Agréablement surpris par cette sympathique saison de WandaVision (notre critique du season premiere), on émet cependant quelques réserves sur la première série du MCU.
Wanda Maximoff et Vision se sont retirés dans le petit village de Westview mais les apparences sitcomiennes cachent de lourdes révélations… Pour sa première série, l’univers cinématographique Marvel met le paquet, en résulte un ovni balayant toute la compétition télévisuelle sur son passage, WandaVision. Pourtant, le résultat n’est pas aussi novateur qu’il semblait l’être.
Suite à la fermeture de Marvel Television, Marvel Studios fait ici ses premiers pas dans le petit écran et s’offre, en seulement quelques semaines de diffusion, le record de la série la plus regardée dans le monde. Un succès pour le studio aux grandes oreilles et la créatrice Jac Schaeffer, déjà en charge de l’écriture de Captain Marvel ou de Black Widow. De quoi étendre l’univers des Avengers tout en développant (un peu) celui de la Sorcière Rouge. Sans trop s’enflammer, en préparant mine de rien à la suite de Doctor Strange.
Belle proposition
Si on commence déjà à sortir les fusils pour tirer (gentiment) sur l’ambulance, il faut bien reconnaître que WandaVision est une série très sympathique. Déjà, la série brille par son format court, avec des épisodes de 30 minutes à la diffusion hebdomadaire, lequel ne souffre d’aucune faute de rythme tout en se laissant dévorer de façon addictive. Ensuite, la véritable réussite de la série demeure le duo Elizabeth Olsen et Paul Bettany qui débordent d’alchimie communicative tout en proposant un angle singulier à deux Avengers tristement trop secondaires. Le couple trouve ici une incroyable opportunité d’explorer la psyché de ces personnages en y développant la notion de deuil comme rarement un produit Marvel (ou Disney) ne s’y serait risqué.
A couvert d’un ton humoristique, WandaVision approche de façon mesurée et pertinente la perte du grand amour, avec un grand A. D’habitude très insignifiante dans le MCU, les personnages ne trépassent jamais véritablement, la mort est ici maîtresse de maison, omniprésente. Subversive, elle pousse un personnage enjoué dans ses retranchements et définit de tendres considérations dans des élans émotionnels par moment épatants. De ce fait, les étapes du deuil s’affichent ici de façon détournée, à tel point que le déni, la colère, le marchandage ou la dépression s’accompagnent d’élans comiques pour contrebalancer ce sujet sérieux. Un processus d’acceptation, malheureusement entaché par l’absence de conséquence, mais qui se reflète jusque dans l’évolution formelle du show, lequel trouve sa grande force dans une forme atypique, qui s’amuse de jolis hommages rétro.
Construit comme une sitcom avec une intrigue bouclée, le show s’aventure petit à petit vers le feuilleton pur et dur, fort de ses références appuyées et maîtrisées aux différentes époques télévisuelles. Si l’on suit les aventures, pénibles, du SWORD, la focalisation principale de la série, celle du couple WandaVision, s’articule autour de l’âge d’or de la télévision américaine. Ainsi chacun des premiers épisodes propose un retour chronologique sur les grandes séries familiales emblématiques, comme un doux retour dans le temps. De belles madeleines de Proust avec lesquelles on passe de séries en noir et blanc telles que The Dick Van Dyke Show en 1950 ou Ma sorcière bien-aimée en 1960 aux sitcoms en couleurs comme Sacrée Famille pour 1980 ou Malcolm pour les années 90. Une belle prouesse où les plateaux et décors évoluent d’épisode en épisode, permettant au réalisateur Matt Shakman de s’éclater comme jamais avec une mise en scène délicieusement nostalgique.
Pauvre Vision d’ensemble
Cependant, cette inventivité inspirée sur le papier peine à pleinement s’assumer et nous parait bien artificielle. D’originale, WandaVision revient finalement sagement dans les carcans d’une production parfaitement lissée par son studio sitôt les premiers épisodes digérés. A tel point que la série se termine en ayant certes évoqué le deuil de Wanda, mais sans que cela ne porte à conséquence sur le reste de la série, les personnages secondaires demeurant tragiquement anecdotiques. A l’instar des manipulations de Wanda, la forme du show devient presque méta et la réalisation de cette sitcom n’appose finalement qu’une poudre aux yeux sans grand intérêt aux spectateurs. Un envoutement en guise de carotte pour nous amener gentiment vers un nouveau produit Marvel déguisé.
Ainsi, les premiers épisodes détonnaient en s’adressant aux plus novices d’entre nous, mais très vite les easter-eggs et références à l’univers Marvel se font légion. Entre Randall Park qui réussit enfin un tour de carte, le retour épileptique de Kat Dennings ou l’introduction de Teyonah Parris en filleule de Captain Marvel, il ne manque plus que la présence paradoxale de Evan Peters en Quicksilver pour atteindre des sommets de fan-service réservés aux connaisseurs les plus aguerris. De même, le postulat initial s’efface à mesure que l’intrigue secondaire, à savoir l’enquête extérieure menée par le SWORD (des Agents of SHIELD discount) pour contrer l’omnipotence de Wanda et récupérer Vision nous enferme dans un nième scénario poussif du MCU avec de méchants bureaucrates et des bastons de CGI.
En résumé WandaVision tente de briller en proposant un discours inédit et une forme originale, malheureusement trop vite rattrapés par la mainmise d’un studio qui n’a de cesse de polir la moindre aspérité de chacun de ses produits, aussi sympathiques soient-ils.
2 commentaires
Au contraire, l’utilisation des sitcoms permet un commentaire sur l’émancipation de l’héroïne (des blockbusters avec les Vengeurs), dans un contexte médiatique américain très codifié et conservateur, avec des notions de Bien et de Mal trop nettes.
Le but c’est de mettre en avant l’Intime, sans avoir à choisir entre ces notions, ce que Marvel Studios fait régulièrement depuis la Phase III (et avant ça avec Loki dans le premier « Thor »): Des histoires où il y a beau avoir deux ou trois salauds avides qui traînent dans le coin… mais où la plupart du temps, chaques antagonistes sont souvent des individus qui ont juste des raisons et un mode de pensée personnels.
Pour tous, on peut juste dire que… Ils « sont ». Quelles qu’en soient les conséquences.
Une analyse intéressante en effet même si je trouve le propos un peu timide, l’intime est présenté d’une façon détournée qui ne sert que peu la vision d’ensemble encore trop gentille pour être pleinement pertinente.