Les Victoires de la Musique s’apprêtent à célébrer leur 37ème édition. Et si la liste des nommés s’avère toujours aussi frustrante, l’on tente ici d’en deviner les futurs lauréats.
Les Victoires de la Musique paraissent être un dinosaure. Trente-sept éditions, et l’impression, toujours frustrante, de ne pas voir toute la qualité de notre scène hexagonale enfin représentée. Si l’on remarquera la disparition de plusieurs catégories, dont celle des musiques urbaines et musiques du monde, les absents sont malheureusement nombreux. Réunie en 8 catégories, on remarque rapidement l’absence de nombreux poids lourds désertant ici injustement cette liste de nommés. Surtout lors d’une année présidée par Stromae qui a su s’emparer de plusieurs genres, de la musique électronique au rap, pour en livrer des collaborations aussi éclectiques que très populaires.
Une longue liste d’absents
On commencera ainsi par évoquer celles de Sch et Aya Nakamura, uniquement présents dans une nouvelle catégorie, celle des albums plus streamés, ressemblant ainsi beaucoup trop au César du public, justifiant houleusement l’absence d’une catégorie dédiée à la comédie, genre rassemblant le plus d’entrées en France. Parce que mis à part Orelsan, ils sont malheureusement trop peu à représenter la scène urbaine française, genre le plus apprécié et plébiscité dans nos contrées. Et les efforts à saluer, dans la catégorie artiste et album étaient nombreux : L’étrange histoire de Monsieur Anderson de Laylow, le Fantôme avec chauffeur de Benjamin Epps, le Julius II de Sch, le Jefe de Ninho et les multiples efforts de Jul, pour ne citer qu’eux.
Et le rap n’est pas le seul genre oublié, puisque la fantastique collaboration entre Laurent Garnier et Les Limiñanas, l’album De Pelicula se trouve injustement absente, comme celle de Bertrand Burgalat qui signe son meilleur opus depuis 20 années de carrière avec Rêve Capital. Outre la révélation Léonie Pernet et son fabuleux Cirque de Consolation, du côté des musiques électroniques, l’absence de l’hypnotique KINKY DOGMA d’Irène Drésel et le SPECTRE : Machines of Loving Grace de Para One fait aussi tâche. On tente ainsi, malgré ces lourdes déceptions, de vous livrer notre palmarès. Et autant vous le dire tout de suite, on prévoit un gros braquage pour un seul et même artiste.
Notre palmarès
Les nommées dans la catégorie Artiste féminine : Juliette Armanet, Hoshi, Clara Luciani
- Notre victoire : Clara Luciani
À la bataille du revival-disco, Clara Luciani s’avère être gagnante face à Juliette Armanet. Parce que l’artiste a ici brillamment réussi le passage risqué du second album en rebattant les cartes de son superbe Sainte Victoire. Clara Luciani mut ainsi ici un brillant album de rupture en reprise en main d’une femme forte, libre et indépendante, assumant parfaitement le poids de son héritage, de Françoise Hardy à Véronique Sanson. Porté par le tube d’actualité Respire encore, la chanteuse n’a ainsi pas fini de briller, et cette année devrait le confirmer.
Les nommés dans la catégorie Artiste masculin : Julien Doré, Feu ! Chatterton, Orelsan
- Notre victoire : Orelsan
On vous a ici chanté les louanges de Civilisation, le quatrième opus du rappeur caennais, (que l’on considère comme son meilleur) et autant vous spoiler tout de suite : l’on est sûrs que ce sera son année aux Victoires de la Musique. Orelsan signe en effet une brillante synthèse de ses obsessions et a réussi, outre le fait de signer sa plus belle œuvre, un braquage total au niveau des ventes d’album, en relançant l’intérêt pour le CD. Une tournée à guichets fermés, un album politique qui tombe a point nommé, et les Victoires ne devraient pas tarder à tomber.
Les nommés dans la catégorie Révélation féminine : L’Impératrice, Barbara Pravi, Silly Boy Blue
Notre victoire : L’Impératrice
L’Impératrice n’en finit plus de signer des œuvres réussies et de s’imposer avec force et talent sur notre scène hexagonale. Leur dernier essai, Tako-Tsubo en est ainsi un aboutissement très réussi, n’hésitant pas à sortir des cadres imposés pour signer une œuvre aussi entrainante que prenante, à l’orchestration et univers visuel toujours très soignés.
Les nommés dans la catégorie Révélation masculine : Chien noir, Myd, Terre Noire
- Notre victoire : Myd
Myd demeure le seul représentant d’une catégorie musiques électronique injustement boudée. Et au-delà de son très réussi premier album Born a loser, l’artiste a su montrer son immense talent au détour de collaborations éclectiques et de défis originaux. Outre son hommage aux années 2000 Time Time avec Squeezie , l’on a ainsi pu retrouver le DJ lillois à la tête du premier morceau collaboratif avec L’Impératrice enregistré depuis les ondes de Radio Nova. Définitivement peur de rien.
Les nommés dans la catégorie Album de l’année : Brûler le feu de Juliette Armanet, Civilisation d’Orelsan, Cœur de Clara Luciani, Géographie du vide d’Hubert-Félix Thiéfaine et Palais d’argile de Feu! Chatterton
- Notre victoire : Civilisation d’Orelsan
Et encore, pour nous, une victoire d’Orelsan, qui remporterait ici son second trophée de la soirée. Bien qu’on ait adoré le superbe Palais d’argile de Feu! Chatterton et le sublime retour d’Hubert-Félix Thiéfaine, Civilisation reste pour nous le gagnant. Parce qu’avec Civilisation, Orelsan délivre le désir, aussi touchant qu’utopiste, de réunir tout le monde sous sa bannière. Celle d’un homme que le succès n’a pas changé, confronté à un amour qui a des airs d’éternel et qui affronte ici ses contradictions comme celles de tout un pays, réunis ici pour marquer une sorte de réconciliation.
Les nommés dans la catégorie Chanson originale : Bruxelles je t’aime d’Angèle, Le dernier jour du disco de Juliette Armanet, L’odeur de l’essence » d’Orelsan, Monde Nouveau de Feu! Chatteron, Respire encore de Clara Luciani
- Notre victoire : L’odeur de l’essence d’Orelsan
Un brûlot, et un retour en puissance parfaitement orchestré. L’odeur de l’essence, au-delà d’être l’un des meilleurs titres d’Orelsan, sera définitivement le son emblématique de cette triste année présidentielle et l’un des meilleurs titres et des sommets de l’album de son auteur.
Les nommées dans la catégorie Concert : Hervé, Ben Mazué, Woodkid
- Notre victoire : Woodkid
Hervé a beau être une bête de scène, se déhanchant ardemment au-dessus de son synthé, la tournée du passé inaperçu S16 de Woodkid s’est avérée aussi hypnotique que l’univers visuel très riche de l’artiste, véritable esthète s’étant fait reconnaître pour ses talents de clippeur de génie. Des projections envoûtantes et des instrumentations travaillées prenant toute leur ampleur sur scène, Woodkid signe au-delà d’un concert, un spectacle dans une toute autre galaxie.
Les nommés dans la catégorie Création audiovisuelle : Bruxelles je t’aime d’Angèle, Le reste de Clara Luciani, Montre jamais ça à personne de Clément Cotentin
- Notre victoire : Montre jamais ça à personne de Clément Cotentin
Étrange place offerte à la série de Clément Cotentin sur la carrière de son frère Orelsan. En effet, l’objet, brillant, fait de l’ombre aux belles ambitions de Bruxelles je t’aime d’Angèle et du très Jacques Demy Le reste de Clara Luciani. Ayant su rapidement dépasser le simple outil promotionnel (coucou Angèle sur Netflix) pour signer avec sincérité le portrait d’un artiste de ses débuts aux sommets, l’œuvre diffusée sur Prime Vidéo n’a ici (pour nous) aucune concurrence solide.