Tout juste diffusée sur Netflix, l’adaptation de The Sandman vient de se conclure avec un épisode bonus, et nous aura présenté une belle virée onirique.
Dream, aka Morpheus, un des Infini et maître du royaume des rêves, est emprisonné sur Terre pendant un siècle et tente de prévenir la fin de l’humanité, privée de ses songes. The Sandman, diffusée sur Netflix en début de mois, oui, je suis encore en retard, vient de proposer un double-épisode surprise pour terminer sa première saison, laquelle se sera montrée enivrante, même si elle souffre parfois de son format ambivalent, entre le feuilleton et l’anthologie.
Adaptée des fameux comics de Neil Gaiman, qui supervise d’ailleurs ici la production aux côtés des créateurs du show, David S. Goyer (scénariste de la trilogie du Dark Knight, Man of Steel ou de Batman v Superman, on ne citera pas le reste) et Allan Heinberg (Wonder Woman, Sex and the City ou Grey’s Anatomy), The Sandman propose donc une transposition fidèle des romans graphiques. C’est beau et c’est bien fait, malgré une trop grande exposition à notre goût, une belle réussite.
Inception super-héroïque
Comme on disait, The Sandman made in Netflix & Warner Bros Television souffre d’une exposition trop présente. Alors, c’est nécessaire pour introduire les personnages ou la mythologie du show, mais la plupart des dialogues des premiers épisodes ne sert exclusivement qu’à nous expliquer ce qu’il se passe à l’écran. Des efforts de mise en scène auraient permis d’éviter de nous prendre à ce point par la main, d’autant plus que la voix off de Morpheus nous guidera tout le long de ces 11 épisodes. Ça fait beaucoup, surtout que la complexité de la série, sûrement effrayante pour tous ceux ayant déjà vu des virées dans le monde des rêves, sauf qu’on est loin d’un film de Christopher Nolan, et The Sandman propose plutôt un voyage onirique qu’un labyrinthe narratif à décrypter. Bref, too much lazy writing.
En dehors de ça, qui représente pourtant une belle perturbation dans notre appréciation globale de l’œuvre, The Sandman est très largement plaisant. Ainsi la transposition de la bande-dessinée en épisodes se fait naturellement, surtout que le show adapte à merveille les différentes histoires dans une sorte d’anthologie linéaire, où des rebondissements semblant anodins se révèlent importants par la suite. Si l’écriture morcelée est ici bien gérée, s’étalant parfois sur plusieurs épisodes ou sur un one shot, elle développe avec précision le propos rêveur de la série.
Si des modifications sont apportées à l’œuvre originale, supervisées par Gaiman himself, comme le rôle du Corinthien, promu de méchant ‘anecdotique’ ds le comics à grand méchant de la série, ou la suppression de tous les personnages affiliés à DC Comics, Constantine mis(e) à part, le reste demeure parfaitement respectueux du matériel original. Pour cela, on remercie grandement le département de la décoration et des effets visuels qui ont dépensé sans compter pour donner vie aux accessoires du show et créer de belles élucubrations graphiques, mélange de visions psychédéliques et envolées poétiques. C’est simple, la série est magnifique. Entre les numérisations de toute beauté, les cadrages ou la reconstitution d’époque, le design et les CGI servent une mise en scène propre, grandement servie par un mélange entre objectifs vintage et une caméra 8K, ce qui donne à l’ensemble un aspect distordu, étiré, parfait pour imager l’aspect irréel et théologique du projet.
Ainsi, la grande force de The Sandman demeure son aspect mythologique, et l’évolution de son protagoniste, un Dieu comprenant progressivement les enjeux de l’humanité, ses forces et ses faiblesses. Comme dans tous les boulots de Gaiman, Sandman demeure LA référence, bien plus personnelle que par exemple American Gods, mais continue de proposer une vision mélangeant avec plaisir différentes mythes religieux, mono et polythéistes. Une belle émulsion pour traduire l’errance de l’humanité, simple jouet manipulé par des êtres supérieurs, pourtant tout aussi faillibles. En cela, le parcours personnel de Morpheus est joliment présenté, une évolution très justement traduite dans le superbe épisode 6 « The Sound of her Wings » où il se lie d’amitié avec un humain qui ne veut pas mourir.
Ainsi, entre son conflit familial, ses confrontations avec Lucifer ou son entente avec ses frères et sœurs, également divins, c’est surtout l’occasion de voir une humanité transparaître dans les traits inexpressifs de The Sandman. En cela, Tom Sturridge nous offre une partition toute en retenue, peut-être un peu trop, mais parfaitement en adéquation avec le personnage éponyme. De même, Boyd Holbrook est superbe en Corinthien psychopathe et le grand David Thewlis est évidemment excellent, même s’il n’est que trop peu présent.
Spectaculaire mais intimiste, l’adaptation de The Sandman est une pure réussite, magnifiquement imagée et développée, même si l’exposition semble par instant trop présente, mais pas de quoi nous donner des cauchemars.
La saison 1 de The Sandman est disponible sur Netflix.
Avis
Malgré une exposition trop présente, The Sandman est une adaptation parfaitement réussie des fabuleux comics de Neil Gaiman. Un bijou visuel et narratif où la condition humaine n'a jamais été aussi joliment définie que par son aspect mythologique et onirique.