Après une première saison magnifique, Perry Mason vient de terminer son deuxième ride télévisuel, toujours chez HBO, prouvant une fois de plus sa maestria narrative et visuelle, même si l’enquête semble ici plus dispensable.
Maintenant installé comme avocat de la défense, Perry Mason se cantonne à son cabinet qu’il gère avec Della Street. Mais si l’affaire précédente continue de le hanter, un nouveau meurtre politique va bientôt chambouler ses plus intimes convictions. Toujours diffusé sur HBO (et le pass Warner de Amazon chez nous), le show continue d’être un must see pour les fans de policier hard-boiled classieux et délicieusement enfumés, et cette fois, le développement des personnages prend largement le pas sur l’intrigue principale. Une ambivalence délectable, mais un peu paradoxale. Mais on chipote parce qu’il s’agit toujours d’un bijou télévisuel.
Si les créateurs Rolin Jones et Ron Fitzgerald ont quitté le navire depuis la fin de la première saison, c’est maintenant Jack Amiel et Michael Begler qui enfilent la casquette de showrunners et de principaux scénaristes pour cette deuxième salve d’épisodes. Un renouveau qui s’en ressent narrativement avec une approche plus intime, où l’enquête principale ne devient finalement qu’un regard sur le développement des personnages. Une direction un peu surprenante après une première saison très linéaire et qui prenait le temps de nous fournir une histoire passionnante en même temps que de peindre de magnifiques protagonistes. Ici, l’un devient prétexte pour développer l’autre, et quel développement mes aïeux.
Chinatown
A l’instar de tout polar qui se respecte, cette saison 2 de Perry Mason s’élance avec un meurtre. Cette fois, le fils d’un richissime homme d’affaire est retrouvé mort et tous les indices accusent deux émigrés mexicains. Toujours meurtri par son sa dernière défense, Perry Mason (génial Matthew Rhys), rechigne à replonger dans ce qui semble, évidemment, être une affaire très médiatisée.
Si l’on quitte les sphères religieuses d’un L.A conservateur, on s’enfonce ici dans le paraître d’une autre caste, celle des promoteurs immobiliers pour toujours afficher le contraste avec la plèbe, marginalisée et ostracisée. Ainsi, toujours perdu entre ses devoirs d’avocats et ses intuitions plus terre à terre, notre bon Perry voit ici sa conception de la justice mise à rude épreuve. Or c’est là toute la subtilité de cette saison de Perry Mason, à savoir mettre en exergue sa vocation altruiste face à sa révolte intérieure, son insubordination sociale et son anticonformisme.
Plein de doutes, de passion, le protagoniste, bien aidé par l’acteur qui le joue, est magnifique. Toujours engoncé dans son cuir ou son costume 3 pièces bon marché et derrière les stores enfumés d’un bureau sous éclairé, pas de doute, le show de HBO est léché absolument parfaitement pour nous emporter instantanément dans une reconstitution vibrante de l’Amérique d’après-guerre.
L.A. Confidential
Entre corruption et réintégration du Japon sur la carte internationale, tout est sujet à une peinture géopolitique engagée et forte d’une critique sociale, terrain propice pour appuyer les différentiations intrinsèques d’une Amérique en plein essor. La course au pétrole, la ségrégation raciste, l’implantations de magasins franchisés, le développement des communautés, tout y passe. Un florilège sociétal révolu mais témoin d’une période en pleine évolution et ce jusqu’aux mœurs alors que Perry Mason continue d’appuyer sur l’inclusion des homosexuels via le procureur général (Justin Kirk) et la superbe Della Street (pétillante Juliet Rylance).
De belles peintures individuelles pour mettre au cœur du récit les hommes et les femmes derrière cette idée de Justice égalitaire mais pourtant bien marginalisée par les puissants, comme à chaque fois. L’occasion de brosser des portraits de personnages incertains, hésitants, perdus face à une industrialisation de masse et la mainmise d’une élite snobinarde intouchable pour mettre en avant ceux qui n’ont rien, ou presque.
Dommage alors de constater que l’intrigue ne fait finalement que de se déliter au profit de sous intrigues, certes passionnantes puisqu’elles permettent de se focaliser sur tel ou tel personnage comme le génial détective Paul Drake (génial Chris Chalk), mais qui parait parfois comme fantomatique devant les si beaux développements parallèles de ses protagonistes. On se fiche un peu de l’affaire et on admire plutôt la dépression désabusée de Mason avec gourmandise. Peut-être que c’est finalement là que la série excelle, savoir se détourner son axe principal pour s’attarder sur les petites choses de la vie, les mines décrépies et usées par une époque charnière.
Encore une fois, Perry Mason est une réussite qui, malgré un fil narratif un peu ténu, permet cependant d’apprécier et d’admirer de superbes acteurs dans une ambiance délicieusement rétro et désenchantée.
La saison 2 de Perry Mason est disponible sur HBO ou sur le pass Warner de Prime.
Avis
Toujours aussi magnifique, cette saison 2 de Perry Mason prend l'intéressant parti de délaisser son intrigue principale pour développer intelligemment ses personnages dans une ambiance délicieusement enfumée.