiers. Il faut dire qu’elle met la barre haute ! Pourtant, à ses côtés, Anne Hathaway (Andrea/Andy) se défend avec vivacité. Si aujourd’hui la réputation de l’actrice n’est plus à faire, elle était à l’époque encore au début de sa carrière. Malgré tout, elle rayonne à l’écran et on aimerait parfois lui dire “stop, fais un break !”, tellement son ardeur se retrouve dans son personnage. Pour terminer, Emily Blunt présente une Émilie qui finalise avec brio le trio féminin. Car oui, ce sont bien les femmes qui sont mises à l’honneur dans ce film.
Le regard porté sur ce monde de la mode – considéré comme inaccessible par la plupart des gens – est peut-être la raison ultime du succès de ce long-métrage. Découvrir de l’intérieur la vie et le fonctionnement d’un journal prestigieux de haute couture n’est pas chose courante. Entre les sorties gala, les vêtements de luxe, ou la Fashion Week parisienne, le film présente un univers aguicheur qui a su combler son public. La garde-robe représente d’ailleurs à elle seule un budget d’un million de dollars ! Entre les tenues et accessoires Chanel, Marc Jacobs, Fred Leighton, Calvin Klein, John Galliano,… Le Diable s’habille en Prada a tout pour plaire aux yeux (et cela même 14 ans plus tard !). Heureusement que la costumière Patricia Field avait ses contacts dans la mode.
Et puis oui, Le Diable s’habille en Prada a tout d’une comédie romantique américaine qui plaît. On passe un bon moment, on retrouve nos petites histoires à l’eau de rose et on est entraîné dans une course effrénée au rythme… endiablé !
Et si on le découvre aujourd’hui ?
A l’heure d’aujourd’hui, Le Diable s’habille en Prada fait face à une concurrence déloyale. Depuis 2006, nombreux films ont représenté l’univers de la haute couture et celui-ci ne parait plus si insaisissable. Relevons notamment le film Cruella de Craig Gillespie sorti en 2021. Il présente une Emma Stone transfigurée dans le rôle d’une jeune femme qui donnerait tout pour la mode. Mais c’est sans compté le biopic Saint Laurent de Bertrand Bonello avec Gaspard Ulliel. Ou encore Phantom Thread qui revient sur l’histoire du créateur de mode Reynold Woodcock.
Il faudrait ajouter que tous ces long-métrages tiennent à la fois par le talent des interprètes mais aussi par celui des réalisateurs et scénaristes. Le Diable s’habille en Prada a beau être un film culte, l’histoire reste peu originale. Alors oui, il est plaisant de voir Andrea se faire lapider dans son nouveau job pour ensuite se venger en devenant une secrétaire exemplaire. Seulement, cela ne suffit pas à combler un scénario : les rebondissements restent prévisibles. Alors on retrouve bien évidemment la rupture amoureuse, le flirt sous la Tour Eiffel et surtout… un happy end typiquement américain.
Il reste aussi un dernier détail à ajouter, qui n’est d’ailleurs pas des moindres. Le film multiplie les blagues liées au corps des femmes et bien qu’elles soient ironiques, elles restent bien trop présentes. A l’instar du comique de répétition sur la taille 40 d’Andrea, alors que l’actrice est particulièrement mince. Un humour parfois difficile à apprécier. Surtout qu’il faut savoir prendre la distance nécessaire avec tous ces conseils régimes, ces femmes skinny,… et cela n’est malheureusement pas atteignable par tout le monde.
Il est très facile de comprendre pourquoi le film a connu un tel succès à l’époque, mais lorsqu’on le visionne pour la première fois aujourd’hui, il paraît… daté. Le film d’une génération, mais peut-être pas d’une autre.