Après moult péripéties qu’Ethan Hunt n’aurait pas rechigné à surmonter (crise de COVID, décalage de tournage, changement de casting etc…), ce nouveau Mission Impossible- Dead Reckoning ne démarrait pas sous de bons auspices, de quoi ne pas forcément rassurer les spectateurs après trois derniers opus qui ont positivement fait l’unanimité. Mais à l’image de son personnage, on peut dire que Tom Cruise, et son réalisateur Christopher McQuarrie, ont amplement accompli la mission !
A première vue, avec Mission Impossible – Dead Reckoning nous sommes en plein terrain connu : à l’apparition d’une nouvelle arme qui a le pouvoir de bousculer l’ordre mondial et dont plein de méchants veulent s’emparer, Ethan Hunt et sa fine équipe auront pour mission impossible de déjouer les plans de chacun et partir à la course au MacGuffin pour sauver le monde.
Mais c’est sans compter sur l’ingéniosité de McQuarrie, qui s’affirme comme un des meilleurs scénaristes de divertissement actuel, soutenu par Erik Jendresen, pour tordre les propres règles de la saga. Sans trop en dévoiler, l’éternel MacGuffin qui aura été la clef de voûte de tous les films, est ici muté en antagoniste propre. Un antagoniste omnipotent et omniscient qui permet d’élever les enjeux d’un cran car nos protagonistes se retrouvent face à une force qu’ils ne peuvent, physiquement ou technologiquement, dépasser ou ne serait-ce qu’égaler.
Par ailleurs, cette excellente idée d’un antagonisme d’un nouveau genre amène à une petite déception, celle de l’acteur Esai Morales dans le rôle de Gabriel. Celui-ci s’avèrant juste être un bras armé, manque quelque peu de charisme et de relief malgré la tentative de lui donner un passé commun avec Hunt et le fait qu’il effectue de véritables actions mettant à mal l’inébranlabilité morale de Hunt. Il aurait été peut-être plus fort de faire revenir un vilain des opus précédents, tel que Solomon Lane. On sent que la nature diptyque de ce Dead Reckoning laisse planer dans cette première partie quelques points flous qui seront développés dans la suite et notamment avec Gabriel.
Plus c’est long, plus c’est bon ?
Et justement, à l’image de Dune, de Spider-Man : Across the Spider-verse et de Fast X, le principal défaut viendra de la césure en deux parties de l’aventure. Bon nombre de points restent en suspens et ne pourront être jugés qu’à l’aube de sa suite. Par surcroît, cette décision impacte légèrement aussi le rythme du film où nous pouvons nous demander si certaines séquences, notamment dialoguées, n’auraient pas gagné à être plus raccourcies. Les 2H43 s’avérant plus sages que la frénésie de Fallout.
En effet, après un 6ème opus brutal, McQuarrie a la bonne idée de ne pas se reposer ses lauriers et choisit de proposer un récit plus minimaliste. Nous sommes plus dans un jeu de chat et de souris, de pure scène Hitchcockienne, renouant avec une certaine mécanique de l’épisode de De Palma, que dans un actionner complet et effréné à la Fallout. Nous avons moins de rebondissement à foison, donc moins d’effet de surprise, mais au profit de regards et de dialogues sous tension pour les personnages. A l’instar d’un contexte de cinéma de divertissement qui veut constamment recopier les recettes des succès, cela fait de bien de voir un film qui ne compte pas sur ses acquis.
De plus, le réalisateur démontre qu’il se creuse la tête pour renouveler son processus de mise en scène qui semble tirer ses inspirations du côté, à l’instar d’un John Wick 4, du cinéma slapstick. Sans pour autant tomber dans le piège de la bouffonnerie, il instaure subtilement du comique de situation, fonctionnant à la fois sur le registre de l’absurde et le pur suspens. De surcroît, le film a conscience de ses propres codes et se permet à quelques moments d’en rigoler par des saillies meta parcimonieuses.
En effet, les courses poursuites en voiture et les scènes d’action sur les trains ont déjà été vues et revues dans la saga. Mais McQuarrie a le souci de toujours avoir le petit élément qui va rajouter une spécificité à sa scène et donc de l’originalité (et de la tension par la même occasion). Ici Tom Cruise ne devra plus seulement conduire une voiture mais conduire menotté à une main ! Ici il ne devra pas seulement faire du corps à corps, mais se battre dans une ruelle très étroite où il est impossible de se mouvoir ! Ici il n’est plus (seulement) question de courir sur le toit d’un train en marche mais de s’échapper de wagon à wagon tandis qu’ils chutent lentement tels des dominos !
Passer après Fallout, une mission impossible
On passera rapidement sur la maîtrise évidente du filmage et du découpage impressionnant du réalisateur qui aura déjà tout prouvé lors de Rogue Nation et Fallout. Avec tout cela, on comprend aisément que McQuarrie soit le nouveau coup de foudre de Tom Cruise qui le met sur l’entièreté de ses projets (scénariste sur Edge of Tomorrow, la Momie, Top Gun : Maverick, son futur film dans l’espace).
En résumé, les principaux défauts de ce nouvel opus viennent du fait qu’il passe après Fallout qui était un divertissement parfait d’une intensité folle et qu’il est coupé en deux parties, rallongeant légèrement quelques scènes et laissant en suspens plusieurs arcs. Mais sa maîtrise, son envie de ne pas reproduire les précédents tout en restant dans les codes, l’ingéniosité de sa mise en scène et son soucis du spectacle bien fait l’affirme définitivement comme LE blockbuster de cet été.
Mission Impossible-Dead Reckoning est à voir en salle à partir du 12 juillet prochain.
avis
Même si on pourrait lui reprocher sa longueur et sa structure en deux parties, ce Mission Impossible a toujours le soucis d'offrir un spectacle de grande facture et de ne pas se reposer sur ses acquis.