On ne vous en a peut-être jamais parlé, mais nous sommes de fervents amateurs de Sniper Ghost Warrior Contracts. Nous n’irions certes jamais dire que le jeu de CI Games (ex City Interactive) est un symbole de perfection, mais nous le défendrons toujours pour la belle maturité qu’il a su incarner pour une licence qui n’était restée jusque-là qu’un running gag.
Avant de s’attaquer à Sniper Ghost Warrior Contracts 2, petit détour tout de même par le reste de la licence. SGW 1 et 2 étaient de mauvais Call of Duty like accompagnés d’un pseudo goût “sniper”, puisant également du côté de Sniper Elite et de son fameux losange rouge. Ils étaient de parfaits exemples de mauvais balisage et de “classicisme morbide” ; sans même le charme du temps de F.E.A.R. et de sa délicieuse version du LithTech Jupiter EX, beaucoup utilisé par City Interactive dans les années 2008 et 2009 pour des FPS certes pas folichons, mais plutôt réjouissants.
SGW 3 qui était censé incarner un renouveau pour la licence, se révèlera au final être un titre plutôt médiocre qui cela dit, n’en démordait pas avec une pelletée d’intentions très louables. En effet, il nous semblait être un pas dans la bonne direction et montrait la prise en compétence et en lucidité de son studio. Une approche Bac-à-sable d’infiltration plutôt excitante qui n’attendait qu’une mutation des ambitions pour se concrétiser dans un excellent de jeu de niche : Sniper Ghost Warrior Contracts.
Pourquoi Contracts c’est génial ?
CI Games, ce ne sont pas de grosses équipes, les crédits peuvent en témoigner. SGW Contracts était finalement un jeu assez proche du 3 – avec ce qu’il faut de lucidité pour cette fois-ci arriver à bon port. Une densité revue à la hausse, des situations plus variées et consistantes, l’aspect “Far Cry” du bled remisé au placard ainsi que quelques idées judicieusement empruntées aux reboots d’Hitman, tout ça fait partie de ce qui fonde notre bien meilleure appréciation pour l’épisode de 2019.
Malgré un game feel très proche – Il vous suffira d’aller comparer les deux ici -, un changement en particulier a acté la suprématie de Contracts sur le genre : la refonte de l’interface des viseurs pour inclure le décalage horizontal dû au vent. Un parfait équilibre entre accessibilité et travail laissé à l’appréciation du joueur. C’est par exemple là qu’est le gros point noir de son concurrent de toujours : Sniper Elite.
Le “losange rouge” colle aux basques de la licence de Rebellion drainant dramatiquement l’intérêt d’un jeu de sniper en plaçant le joueur dans une situation d’assistanat constant, dépendant de cette interface et de ce “pouvoir magique” juxtaposé au jeu. C’est quelque chose que Contracts a finalement beaucoup plus naturellement intégré au viseur, créant ainsi une complexité médiane très agréable.
Une idée que poussera d’ailleurs encore Sniper Ghost Warrior Contracts 2 en rééquilibrant son mode de difficulté maximale pour enlever les indications de distance une fois les ennemis marqués. Cela ajoute ce palier de maîtrise qui manquait à la version 2019, ça donne une nouvelle couche délectable de lecture de jeu pour les joueurs que ça intéresse – dont nous. C’est le genre de point sur lequel on sera très regardant dans le prochain Sniper Elite qui ne pourra pas se permettre d’ignorer le presque coup de génie de CI Games.
Contracts 1.5 – Overall
Le terrain bien débroussaillé, on peut s’attaquer au cas Sniper Ghost Warrior Contracts 2, un second épisode (ou cinquième, c’est relatif) dans la totale continuité de son prédécesseur. Pour nous être replongés dans celui de 2019 il y a peu, l’interface, les options, la structure de jeu, les systèmes de progression, tout semble de retour de façon assez identique. Dans Contracts 2, il est plus affaire de rééquilibrage et de polissage qu’à proprement parler de grosse évolution.
Si on pourrait a priori soupirer devant tout ce statisme ce serait oublier l’efficacité de sa formule, mais également nier tous les efforts faits pour perfectionner les acquis du précédent. Il y a bien quelques bugs familiers, quelques soucis hérités, mais dans l’ensemble c’est le jeu au global qui se voit amélioré par petites touches. Pour vous dire, même les « pattern » de recul des fusils d’assaut semblent moins brouillons, de meilleures sensations complétées par du démembrement gadget – désactivable -, mais qui donne tout de suite de l’ampleur aux explosifs et autres gros calibres.
Contracts est une succession de petits changements qui font la différence ; comme l’IA et ses lancers de grenade dévastateurs, comme le fait d’enfin pouvoir charger plusieurs sauvegardes en amont, comme la revalorisation de tout le contenu déjà existant via des rééquilibrages bienvenus. Le changement sur la difficulté maximale évoqué dans l’introduction est également de ce genre là ; peaufiner, améliorer ce qui peut l’être dans une formule déjà efficace. D’ailleurs avec tous ces petits changements le jeu s’avère au final plus dur que son prédécesseur donnant enfin un peu plus d’intérêt à son spectre de difficulté et à sa rejouabilité.
Contracts 1.5 – Equipement et progression
On va essayer d’établir une liste de modifications qui nous paraissent aller dans le bon sens. Pour les arbres de compétence déjà, beaucoup de choses accessoires ont été éludées et maintenant le tout ne demande qu’une seule ressource. D’ailleurs tout est plus clair sur ce plan. Les défis et les contrats vous donnent des points de compétence, les primes des points permettant d’acheter de nouveaux fusils et le reste se monnaie. Pareillement vous ne récupérez plus de deniers en fouillant les corps, cela servant maintenant uniquement à récupérer des munitions ou autres gadgets comme des grenades ou des bandages. Ça évite le syndrome “je regarde mes pieds et fouille les poubelles plutôt que de jouer au jeu”. Maintenant il est possible de “farmer” de l’argent avec le système de “performance” en fin de niveau qui vous rémunère en fonction de vos performances justement, ça paraît bien plus sain et clair comme fonctionnement.
Ensuite, on trouve un rééquilibrage de l’ensemble de l’armement qui, accompagné de quelques ajustements de progression, tend à rendre valables plus d’armes, à court terme comme sur le long terme. Le jeu évite l’écueil du premier où vous pouviez simplement et directement prendre le meilleur fusil de précision et puis rouler sur le jeu. Cette fois-ci, chaque arme a une “niche”, de gros points faibles et de gros points forts. Attention, ça ne veut pas dire que certains unlocks ne rendent pas les précédents caducs, par contre le jeu nous amène plus naturellement à essayer d’autres armes et n’impose plus un sniper unique – enfin moins. Au final, c’est le type de contrat qui vous poussera vers l’une ou l’autre des catégories de sniper, disons les ultra silencieux et les ultra longues portées.
Dans cette idée de légère modification de l’épisode de 2019, on retrouve aussi une véritable emphase sur les différents types de munitions. Dans le précédent, il fallait avoir une compétence spécifique pour équiper en plus de ses balles « classiques », un chargeur de balles “spéciales” ayant différentes propriétés (leurre, guidée explosive, etc) ; cette fois-ci, aucun restriction pour le premier chargeur, ce qui invite plus naturellement le joueur à expérimenter.
On retrouve par exemple des balles « perces armures » très utiles pour les snipers légers mais silencieux pour éliminer les soldats lourds. Dans Contract le meilleur fusil perçait directement les casques de ces unités, ici le jeu impose leur utilisation avec des unités plus robustes que jamais – sauf avec les fusils lourds évidemment. Les nouveaux défis qui stimulent la rejouabilité viennent également valoriser des munitions jusqu’alors anecdotiques. Pas d’ajout à proprement parler, mais plus de justesse dans le dosage et la préparation. Des choses restent encore à faire, il est clair que certains gadgets restent trop « gadget » encore une fois, mais on sent déjà un pas vers le mieux.
Enfin, au titre des petits changements que l’on aime bien et avant d’aborder le gros morceau, un petit mot sur les “collectibles”. Ils sont cette fois associés aux camouflages, indiqués lorsqu’à proximité via le radar et non plus affichés sur la carte du niveau. On est loin des affiches qui donnaient des points de compétence si arrachées dans Contracts. Ici les “collectibles” sont remisés en une chasse aux oeufs cosmétique et on trouve que c’est la juste place de ce genre de chose.
Sniper Ghost Warrior : Beyond
Vous vous en doutez, on va enfin vous parler de tir à très longue portée. Sniper Ghost Warrior Contracts 2 se divise en deux types de missions, les classiques, donc dans le style de son prédécesseur avec des cartes ouvertes qui vous laissent une grande liberté d’approche et où tout est disons accessible. Vous pouvez tirer partie d’une position éloignée avec votre fusil de précision, mais vous pouvez aussi en dernier recours prendre votre pistolet et tenter le contact. Cette fois-ci cependant, en plus de ces missions classiques, on trouve les missions dite “très longue portée”, dans lesquelles on se retrouve sur une carte plus modeste où sont accessibles des “spots”, comme plusieurs mini missions dans une seule. Vous ne pouvez pas aller à pied dans le décor, vous devez gérer tout ça de loin, souvent à plus d’un kilomètre.
Ces missions donnent une toute nouvelle dimension au core gameplay sniper de la franchise. Une balle va mettre un certain temps à arriver à une telle distance et toutes les implications habituelles se retrouvent dans les extrêmes. Presque impossible – mais pas infaisable – d’abattre une cible en mouvement à de telles distances – l’occasion de quelques moments d’anthologies. Ces circonstances demandent des tirs plus préparés et précautionneux, donnant au jeu une nouvelle exigence. Si vous prenez la peine de désactiver les killcams, chaque balle tirée est l’occasion d’un petit moment d’appréhension, d’une petite tension qui montrent clairement que CI Games n’a rien à prouver sur terrain du jeu de Sniper.
On est finalement loin de la nouveauté anecdotique étant donné que 3 missions sur 5 prennent la forme de contrats longue distance. C’est un plutôt bon équilibre. D’un côté des missions très bac-à-sable comme dans le premier, mais un poil plus ambitieuses, et de l’autre, des missions qui se concentrent avant tout sur un challenge très longue distance avec un aspect puzzle game induit par les défis bien plus nombreux et inspirés que dans Contracts 2019. Des défis qui poussent le joueur dans le bon sens. Au final, si vous voulez “simplement” finir le jeu, c’est pas bien dur, vous laissant pas mal de place pour de l’improvisation, l’idée cependant, est de le finir avec classe et finesse, parce que le style, c’est comme le gras.
Contingences nécessaires
Vous l’avez compris, on a beaucoup aimé ce second épisode, mieux calibré, mais également plus généreux malgré un contenu a priori équivalent. Cependant, il reste quelques préconisations à faire avant de vous le conseiller.
Avant toutes choses, notez que l’optimisation, comme celle du précédent semble avoir un peu de mal avec les hautes définitions. C’est simple, sur notre 980ti (qui a certes 6 ans) le WQHD (1440p) est presque deux fois plus gourmand que le Full HD (1080p) classique, cela dit, avec un anti-aliasing plutôt malin, le titre reste heureusement très plaisant à l’oeil dans toutes les situations et franchement fluide à plus de 60 fps, mais encore une fois, à la condition de ne pas dépasser la barre du 1080 selon votre configuration. On a cependant vu des jeux mieux optimisés – sans pour autant que son cas soit scandaleux.
A contrario quelque chose de beaucoup plus scandaleux : la politique de contenus payants entourant le jeu. À l’heure où l’on écrit ces lignes, soit moins de deux semaines après sa sortie, le jeu dispose déjà de 15 DLC représentant une valeur totale de 71,85€. S’il n’y avait là que des camouflages, nous n’en ferions pas tout un flan sachant que du contenu gratuit est normalement à prévoir… Et même, on a envie de dire qu’on parle là d’un titre relativement proche du précédent facturé 50€ dans sa version deluxe, finalement rendue caduque dès le lancement, vous pensiez avoir tout le contenu ? Et bien non. Il existe même un nouveau pack d’armes comprenant notamment une arbalète.
D’ailleurs, si vous n’avez pas précommandé le jeu, vous n’aurez pas – du moins pas sans coût supplémentaire – le meilleur pistolet silencieux. Et d’ailleurs, est-ce bien malin de donner une arme qui rend caduque la moitié des autres comme bonus de précommande ?
Bref, vous l’aurez compris, tout ça a un doux goût d’abus. Le genre de choses que l’on aimerait bien ne pas voir reconduit pour le prochain épisode. C’est dommage de voir que du contenu qui aurait dû être dans le titre de base, se retrouve ainsi monnayé au compte goutte. Rappelons que le jeu de base vous est facturé 40€. Pour le reste, c’est un plutôt bon jeu, comme Contracts en son temps, le meilleurs de sa franchise. Malgré les disgrâces, s’il ne fallait en retenir qu’un, prenez directement le second.