Noël approche et à l’heure de décider de ce qu’il y aura sous le sapin, on vous offre un petit éclairage sur le Mediabook Stay Hungry, premier film d’un certain Arnold Schwarzenegger.
1976, le culturisme commence à se développer dans les salles de Californie et le Nouvel Hollywood s’apprête à laisser la place aux blockbusters emmenés par des jeunes talents comme Steven Spielberg et George Lucas. C’est dans ce contexte particulier que Bob Rafelson, producteur et réalisateur de légende, signe Stay Hungry, offrant au passage son premier vrai rôle au cinéma à une future icône du box-office, Arnold Schwarzenegger.
On voit déjà les puristes nous sortir que non, Schwarzy avait d’abord été ridicule dans le tristement célèbre Hercule à New York (1970). Sauf que dans ce dernier, le chêne autrichien à l’accent à râper le fromage avait dû être intégralement redoublé. Ce qui fait que c’est bien dans Stay Hungry qu’on l’entendra s’exprimer réellement pour la première fois. D’autant que le bonhomme est loin d’y faire de la figuration. Mais nous allons y revenir.
Stay Hungry, la faim d’un certain cinéma ?
Fils de bonne famille se retrouvant unique héritier à la mort de ses parents, Craig Blake (Jeff Bridges) ne sait pas quoi faire de sa vie et s’engage dans l’immobilier avec un groupe peu recommandable. Sa mission est simple, il doit convaincre le propriétaire d’un club de gym de vendre afin de pouvoir y construire un immense complexe. Adhérant au club, il va se lier d’amitié avec Joe Santo (Schwarzenegger), un culturiste s’entraînant pour le concours de Mr Univers, et commencer une relation avec la réceptionniste, Marie Tate (Sally Field).
Stay Hungry conclut la trilogie thématique de Rafelson initié par Cinq pièces faciles en 1970 où des individus aisés remettent en question leur mode de vie. Mais ce troisième film est loin de faire l’unanimité, que ce soit dans la presse ou au box-office. Avec les années, le métrage a gagné ses galons d’immanquable parce qu’il raconte une époque. Une époque honteuse comme lorsque Field raconta dans un livre les abus du réalisateur. Une époque où le visage d’Hollywood s’apprêtait à changer avec un Jeff Bridges talentueux s’effaçant dès lors que la musculature de Schwarzenegger rentrait dans le plan. Un film qui se transforme sous nos yeux jusqu’à s’achever sur une séquence iconique où une armée de culturistes en slip envahissent les rues de Los Angeles. Stay Hungry est une empreinte dans le temps qui en dit beaucoup devant et derrière la caméra. Une page d’histoire à (re)voir qui vient de revêtir son plus beau costume.
Un Mediabook qui met en appétit
BubbelPop Edition, la nouvelle venue dans le milieu, a décidé de frapper fort avec un Mediabook tout en muscles qui tiendrait une belle place dans n’importe quelle vidéothèque. Pour commencer par l’aspect technique pur, le travail de rénovation numérique sur le film, que ce soit en format Blu-ray ou DVD -les deux étant disponibles dans le coffret- est fidèle à l’imagerie d’origine que ce soit au niveau de la définition, du grain ou de la colorimétrie. Néanmoins, on ne retrouvera que très peu les défauts de l’époque, preuve que tout cela tient d’une vraie volonté de ne pas entacher l’expérience d’origine. Un même constat sur le son avec, néanmoins, des dialogues qui se détachent du reste pour ne pas gâcher la compréhension. Il faut noter que le métrage est proposé uniquement en VOST.
Cinq bonus complètement inédits et conçus pour le Mediabook viennent renforcer ce dernier. Comme son nom l’indique, cette édition comporte un livret de 100 pages de Christophe Chavdia intitulé « vivre dangereusement » qui analyse le film, son auteur et ses interprètes. Joanna Cassidy, second rôle de Stay Hungry que les fans connaissent bien pour ses rôles de Zhora dans Blade Runner ou de Dolores dans Qui veut la peau de Roger Rabbit ?, nous raconte les coulisses à travers deux interviews. La première, de douze minutes, s’intéresse surtout au tournage, évoquant d’ailleurs #MeToo avec le livre de Sally Field, mais également la bonne ambiance qui régnait alors qu’elle débutait et occupait un appartement appartenant à Schwarzenegger – le culturiste avait fait fortune en investissant dans l’immobilier en parallèle de ses débuts d’acteur -. Le second, de 6 minutes, évoque le sujet de la femme alpha sur la place de cette dernière au cinéma. Un cinéma qui a besoin d’être porté par des personnages forts, des héroïnes, et de l’absence de ces dernières pendant longtemps.
Enfin, les deux dernières vidéos peuvent être traités conjointement puisqu’ Arnold devient Schwarzy par Samuel Blumenfeld (16 minutes) est une évocation davantage du contexte de la fabrication de Stay Hungry plus que d’un vrai traitement sur l’acteur autrichien, dont on loue malgré tout l’implication et le professionnalisme d’un travailleur acharné. En miroir, La fin du Nouvel Hollywood, par Jean-Baptiste Thoret (42 minutes) est une mine d’or d’informations autour de cette adaptation du roman de Charles Gaines, du comment et du pourquoi au regard de la filmographie de Rafelson et de son anticipation de ce qui allait advenir du cinéma hollywoodien.
Et si, à l’issue du visionnage du film et de ses bonus, on reste un peu sur notre faim, c’est uniquement parce que Stay Hungry nous aura rendu comme son culturiste, insatiable.