Après nous avoir diverti suite à son passage chez James Bond, le grand Sam Mendes nous délivre une claque monumentale avec 1917, une prouesse filmique plus personnelle mais tout aussi spectaculaire.
Deux soldats britanniques en pleine première guerre mondiale, Schofield et Blake, ont pour mission d’amener une lettre à des alliés au delà du front ennemis pour les prévenir d’une embuscade imminente. Une course contre la montre au milieu des tranchées et no man’s land dont dépend la vie de milliers de soldats…
Un périple sans concession dont on ne loupera pas une miette ! Désireux de retranscrire cette guerre de la manière la plus immersive possible, Sam Mendes fait le pari fou de tourner tout son film en (faux) plan séquence ! Et c’est un pari magnifiquement réussi. L’immersion au sein de ces tranchées est totale, prenant émotionnellement aux tripes face à la violence de la guerre et époustouflant techniquement devant cet exploit cinématographique. Tout est fluide et les plans sont méticuleusement millimétrés et composés.
Grâce à des trucages invisibles, à aucun moment le pari technique ne restreint l’ambition artistique. Flirtant avec le film d’aventure, il alterne ingénieusement les différents environnements et péripéties pour fournir un spectacle ambitieux et prenant qui ne manquera pas de faire vibrer. De véritables séquences de cinéma qui resteront dans les annales, à l’image de ce climax littéralement explosif qui hérisse les poils grâce à la bande son magistrale de Thomas Newman ou de cette course poursuite de nuit au milieu des ruines, éclairée de manière inégalable par l’esthète Roger Deakins.
Une proposition de cinéma magistrale
À contrario de son flagrant “film frère” Dunkerque, 1917 n’est pas non plus une avalanche péripétie. Il sait poser son récit pour faire émerger de l’émotion, que ce soit celle du personnage ou la nôtre. Avec cette alternance d’épique et de contemplation, on pourrait déceler une certaine mécanique redondante au sein de récit, misant plus sur une mission linéaire que des rebondissements, mais cela reste au final représentatif de la guerre et donc efficace.
Les plus rigoristes pourront se plaindre que le parcours psychologique du personnage qui doit reprendre goût à ce qui se passe hors des tranchées, notamment sa famille, est quelque peu effacé par l’ampleur du périple, tout comme le sont les têtes d’affiche qui relèvent plus du caméo fonctionnel. Mais la proposition de cinéma est si impressionnante qu’on l’excuse. Même si l’intimisme est bel et bien présent et rondement mené, avec pour exemple la scène du bambin, ponctuant le récit comme il faut, ce n’est clairement pas cet aspect du film qui marquera les esprits.
S’inspirant d’un récit de son grand-père et passant pour la première fois de sa carrière à l’écriture, Sam Mendes nous livre une oeuvre plus personnelle qu’à son habitude, et s’en donne les moyens aussi bien techniquement que spectaculairement et émotionnellement. Il veut nous faire vibrer tout autant qu’il a vibré lorsque qu’il a conçu ce film mais aussi lorsque son grand-père lui racontait ses récits de guerre. Et c’est une pure réussite.