Mercredi a (déjà) battu tous les records sur Netflix, transfigurant au passage son personnage en pur produit de la plateforme.
Mercredi est donc de retour sur Netflix. Héroïne des films de Barry Sonnenfeld, itération la plus populaire et la plus appréciée de l’œuvre de Charles Addams, l’aînée de la famille la plus macabre d’Amérique, après avoir connu un dernier opus animé de très basse facture, atterrit donc sur Netflix. Annoncée en grande pompe par l’interprétation de Jenna Ortega, nouvelle scream-queen omniprésente cette année (Scream et X,) et comme le grand retour de Tim Burton, qui ne réalise au passage que quelques épisodes (la série étant développée par le duo derrière Smalville), le réalisateur semble toujours aussi désincarné dans cette formule qui l’est malheureusement tout autant, aussi efficace et divertissante soit-elle.
Teen Burton
Si La Famille Addams a autant marqué les esprits, c’est pour son anticonformisme macabre égratignant une Amérique capitaliste en totale perte de repères et de sens. L’œuvre de Charles Addams parait ainsi toujours d’actualité, au moment où les plateformes de streaming, les blockbusters et les réseaux sociaux imposent une culture rapide et jetable. Cette famille, composée de personnages authentiques et diablement attachants dont la singularité cachait surtout un amour débordant en était l’antithèse parfaite, rendant de plus hommage à toute une littérature gothique, de Bram Stocker à Mary Shelley.
C’est ainsi que Tim Burton, dont l’univers semble être une évidente continuité, avait déjà été approché pour réaliser un projet autour de cette famille, qu’il avait alors poliment refusé. Aveu d’échec, retour en grâce ou gros chèque, nous ne saurons finalement rien de ce soudain retournement de veste, pour un réalisateur qui a dernièrement exprimé toute sa tristesse d’être devenu un produit comme un autre contrôlé par une grosse firme hollywoodienne dans Dumbo. Et Mercredi symbolise tout ce problème, même s’il tente toutefois de l’affronter, en embarquant Mercredi Addams dans une école, au cœur d’un combat opposant très mollement freaks et normies.
JennAdams
Parce que Mercredi, passée à la moulinette Netflix, perd en authenticité ce qu’elle gagne en efficacité d’un produit d’appel dont est très friand la plateforme : les teen-dramas. L’œuvre de Charles Addams se trouve ainsi mixée à Teen Wolf et autres Riverdale dans une relecture très contemporaine, pur produit de la génération Z. Sous forme d’une enquête avec de très, très grosses ficelles, et de personnages plus fades les uns que les autres, Tim Burton déploie la même fatigue qu’avec l’adaptation de Miss Peregrine et les enfants particuliers, énième redite de son œuvre où Eva Green se voit remplacée par une Gwendoline Christie faisant le service minimum. Heureusement, il y a la talentueuse Jenna Ortega qui absorbe véritablement tout autour d’elle.
Rien n’existe plus et paraît finalement très fade au regard de la puissance avec laquelle la jeune actrice s’empare brillamment du personnage, même lorsque ses répliques assassines ressemblent parfois plus à un moteur à punchlines qui tourne parfois à vide. Catherine Zeta-Jones et Luis Guzman, comme le reste de la famille ne seront ainsi plus que des invités comme les autres d’une formule aussi divertissante qu’efficace, ressemblant à son insu au véhicule doré d’une actrice qui a décidemment un glorieux avenir devant elle. Au revoir les normies, les freaks ont pris le pouvoir, même si ce dernier ressemble quand même beaucoup à quelques chose de cruellement banal.
Mercredi est disponible sur Netflix.
Avis
Mercredi Addams passe à la moulinette Netflix et perd en authenticité ce qu'elle gagne en efficacité. Tim Burton emballe sans conviction (quelques épisodes) cette énième proposition désincarnée, muant les folies de Charles Addams en teen-drama cruellement banal. Heureusement, il y a Jenna Ortega et son interprétation parfaite.