Initialement prévu l’an dernier, Free Guy trouve enfin le chemin des salles obscures. Réalisé par Shawn Levy (Stranger Things, Real Steel), le film nous invite à suivre un PNJ (personnage non joueur) incarné par Ryan Reynolds (Deadpool). Ne sachant pas qu’il vit dans un jeu vidéo, ce dernier va s’échapper de sa prison vidéoludique, dans une aventure émancipatoire pour sauver son monde. Le résultat est à la fois drôle, et plein de charme !
Ryan Reynolds aura décidément eu une carrière assez atypique. D’abord abonné aux nanars ou comédies de seconde zone, il aura fallu attendre Green Lant…Deadpool et son succès monstrueux en 2016 pour que ce dernier trouve un rôle taillé sur-mesure. Si bien que désormais la personnalité de rigolo-débile au grand cœur du canadien est désormais indissociable du personnage, et autant dire que Free Guy est à 100% dans cette optique. A l’instar de Jim Carrey dans The Truman Show, c’est à un véritable festival en l’honneur de son interprète auquel nous assistons, et ce sans jamais perdre de vue ce qu’il a à raconter.
D’entrée de jeu, le spectateur est introduit à la ville-monde de Free City, une aire de jeu en ligne à la croisée entre GTA Online et Fortnite. Ici les avatars des joueurs commettent des braquages, font tout exploser et mitraillent à tout va en quête de thunes, d’XP et de notoriété…comme dans le paysage vidéoludique multijoueur actuel finalement ! Dans ce joyeux défouloir pop, Guy se réveille tous les matins, enfile sa même chemisette bleue, ingurgite le même café et voit les mêmes cambriolages chaque jour dans la banque qui l’emploie. Jusqu’au jour où notre héros rencontre Molotov Girl, et découvre les dessous de cette matrice factice !
Il y a un peu de La Grande Aventure LEGO et Ready Player One dans Free Guy (sans toutefois égaler ces deux références). Le premier pour ce « nobody », ce personnage du décor insignifiant qui refuse sa prison dorée et son train-train quotidien. Le second pour sa volonté de transcrire l’identité vidéoludique au cinéma, ainsi que ses divers clins d’œil. Plus ou moins appuyés (les streamers Ninja, Pikamone ; quelques allusions à des propriétés Disney…), ces derniers restent heureusement relativement discrets. Mieux : si Free Guy ne digère pas totalement toutes ces influences, il a le mérite de correctement jouer avec les codes du genre et faire des parallèles implicites assez lourds de sens concernant l’industrie du jeu vidéo.
En effet, en filigrane nous suivons l’envers du décor, à savoir l’entreprise Soonami prête à lancer Free City 2 lors d’une mise-à-jour très attendue. Tenue par Antwan (un Taika Waititi magnifiquement en roue libre et délicieusement détestable en PDG opportuniste), cette compagnie représente le côté obscur de tout éditeur de jeu vidéo : sacrifiant toute velléité artistique et créative, en se basant sur les tendances marketing pour concevoir des patchs ou des suites (on pourrait même extrapoler cette critique au secteur cinématographique !). En mettant en avant la propension des studios à miser sur la violence formatée et les univers pseudo-réalistes, Free Guy capte bien le pouls de ce que représentent la majorité des jeux vidéos aujourd’hui, à défaut d’aller plus loin peut-être.
Great Guy Auto
Un des gros points forts de Free Guy est sa gestion de l’humour, en particulier dans la première partie du film. Ludique et fun, on se plait à découvrir le quotidien du protagoniste dans cet univers, avant de le voir tenter de s’en défaire. On regrettera cependant une dernière partie plus classique et aux enjeux plus attendus. Un constat assez dommageable d’autant que les possibilités offertes par l’univers et le concept du film auraient permis de vraies folies (Les Mondes de Ralph arrivaient par exemple à renouveler ses décors et sa production design). Un défaut qui est heureusement contrebalancer par le rythme, la bonne gestion des enjeux et l’alchimie des divers personnages.
Une réussite que l’on doit tout d’abord à Ryan Reynolds lui-même, parfait en grand ahuri dingo au grand cœur. De par son énergie communicative, son caractère jovial et sa candeur juvénile, Guy est à la fois un héros totalement dénué de cynisme (chose suffisamment rare à l’heure actuelle mine de rien), et un tendre personnage prouvant qu’on peut gagner en étant le « Good Guy » dans un univers de brutes. Un rôle qui va comme un gant à l’acteur, apportant également une sensibilité bienvenue au long-métrage.
Car au-delà d’être un film fun, Free Guy est au centre du récit une jolie histoire d’amour à la finalité plutôt touchante. Un aspect de comédie romantique mis en avant par le personnage de Millie/Molotov Girl, incarné par l’excellente Jodie Comer (ayant déjà abreuvée le petit écran d’une des meilleures performances d’actrice récentes dans Killing Eve). Forte, drôle, déterminée mais aussi sensible, il s’agit du parfait contrepoids pour Ryan Reynolds, et l’alchimie du duo transpire chaque minute à l’écran.
Le reste du casting est également de bonne facture. Outre Lil Rel Howery en meilleur ami comic relief (là encore apportant une belle dose d’humanité), on notera Joe Keery dans un rôle de programmeur (et vrai « MVP » du métrage) à contre-emploi de celui qu’il tient dans Stranger Things.
Feel-good movie de l’été
Sous ses airs de blockbuster racoleur auprès de la génération Twitch, Free Guy est un film séduisant à plus d’un titre. S’il aurait pu (dû ?) aller plus loin dans l’exploitation de son univers et sa représentation du jeu vidéo, on tient là une aventure attendrissante, souvent (très) drôle et pleine de charme.
Porté par un casting au top de sa forme et une réalisation carrée, on lui pardonne volontiers une dernière partie plus classique de par son message émancipatoire plein de cœur. Car au fond c’est de cela que parle Free Guy : peut importe qui nous sommes, il ne convient qu’à nous de choisir quelle vie nous désirons. Et sûr qu’à la fin du film, on a tous envie d’égayer la notre en chantonnant « Fantasy » de Mariah Carey !