Cinéaste et scénariste de légende, Paul Schrader (célèbre pour l’écriture de Taxi Driver et plus récemment la réalisation de The Card Counter) n’en a pas fini avec le cinéma du haut de ses 77 ans. Avec Oh, Canada, il retrouve Richard Gere quatre décennies après leur collaboration sur le film culte, American Gigolo.
Adapté du roman éponyme de Russell Banks, Oh, Canada est l’histoire d’un réalisateur canadien, Leonard Fife (Richard Gere), qui accepte un entretien télévisuel pour revenir sur sa carrière et sa vie, alors qu’il est sur le point de mourir. À ses côtés, il tient à avoir sa femme (Uma Thurman) près de lui durant l’interview afin de lui raconter sa version de sa vie. Pour lui, la caméra est le témoin qui fait ressortir la vérité de ses propos.
Affaibli mentalement et physiquement, Leonard Fife a des difficultés à se souvenir précisément de ce qu’il veut raconter et dans quel ordre. Le scénario oscille ainsi entre le présent et divers moments du passé. Cette confusion volontairement orchestrée par Schrader plonge le spectateur dans la désorientation, reflétant la mémoire vacillante du personnage.
Les regrets d’une vie
Leonard a eu une belle carrière universitaire et artistique au prix d’un égoïsme forcené, n’hésitant pas abandonner sa famille sur un coup de tête. Ces regrets tardifs sont la raison pour laquelle il souhaite cette interview devant sa femme avec qui il partage une longue relation de compréhension mutuelle.
Avant de mourir, il veut dévoiler qui il est vraiment. Du moins, ce qu’il croit être étant donné que tout récit émanant d’un humain est un récit subjectif. La plus grande force d’Oh, Canada réside dans le traitement de ses thématiques en lien avec la subjectivité de la mémoire, les regrets et bien entendu l’approche de la mort. Il s’en dégage une douce mélancolie qui rend le personnage de Richard Gere touchant, alors qu’il s’est comporté de manière très égoïste toute sa vie. On aurait néanmoins apprécié un développement encore plus poussé des personnages, entre autres celui d’Uma Thurman ou du fils de Leonard.
Classicisme formel
Du fait du processus narratif qui rend le montage assez complexe – par moments confus – Paul Schrader aborde le film avec un style naturalise plutôt classique. La prise de risque se situant dans le déroulement du récit, il a probablement fait le choix d’avoir une approche sobre pour compenser. Cela marche plutôt bien, mais Oh, Canada manque de ce fait d’un peu d’ampleur.
Ce qui fait que le film repose essentiellement sur la très bonne interprétation de ses acteurs. Richard Gere est méconnaissable et émouvant, tandis qu’Uma Thurman incarne avec justesse une femme voyant l’homme de sa vie s’éteindre lentement devant elle. Dans le passé, Jacob Elordi incarne avec succès Gere jeune, il représente impeccablement la force qui dicte les actes souvent irrationnels du personnage.
En fin de compte, Oh, Canada est un film touchant et sincère, imprégné d’une douce mélancolie et d’une réflexion à la fois simple et profonde sur la mort et les regrets. Sa durée relativement courte (1h35) empêche cependant une exploration plus approfondie des multiples facettes de ses personnages. De plus, la mise en scène précise, mais académique de Paul Schrader ne permet pas au film de véritablement bouleverser le spectateur.
Oh, Canada n’a pour le moment pas de date de sortie en France. Retrouvez toutes nos critiques du Festival de Cannes 2024 ici.
Avis
Oh, Canada aborde des sujets passionnants tels que les regrets, la mort et les choix de vie. Il possède une narration maitrisée malgré le style volontairement confus du récit et qui tient en partie à l'aide de la belle prestation des acteurs principaux. Un film émouvant, mais qui manque d'ampleur !