Après plusieurs essais infructueux pour signer son premier passage derrière la caméra, Viggo Mortensen arrive enfin à accoucher de son bébé : un drame saisissant sur la relation entre un fils et son père au crépuscule de sa vie et atteint de démence.
Avec Falling, Viggo Mortensen devient de jour en jour un artiste de plus en plus complet. Acteur légendaire du cinéma de Cronenberg, en passant par le rôle iconique d’Aragorn dans le Seigneur des anneaux, il est aussi producteur, scénariste, compositeur, peintre, éditeur… Sans oublier qu’il parle couramment un nombre indécent de langues (dont le français). On ajoute maintenant le statut de réalisateur et on ne serait pas étonné s’il devenait un jour magicien ou premier homme sur Mars.
Dans Falling, il explore un sujet très personnel : la relation qu’on peut avoir avec nos parents. En écrivant ce film, il a pensé à sa mère, même si c’est bien une relation père-fils qui est le noyau du récit. Le père – interprété par Lance Heriksen qui livre une performance tout simplement hallucinante – n’est pas ce qu’on pourrait appeler quelqu’un de sympa. Que ce soit dans sa froideur et son machisme lorsque son fils est jeune, ou à la fin de sa vie quand tous les défauts deviennent exacerbé par la peur de la mort. C’est le père dont aucun enfant rêve. Néanmoins, c’est le père du personnage de Viggo Mortensen et en ce sens, il montre toute la complexité des sentiments – entre amour et haine – qu’on peut avoir pour une telle personne.
Lance Heriksen envouté
Il faut revenir sur la plus grande réussite du film : Lance Heriksen. L’acteur est habité par son personnage. Lorsque l’on découvre le récit, on a du mal à imaginer l’acteur différent du rôle qu’il interprète tellement il fait corps avec lui. Son regard, sa palette d’émotions sur son visage et son sens acéré du dialogue font de sa performance une œuvre d’art qui mérite sa place à côté des plus belles interprétations cinématographiques contemporaines. Le film, c’est lui. À tel point qu’il le phagocyte pour le meilleur… et pour le meilleur.
Une réalisation passionnée
Étant donné l’envie de nous plonger tout aussi bien dans le la vision de la vie du vieil homme, où sa réalité n’est cohérente que pour lui, que celles de ceux qui l’entourent, Mortensen choisit une approche esthétique au plus près des regards, privilégiant les gros plans et les coupes rapides pour saisir un instant, une émotion. Pour une première réalisation, il livre un film remarquablement bien construit malgré la difficulté du sujet et le style de narration à cheval entre les époques. Ce n’est pas parfait, parfois on sent quelques flottements dans le montage, mais c’est raconté avec une passion qui écrase tout sur son passage.
Falling ne révèle pas instantanément Viggo Mortensen comme un grand réalisateur – il va falloir attendre ses prochaines œuvres -, mais on se souviendra sans aucun doute de ce premier film pour la performance somptueuse de Lance Heriksen en père froid et vulgaire.