Plus de 10 ans après le 4e opus de la franchise, Scream revient avec un épisode toujours aussi méta et pastichant le genre du slasher. Un retour du trio d’origine (Neve Campbell, Courteney Cox et David Arquette) face à Ghostface, avec toute une ribambelle de nouveaux personnages. Une séquelle qui comprend et réutilise les codes de la série…et c’est tout ?
En 1996, Scream avait fait l’effet d’une bombe à sa sortie, en battant tous les records du genre au box-office. Un succès directement devenu culte, notamment en lien avec sa séquence d’intro ultra connue où Drew Barrymore se faisait éviscérer en bonne et due forme. La suite avait bénéficié du même succès, et rapidement les séquelles parvenaient chacune à aborder de manière méta les diverses itérations de slasher franchisées, sans pour autant renouer avec l’original.
Il aura fallu attendre le 4e opus (avec pour le coup un côté post-moderne plutôt bien amené) pour espérer un jeu avec les codes de Scream : à savoir un nouvel individu arborant le masque de Ghostface pour commettre des meurtres dans la petite bourgade de Woodsboro, en lien avec les évènements des films précédents ou bien l’entourage de Sidney Prescott (la grande rescapée) ! Cette fois, Wes Craven repose en paix, et ce 5e opus est confié à Matt Betinelli-Olpin et Tyler Gilett, derrière le sympathique revenge-movie Wedding Nightmare (ou Ready or Not en VO). Des fans inconditionnels, qui ré-utilisent absolument tous les ingrédients attendus !
Ce Scream (qui comme Halloween abandonne les numéros) débute comme chaque opus : une donzelle seule (Jenna Ortega) est harcelée au téléphone par un mystérieux agresseur ! La scène est carrée, et lorsque Ghostface débarque pour répandre de la gelée de groseille sur les murs, on se rend compte que la violence et le gore sont là, pour notre plus grand plaisir. Et qui dit retour du fameux tueur, dit retour des anciens (Sidney est désormais mère de famille, Gale une vedette de la TV et Dewey un retraité-divorcé marginal se bourrant la gueule dans son mobile-home) et introduction aux nouveaux (les amis et la sœur de la victime).
L’occasion de voir que ce 5e opus prend en compte les mœurs et les codes de l’époque de sa sortie (dans la pure tradition de la série) avec l’importance de la technologie (mieux traitée dans le 4) et surtout une mise en abyme méta allant plus loin dans l’autodérision. De manière intra-diégétique, les protagonistes discutent des codes d’horreur obsolètes (en mettant en comparaison de nouvelles références comme Mister Babadook, It Follows, Get Out ou The Witch), de la notion de suite-reboot (à la Halloween) et surtout de la toxic fandom qui s’approprient les franchises (coucou Star Wars 8, cité implicitement) ! Une approche bienvenue et auto-consciente, qui vire cependant au cynisme !
Requel Ghostfacepalmed
En effet, alors que le film se plait (et à raison) de pointer du doigt les extensions de franchises et la notion de « requel » (reboot-sequel), on a l’impression que ce Scream tourne un peu à vide dans la capacité à se renouveler. Ghostface qui débarque et malmène ses victimes, morts gores (et plutôt funs), humour méta (dans la droite lignée du 4e là encore) et détournements des codes (notamment une bonne séquence où les réalisateurs s’amusent de savoir si le tueur est derrière la porte du frigo)… tout ceci est présent, d’autant que la majorité des personnages semblent bien conscients des tropes du genre, et se positionnent comme plus intelligents qu’auparavant.
Et à mesure que le métrage se poursuit, pas de doute : ce 5e opus reste dans les clous, ni plus ni moins. Il est cependant dommage de ne pas avoir évité certains écueils et facilités, entre personnages ayant des réactions parfois aberrantes à se faire avoir comme des bleus, liens de parenté amenés au forcing (promis on est heureusement pas dans le cas d’un Scream 3), lieux déserts (on se retrouve comme Glass avec un hôpital avec seulement un gardien)…Quitte à jongler efficacement avec le whodunnit, autant regarder Knives Out (également cité) qui pour le coup rabattait avec intelligence les spécificités structurelles du genre.
Mais malgré ce constat et une conclusion faussement surprenante lorsqu’on se pose deux secondes pour réfléchir, ce Scream arrive à divertir et surtout à bien brouiller les pistes sur l’identité du tueur. Si bien qu’on s’amuse (et le film aussi) à placer notre focus et nos hypothèses de persos en persos. Et pour le coup, le casting est réussi. Outre Neve Campbell (qui n’a pas pris une ride) débarquant cependant à mi-chemin, Courteney Cox qui n’a jamais quitté le rôle (mais est assez peu présente), et un David Arquette surprenant de justesse (offrant par ailleurs le moment le plus touchant du film), les petits nouveaux se débrouillent comme il faut, sans forcément proposer des protagonistes aussi incarnés.
Melissa Barrera (In the Heights) est convaincante en nouvelle tête d’affiche (sans être aussi bien utilisée que Campbell en son temps), bien que ses hallucinations puisent dans un caractère trop pré-fabriqué pour raccorder certains wagons vieux de 25 ans. Jenna Ortega (You), Dylan Minette (13 Reasons Why) et Mason Gooding (Star Trek Picard) se débrouillent comme il faut, tandis que Mikey Madison (Once Upon a Time…in Hollywood), Jasmin Savoy-Brown (Spider-Man Miles Morales) et Jack Quaid (The Boys) se démarquent un peu plus. Évidemment, le body count est là, et sans spoiler, personne n’est à l’abri (une note bienvenue pour décupler l’enjeu).
Same Old Scream
Au final, on tient un 5e Scream plutôt bien rythmé, qui se suit sans déplaisir malgré des codes pas toujours remis à neuf. Le script de James Vanderbilt (The Amazing Spider-Man) semble pour le coup écrit par Kevin Williamson (scénariste phare de la série). La mise en scène reste dans les pas de la saga (qui n’est pas non plus un pur slasher, mais un détournement du genre) malgré un côté cosmétique actualisé, et des scènes de tuerie plus graphiques qu’auparavant. Bien entendu, rien d’aussi violent et remarquable que la fabuleuse scène d’intro du premier film.
On tient donc un honnête opus de la franchise, que tout fan appréciera, et que tout spectateur regardera non sans intérêt. Un épisode qui digère et comprend tous les codes de la saga, mais qui pour le coup n’apporte rien de profondément inédit malgré un plaisir immédiat. Une pioche sympatoche, mais qui pose littéralement la question de comment réinventer et redynamiser le slasher, sans toutefois parvenir à y répondre.