Adam à travers le temps le tout nouveau film de Shawn Levy (Stranger Things, Free Guy), et pour se faire il fait de nouveau équipe avec Ryan Reynolds. Au menu : une aventure de SF lorgnant vers le cinéma Amblin popularisé par les réalisations de Steven Spielberg ou encore Robert Zemeckis. Une production Netflix avec un charme initial certain, mais qui s’étiole passée ses prémices…
Adam à travers le temps est un projet présent dans les cartons de la Paramount depuis une dizaine d’années. L’idée centrale est par ailleurs plutôt chouette : le jeune Adam Reed est un ado asthmatique de 12 ans vivant seul avec sa mère Ellie depuis le récent décès du patriarche. Régulièrement tabassé par les brutasses du lycée, son destin va être chamboulé par l’arrivée d’un mystérieux étranger dans son jardin. Ce voyageur tout droit surgi du futur et ayant pour but de sauver le monde n’est autre que lui-même, près de 30 ans plus tard !
Shawn Levy & Ryan Reynolds Épisode II
Le « Adam Project » est donc ressorti du placard en 2020, et c’est Shawn Levy qui s’y colle. Connu notamment pour sa trilogie La Nuit au Musée ou encore ses fonctions de réal/producteur sur Stranger Things (autre relecture et déclaration d’amour aux films Amblin), le bougre n’est pas forcément un chef d’orchestre saugrenu pour un tel film. On lui doit notamment (son meilleur film) Real Steel, une aventure futuristico-familiale bien emballée, ou encore le très récent (et très sympathique) Free Guy avec Ryan Reynolds. Et cela tombe bien car Levy décide d’enclencher le deuxième-tour de piste avec ce dernier (avant Deadpool 3 !) pour Adam à travers le temps !

Le film commence de manière intrigante et nous caresse bien dans le sens du poil. Si l’interprétation de Walker Scobell (le jeune Adam Reed) n’est pas toujours pleine de justesse, ce petit héros est d’emblée attachant. Notamment de par sa condition d’ado martyrisé, attaché à sa ventoline et livré à lui-même malgré la « présence » de sa mère distante. Son duo avec Ryan Reynolds (campant un Adam plus badass mais à la langue toujours aussi pendue) est la principale force motrice du métrage ! Scobell a beau ne pas maîtriser de la même manière le tempo comique et l’aura sarcastique d’un Reynolds (qui en fait désormais sa marque de fabrique), le tout fonctionne plutôt bien et représente le principal intérêt du film. C’est ensuite que les choses se gâtent !
Retour vers le futile
Passées ses douces prémices, le constat est là : Adam à travers le temps bénéficie d’un manque de finition à tous les niveaux ! Blockbuster co-produit par Skydance (Mission Impossible, Star Trek), le tout a des allures de gros TVfilm de luxe, nous abrutissant régulièrement entre FX faiblards (on tient le pire de-aging depuis Match Retour), direction artistique impersonnelle (même combat de production design générique avec Moonfall avec gros gun/vaisseau/bâton lumineux issu de série B fauchée), antagonisme aussi transparent que du Carglass (Catherine Keener venu chercher le doux chèque) ou virages narratifs clichetons et désincarnés (on ne compte pas les séquences où les persos semblent avoir lu le script, comme cette scène de bar programmatique). Au final l’enjeu principal de cette aventure se voulant touchante et trépidante est constamment désamorcé, à grands renforts de blagues mal calibrées.

Si l’intrigue est rapidement délaissée, en terme de divertissement d’action-aventure pur, Adam à travers le temps déçoit un tantinet également. Outre sa fabrication consensuelle (sans être dans la honte) et sa patte visuelle numérique, Shawn Levy arrive à travers la lessive ambiante à proposer 2-3 plans dynamiques et implantés au bon moment. Que ce soit lors d’une course-poursuite à travers les bois, une fight musclée ou une séquence de vaisseau allant toute berzingue dans un canyon, Adam à travers le temps semble se réveiller (toute proportion gardée) de manière plus organique et efficace via un montage plus que correct. Un goût de trop peu prédomine néanmoins malgré le caractère rythmé et le capital sympathie du duo principal !
Touchant à travers le pré-mâché
Malgré ce goût de plastique prépondérant, Adam à travers le temps laisse trainer un doux parfum lorsqu’il laisse exister ses acteurs, en particulier Ryan Reynolds, Mark Ruffalo ou Jennifer Garner. N’ayant malheureusement pas grand chose à défendre vue la dramaturgie survolée, les thématiques du deuil, du repli sur soi et de l’absence parentale restent un terreau suffisamment évocateur pour que le casting puisse laisser l’émotion faire irruption. De trop rares moments mais où le cœur du métrage jusqu’ici enfoui semble faire surface, et ce sans artifice. Une maigre consolation donc !

Au final, passé un climax rédhibitoire et pauvre en générosité, on se dit qu’Adam à travers le temps est avant tout une grosse occasion manquée ! Nul doute qu’entre les mains d’un grand cinéaste (et d’un vrai scénariste), la sauce aurait mieux pris. C’est dommage tant le potentiel était là (à l’image d’une Zoe Saldaña instantanément charismatique mais dont le personnage et son potentiel émotionnel se veulent rapidement expédiés), mais Shawn Levy n’exploite jamais réellement le concept du voyage dans le temps.
Le futur de 2050 nous sera à peine évoqué, tandis que le saut dans le « passé » en 2018 ne proposera rien d’autre que l’introduction d’un nouveau personnage dans la course (où est le ludisme ?). Si la complémentarité du duo principal a aussi son lot de moments pertinents, le développement du jeune Adam se révèle également bien avare (quid de son asthme ?). Bref, la petite débandade, sachant qu’un film comme Looper jouait admirablement de l’utilisation du même personnage à deux âges différents !
Adam nous fait perdre notre temps
Si les heurts d’Adam à travers le temps ne vous font pas peur, et que vous souhaitez expérimenter une fausse Madeleine de Proust rythmée, dotée d’un bon casting et de quelques sursauts d’entrain ou d’émotion, le visionnage ne sera pas trop déplaisant. Malheureusement, et à l’image d’un Red Notice (en un peu plus laborieux), le tout ressemble trop souvent à un produit Netflix dopé à l’algorithme. On en retiendra quand même un Ryan Reynolds toujours bien sympathique, quelques petits moments de tendresse et d’humour qui fonctionnent. Dans tous les cas, on préférera se rematter un bon Super 8, ou mieux, le cinéma des 80’s qu’il tente d’émuler.
Adam à travers le temps est disponible sur Netflix depuis le 11 mars 2022
avis
Adam à travers le temps est le nouveau film de Shawn Levy (La Nuit au Musée, Real Steel, Free Guy). Une aventure de SF voulue comme un héritage des films Amblin, mais malheureusement plombé par une fabrication et une narration des plus impersonnelles. Malgré le capital sympathie du casting, un beau postulat de base et son caractère rythmé, le métrage ressemble bien plus à un TVfilm de luxe pour Netflix qu'un vrai blockbuster incarné. On retiendra néanmoins quelques touchants moments qui subsistent, et un visionnage pas forcément des plus déplaisants. Aussitôt vu aussitôt oublié !