Prévu à la base pour nos salles, Comment je suis devenu super-héros s’est téléporté sur Netflix à cause de la némésis du cinéma, la pandémie. Attendu comme le premier film français populaire de super-héros, il promettait un métrage ambitieux. Relève-t-il le défi ?
Comment je suis devenu super-héros met en scène une société où les surhumains font partie du quotidien. Un jour une mystérieuse drogue procurant des pouvoirs fait son apparition et provoque des ravages. Les lieutenants Moreau (Pio Marmaï) et Schaltzmann (Vimala Pons), des policiers tout ce qu’il y a de plus ordinaires, vont devoir mener l’enquête pour démanteler ce trafic. Ils pourront compter sur le soutien de deux anciens super héros, Calista (Leïla Bekhti) et Monte Carlo (Benoît Poelvoorde)…
Premier film réalisé par Douglas Attal pour un faible budget de 15 millions d’euros, le projet avait de quoi laisser le spectateur méfiant, lui (et nous de même) étant biberonné au giga production hollywoodienne du genre. Monumentale erreur puisque le film est une véritable réussite ! Le réalisateur arrive totalement à s’adapter aux contraintes, réussissant à en retirer le meilleur.
En effet il aura, avec ses co-scénaristes Mélisa Godet et Charlotte Sanson, eu la bonne idée de ne pas plonger pleinement dans les codes spectaculaires propre au genre, mais de le marier au polar. Ici il n’est plus question de sauver le monde des griffes d’un méchant despotique mais de résoudre une enquête au milieu du surhumain. Un mélange qui de prime donne toute sa singularité à l’œuvre et de part ses enjeux plus réduit, vient l’ancrer dans notre réalité.
Un univers et des personnages passionnants
Et là réside toute la super force de Comment je suis devenu un super-héros. Par sa banalisation du surhomme, les auteurs se questionnent et imaginent ce que serait notre société actuelle avec de tels êtres. Discrimination et jalousie entre humain et surhumain, héros impliqués dans la réinsertion des criminels, psychologue pour personne doté de pouvoir ou encore youtubeurs de super-héros comme Sofyan; le métrage a beau mettre en scène des personnages pouvant tirer des lasers avec leurs yeux, son univers en devient ludique, palpable et parle plus que jamais de notre monde. Un réalisme encore jamais atteint dans ce genre (désolé Nolan…).
Cela est incarné par Monte Carlo, ancien super héros en manque d’aventure à cause d’une retraite forcée dû à un grave problème de santé. Un portrait original et frais de la figure super héroïque, pas si invincible que ça, dans lequel n’importe quel spectateur pourra s’identifier. Et la prestation étonnamment touchante de Benoît Poelvoorde n’est pas innocente à cela. Définitivement le meilleur personnage.
Mais le duo de tête, Moreau et Schaltzmann n’est pas en reste. Bien que l’univers soit passionnant, il n’étouffe jamais le soin apporté à ses personnages, leurs psychologies, leurs évolutions, le tout soutenu par l’alchimie des deux acteurs. Il en est de même du méchant incarné à la perfection par Swann Arlaud, qui bien que son excentricité soit tout droit sorti d’un comics, ses motivations restent finement pensées. Seule Calista est un peu deça du reste, dû à une utilisation bien moins ludique de ses pouvoirs servant plus de joker scénaristique qu’autre chose.
En effet, Comment je suis devenu un super-héros n’est pas exempt de quelques faiblesses. Sa Kryptonite étant principalement son budget. Là où les effets spéciaux sont impressionnants et n’ont jamais atteint un si bon niveau dans les productions françaises (les Bessoneries exceptées), le climax boite quelque peu en le situant dans un décors assez cheap (un entrepôt désaffecté) où il a du mal à bien spatialiser/découper son action ainsi qu’à créer un enjeu dramatique frissonnant.
Un film fait par un connaisseur
Mais nous lui excusons facilement ses petits défauts tellement Douglas Attal mélange ses excellentes références (Gotham Central, Watchmen ou X-Men…) pour se les approprier intelligemment et créer un pur film de super héros français, s’éloignant des codes de nos chers ricains. N’oubliant jamais le divertissement avec ses moments de légèreté et d’action, il arrive à insuffler dans certaines scènes une dose mélancolie/poésie issue de notre culture pour donner une réelle identité unique.
Tel un Superman symbolisant l’espoir, Comment je suis devenu un super-héros est une lueur au sein de notre industrie cinématographique dont on espère en inspirera d’autres et convaincront nos studios à plus miser sur des films de genre populaire.