Tokyo Vice est une production HBO Max, qui arrive chez nous via Canal+. Contant l’histoire vraie (mais évidemment romancée) d’un jeune journaliste ayant mis en lumière le crime organisé au Japon, la série démarre avec un argument de poids. En effet, l’illustre Michael Mann revient à la réalisation pour se charger du pilote. Alors que vaut cette introduction ?
Qu’est-ce que Tokyo Vice ? Pour comprendre les origines de cette nouvelle série HBO Max (diffusée sur Canal+ chez nous), il faut néanmoins remonter au années 1990, alors que le jeune américain Jake Adelstein s’expatrie afin d’étudier au Japon. 3 ans plus tard, le voilà à 24 ans embauché au Yomiuri Shinbun, le plus grand journal du monde avec pas moins de 15 millions d’exemplaires vendus quotidiennement. Fait encore plus étonnant : c’est le premier journaliste étranger à intégrer le célèbre quotidien !
Des débuts modestes naissent la grandeur
Affilié à des cas mineurs, Jake va rapidement se convertir en reporter d’investigation criminelle, et couvrir toute sortes de meurtres puis d’affaires en lien avec le crime organisé. Au final, il sera un des acteurs majeurs à consacrer l’essentiel de ses efforts pour couvrir le trafic d’êtres humains et les sombres affaires du monde des yakuzas ! Auteur du livre Tokyo Vice : An American Reporter on the Police Beat in Japan où ce dernier relate sa propre enquête, ainsi que les dissuasions dont il a été victime pour empêcher la publication, Jake Adelstein voit donc son récit adapté sur le petit écran !
Alors que Tokyo Vice devait initialement être adapté en film, c’est bien sous le format série qu’elle nous parvient. Outre une plongée dans un Japon précédant la mondialisation via les réseaux sociaux, et où l’information se faisait encore majoritairement via la presse papier, une des belles attentes autour du projet était cristallisée par quelques noms à la production. Outre le créateur J.T Rogers (spécialisé dans les pièces de théâtre), les noms de Destin Daniel Cretton (Shang-Chi, La Voie de la Justice, Le Château de Verre) et Michael Mann (Thief, Manhunter, Heat) sont également attachés ! Alors que le premier s’occupera de plusieurs épisodes, il s’agit pour le second d’un retour à la réalisation !
Michael the Mann
Il nous aura manqué le Michael, et s’il ne met en scène que le (très bon) épisode pilote, le bougre intègre instantanément certains tropes de son cinéma. Près de 7 ans après son dernier film Hacker (et avant son prochain long-métrage Ferrari), Mann nous montre ce pourquoi il est principalement reconnu : de l’ambiance nocturne, des décors urbains, le milieu clandestin et des individualistes forcenés ! Il est d’ailleurs intéressant de le retrouver, près de 20 ans après le formidable The Insider, filmer des bureaux et autres intérieurs avec là encore l’immersion esthétique au premier plan.
Si Tokyo Vice ne représente point le grand Michael Mann, de par un cadre de mise en scène restant globalement dans des conventions télévisuelles, le tout est franchement bien emballé. Ne se permettant pas de grandes expérimentations visuelles comme il nous aura habitué ces dernières décennies, Mann pose parfaitement les bases de l’histoire et de l’identité stylistique du show (comme il l’aura fait dans les 80’s avec Miami Vice).
Tout comme pour Ali, on reconnait l’utilisation de caméras mobiles afin d’immerger le spectateur, et proposer par ailleurs des plans centrés sur les visages. Tout à la fois précis et naturaliste dans son approche, Mann fait exister le quartier chaud de Kabukicho de manière palpable. Un tournage in situ au Japon qui permet donc d’obtenir un résultat immédiatement dépaysant et rafraîchissant, à l’heure des crime dramas au setting essentiellement américain. Permettant d’efficacement planter le décor et les enjeux (via notamment une scène d’intro en flash-forward), le pilote de Tokyo Vice s’impose avant tout comme une plongée introductive auprès de son protagoniste et l’environnement qui l’entoure.
Tokyo Vice : deux flics à Tokyo
Si Ansel Elgort (Baby Driver, West Side Story) parait un tantinet juvénile au premier abord, le choix se révèle bien judicieux lorsqu’on se souvient des faits réels et de la nature de rookie du personnage. S’il est cependant un peu plus délaissé dans les 2 autres épisodes (afin d’épouser une structure narrative là encore plus conventionnelle en partageant le temps à l’écran), on se plait à suivre ce jeune reporter et le choc culturel auquel il est confronté. Le gaijin se heurte donc au collectivisme local laissant peu de place aux étrangers, afin de mettre en lumière des révélations sur des morts suspectes.
Un héros déterminé et jusqu’au-boutiste, entouré de personnages d’emblée identifiés : Rachel Keller (Legion) en hôtesse à la croisée des autres personnages, Ken Watanabe (Inception) en vieil inspecteur de police faisant figure de mentor, Rinko Kikuchi (Pacific Rim) en rigide supérieure hiérarchique ou même la française Ella Rumpf (Grave) en immigrée faisant face à la désillusion du monde de la nuit. On pourra aussi compter sur Shô Kasamatsu campant Sato, un mystérieux yakuza en conflit interne avec l’organisation. Pour le moment, difficile de connaître le destin de tout ce trombinoscope et les possibles arcs narratifs qui nous attendent, mais les graines sont bien plantées.
Au final, Tokyo Vice débute de manière très efficace via un pilote intéressant et immersif, avant d’être un peu plus dans les clous (tant d’un point de vue structurel que visuel, via des plans plus cadrés et une ambiance moins nocturne) pour introduire les tenants de la série. Quoiqu’il en soit, on tient une bonne intro avec un casting réussi et une manière authentique de dépeindre la capitale tokyoïte (la langue japonaise est au moins aussi importante que l’usage de l’anglais). Bref, on tient peut-être une des belles surprises de 2022 !
Tokyo Vice sera disponible à partir du 28 avril sur Canal+ Séries
avis
Tokyo Vice s'impose d'entrée de jeu comme un crime drama solide, au casting réussi, et dont la principale force est son immersion dans un Japon à l'aune du nouveau millénaire. Boosté par les belles promesses de son histoire vraie, cette introduction est avant tout couronnée par le retour de Michael Mann derrière la caméra, qui emballe un épisode pilote bien prenant. Affaire à suivre !