Les Trois Mousquetaires – D’Artagnan est un nouveau rendez-vous manqué pour la superproduction Pathé et son prestigieux casting. On revient donc point par point sur tout ce qui ne fonctionne pas.
Avec Les Trois Mousquetaires – D’Artagnan et Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu, Pathé enchaîne donc les productions prestigieuses et surtout les déceptions. Cependant, la désillusion relative à ces deux projets n’a pas la même gravité : parce que si l’échec critique et artistique du film de Guillaume Canet ne reposait, malgré son énorme budget « que » sur un seul film, cette nouvelle adaptation d’Alexandre Dumas en proposera deux, en plus du Comte de Monte-Christo avec Pierre Niney, pour le moment encore dénué de metteur en scène et de date de sortie. Le trio Alexandre De La Pattelière, Mathieu Delaporte et Martin Bourboulon, pourtant déjà à l’œuvre sur le réussi Eiffel, s’avère ainsi être dans l’incapacité de s’emparer de l’œuvre d’Alexandre Dumas et d’en tirer un spectacle à la hauteur des attentes.
Après notre critique, on décide donc d’aller plus loin en vous détaillant tout ce qui ne fonctionne pas (du tout) dans cette nouvelle adaptation, et des raisons (pour nous) qui en font une sacrée déconvenue et surtout un nouveau rendez-vous manqué entre notre cher cinéma hexagonal et le cinéma populaire à grand spectacle, à une heure où nos chères salles proposent pourtant une programmation sacrément diversifiée, forte de belles réussites. On revient donc, point par point, sur tout ce qui fait de ce Trois Mousquetaires – D’Artagnan une belle déception, en vous encourageant évidemment à aller vous faire votre propre avis en salles avant de lire cet article tout plein de SPOILERS.
Une adaptation maladroite
Les Trois Mousquetaires – D’Artagnan, tout comme sa suite, se voient donc confiés à Alexandre De La Pattelière et Mathieu Delaporte. On doit ainsi au duo de scénaristes un nombre assez conséquent de collaborations, allant du meilleur (Le Prénom, Un illustre inconnu, Papa ou Maman) au pire (La Jungle, RTT, Il était une fois, une fois). Comme pour Guillaume Canet sur Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu, rien ne semblait préparer le duo d’auteurs à se frotter au mastodonte Alexandre Dumas, malgré leur travail sur une adaptation télévisée du Petit Prince d’un certain Antoine de Saint-Exupéry et celui, plutôt réussi sur Eiffel, où ils se voyaient cependant et notamment accompagnés du très doué Thomas Bidegain (Un Prophète, Saint-Laurent, Les Frères Sisters). Et l’on ressent ainsi dans Les Trois Mousquetaires – D’Artagnan une certaine détresse de leur part, au détour de choix scénaristiques allant de l’expédié à la va-vite à la totale incompréhension.
Parce que si l’on connaît évidemment les nombreuses adaptations de l’œuvre d’Alexandre Dumas, ainsi que leur schéma scénaristique plutôt appliqué (on ne reviendra pas sur l’affreuse adaptation de Paul W.S Anderson, qui mériterait à elle-seule tout un article), de la première rencontre et confrontation entre D’Artagnan et les Trois Mousquetaires, jusqu’aux manigances du Cardinal de Richelieu avec Milady amenant jusqu’à Londres pour tenter de s’emparer des ferrets de la Reine avant le bal final, Alexandre de la Patellière et Mathieu Delaporte s’avèrent à la fois dans l’incapacité de le dépoussiérer et de clairement s’en emparer. Malgré quelques belles idées, comme de renforcer la figure tragique et romantique d’Athos (Vincent Cassel) en le condamnant à mort, où de créer une liaison condamnée entre le Duc de Buckingham et La Reine (bouleversante Vicky Krieps), tous ces choix s’avèrent finalement rapidement tués dans l’œuf.
Ainsi, même en conservant l’épique Siège de La Rochelle et La Fin de Milady pour le deuxième acte, cette première partie n’évite jamais l’impression de trop-plein, d’un scénario qui semble aligner les rebondissements pour tenter de dissimuler une certaine détresse. Parce qu’Athos reviendra finalement accompagner D’Artagnan en Angleterre, alors que sa libération introduira maladroitement un frère conspirationniste dans un acte final raté, en laissant inexplicablement de côté Aramis et Porthos, présents lors des honneurs rendus par un Roi (Louis Garrel, impeccable) qui les ignore, à l’image du duo de scénaristes. Alexandre de la Pattelière et Mathieu Delaporte, dans leur empressement, ne savent ainsi jamais approfondir leurs personnages, où tenter de saisir quelques moments de souffle et de fougue tant leur travail d’adaptation s’avère maladroit.
Une mise en scène figée
Martin Bourboulon, dont le talent observé sur Papa ou Maman ou le plus ambitieux Eiffel, se trouve alors à devoir colmater les brèches d’un duo de scénaristes clairement dépassé. Dès la première scène d’affrontement en forêt, scène primordiale dans laquelle le metteur en scène peut offrir sa propre marque de fabrique et marquant la rencontre entre les futurs quatre mousquetaires, le constat est ainsi sans appel : la mise en scène rejoint ainsi l’incapacité du scénario à saisir la fougue et l’épique du roman d’Alexandre Dumas. Dotée d’une action illisible et d’un perpétuel sentiment d’empressement, Martin Bourboulon reproduit ainsi toutes les maladresses d’un scénario qu’il se trouve alors dans l’incapacité de rehausser en images.
Les décors, pourtant majestueux, s’enchaînent, tout comme les prestations d’un casting impérial, sans que le metteur en scène ne puisse y insuffler la moindre personnalité. Martin Bourboulon semble ainsi en pilote automatique, alignant mollement les vignettes historiques pour tenter de garder un attrait suffisamment prégnant dans des scènes finales annonçant une suite beaucoup plus épique. Et c’est bien là le problème : l’on a l’impression qu’après avoir difficilement raconté un premier acte dénué de surenchère autant dans l’action que dans le romanesque, le metteur en scène semble payer le sort de ses scénaristes, et ainsi péniblement se raccorder à ses dernières scènes pour nous vendre l’intérêt d’une suite que l’on ne peut juste qu’espérer plus réussie.
Un casting (heureusement) parfait
Certains de plaindront (à juste titre) de voir toujours les mêmes noms d’acteurs et d’actrices en haut de l’affiche, et ce à intervalle trop régulier. On pense évidemment à Vincent Cassel, déjà à l’affiche d’Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu, mais l’on peut également évoquer Pio Marmaï à l’affiche de 5 films l’année dernière, tout comme Louis Garrel d’ailleurs. Mais tout cela serait inadéquat, puisqu’un tel projet se doit de compter sur des valeurs sûres et autres visages reconnus et indentifiables du public afin de faire venir sur des seuls noms un maximum de spectateurs. De plus, chaque acteur.trice voit au fil de sa carrière des moments aléatoires de sur-présence, comme de manque de sollicitations. Pourtant, il faut avouer que dans Les Trois Mousquetaires – D’Artagnan, tout le choix du casting résulte de la parfois logique, mais néanmoins bonne idée.
On pense assez évidemment à Eva Green et son indécrottable personnage de femme fatale que l’actrice n’a eu de cesse de revisiter chez les plus grands (Tim Burton, Gregg Araki) mais qui s’avère une fois de plus parfaite en Milady de Winter. Tout comme le choix des Mousquetaires, du D’Artagnan fougueux et impétueux de François Civil, à ceux qui n’ont malheureusement le droit qu’à une poignée de minutes de présence à l’écran (Romain Duris et Pio Marmaï, pourtant impeccables). Même les seconds rôles (on est très heureux de revoir Marc Barbé en haut de l’affiche après l’excellente Paris Police 1905), demeurent ainsi la seule véritable incarnation de cette adaptation cruellement morne.
Ainsi, quand le rythme effréné du film se suspend quelques instants, on peut ainsi trouver dans l’incarnation des acteurs ce qu’aurait pu et dû être cet ambitieux projet : de l’allure désespérée et brisée d’une Reine contrainte par ses obligations (on le redit, Vicky Krieps est bouleversante), à celle, pareille, d’un héros romantique brisé, dans l’incarnation d’Athos de Vincent Cassel. Même les échanges complices entre Constance (Lyna Khoudri) et D’Artagnan (François Civil), offrent un peu d’âme à ce projet tristement désincarné. Heureusement donc qu’ils.elles sont tous là, au top de leur forme, pour offrir un tant soi peu de vie à un film qui en manque ainsi cruellement.