Christopher Miller et Phil Lord ont bien fait leur trou à Hollywood : de Tempête de Boulettes Géantes à 21 & 22 Jump Street, en passant par La Grande Aventure Lego et la production de Spider-Man New Generation ou Les Mitchell contre les Machines, le duo semblait bien occuper. Mais en attendant de nouveaux projets cinématographiques, les bougres reviennent avec The Afterparty. Une série délirante, reprenant le whodunit de manière originale et inspirée
Lord & Miller n’ont pas réalisé depuis quelques années (leurs quelques séquences restantes dans Solo – A Star Wars Story ne comptent pas !). Certes ils sont au scénario du Spider-Verse ou produisent pour Sony Animation, mais The Afterparty est un beau lot de consolation en attendant de plus amples aventures : cette saison 1 débarquant sur Apple TV+ est par ailleurs entièrement mise en scène par Christopher Miller.
À gobelets tirés
Le postulat est simple : la série nous fait suivre d’anciens élèves d’un lycée 15 ans plus tard au cours d’une seule et même soirée arrosée. Cette réunion festive se délocalise ensuite dans la villa de la popstar Xavier (Dave Franco). Un after de qualité donc, sauf que ce dernier est retrouvé mort au petit matin. La police débarque, et le but sera évidemment de trouver qui parmi les invités est le meurtrier ! Bref du whodunit comme on l’aime, mais avec une particularité bien trouvée.
Au cours des 8 épisodes que compose cette saison 1, The Afterparty nous invite à varier les points de vue (Rashomon-style) des divers personnages centraux de ce murder mystery. Si rapidement Aniq (excellent Sam Richardson), son pote Yasper (Ben Schwartz), son crush d’ado Zoe (Zoë Chao) ou bien Brett (l’ex-mari de cette dernière, joué par Ike Barinholtz) font office de personnages d’intérêt centraux, aucun membre du casting principal de suspects n’est en reste. Car à contrario du récent Le Dernier Duel, la série embrasse à bras le corps cette notion de point de vue narratif !
Réinvention à chaque épisode
Le whodunit (enquête complexe dans laquelle la résolution de l’énigme et ses facteurs déterminants sont l’enjeu de l’intrigue) n’a rien de novateur : outre Agatha Christie qui en a fait son gagne-pain, on a récemment eu des exemples au cinéma tel que le très bon (À Couteaux tirés) ou encore le fadasse (Mort sur le Nil). Mais The Afterparty apporte bien sa pierre à l’édifice par divers procédés. Outre son ton décalé (l’humour fuse avec une énergie communicative parfaitement véhiculée par tout le casting), c’est par ses velléités de mise en scène et de narration que la série nous cueille immédiatement : chaque épisode (plaçant le focus sur un suspect) épouse sa perspective et détourne un genre différent !
Ainsi, The Afterparty débute par un premier épisode très typé comédie romantique (l’occasion parfaite de placer en second fil rouge le béguin d’Aniq envers Zoë), avant de placer le curseur vers la comédie d’action centrée sur Brett (avec poursuite en voiture et autre mano-à-mano). Puis nouveau virage vers la comédie musicale, en adoptant le point de vue enjoué et kinétique de Yasper. Le reste des épisodes (et donc de l’intrigue) se doit d’être découvert sans se gâcher la surprise, mais on peut compter sur des utilisations pertinentes de l’animation, du détournement du thriller paranoïaque ou encore du teenage movie (ambiance so 2006 à coup de Shakira et Timbaland) .
Le style au service du fond
Seul un épisode « cop show » sous forme d’origin story de Danner (Tiffany Haddish reste excellente) semble un peu plus dans les clous que le reste, mais pas de quoi bouder le plaisir tout au long des 8 épisodes ! Chaque trope de chaque genre y est parfaitement implémenté, via une mise en scène inspirée de Christopher Miller donnant à The Afterparty un côté bien jouissif. Jamais dans la redite ou dans l’exercice de style vain, ce procédé sert avant tout les personnages. L’enquête en devient que plus passionnante via le jeu de perspective de chacun, tout en essayant de déceler la vérité. Un effet Rashomon très bien utilisé qui pour le coup arrive à rendre chacun des membres de cette soirée attachant (même ceux s’apparentant à des antagonistes en début de saison).
Outre un un avant-dernier épisode qui ralentit un tantinet le rythme parfait de cette saison, ou l’absence de traitement du personnage d’Indigo (petite occasion manquée), The Afterparty réussit tout ce qu’il entreprend avec brio. Alors que la comédie et le fun prévalent sur le reste, la série parvient à aborder les traumas du passé, la quête de reconnaissance ou bien le regret avec une certaine humilité. De plus,le versant romantique est une cerise sur la gâteau bien amenée qui nous redonnera forcément envie de réécouter « Angel » en boucle !
Un Afterparty sans gueule de bois
Au final, Lord et (surtout) Miller signent le meilleur whodunit de mémoire récente (avec le film de Rian Johnson). Décalé, drôle, jubilatoire et parfaitement rythmé, on lui pardonnera une ou deux facilités devant la grande cohérence de cette entreprise. En résulte une très bonne 1e saison (avant changement de cast et d’affaire pour la saison 2) jouant ingénieusement avec le genre, tout en gardant une vraie cohérence de ton : un Afterparty comme on les aime, c’est-à-dire sans gueule de bois !
La Saison 1 de The Afterparty est entièrement disponible sur Apple TV+
avis
Avec The Afterparty, Lord & Miller prouvent encore qu'ils sont parmi les meilleurs scénaristes-producteurs du moment. En résulte une première saison ultra fun et jubilatoire comme il faut, au casting attachant et au mariage des genres savoureux. On en redemande !