SISU – De l’Or et du Sang se présente comme une série B minimaliste et violente, se perdant rapidement en carricatures et incohérences.
SISU – De l’Or et du Sang démontre que faire une bonne série B est bien plus complexe qu’il n’y paraît. Troisième long-métrage de Jalmari Helander, ce dernier s’était déjà plié à l’exercice dans le déjà inabouti et foutraque Big Game, mettant en vedette un certain Samuel L. Jackson. Prenant déjà pour décor la Laponie, et débutant comme un survival initiatique, la proposition du cinéaste finlandais se muait ensuite inexplicablement en série B bourrine à base de crash d’avion présidentiel américain et de terroristes, sans que les deux parties du récit n’aillent jamais vraiment au bout de leurs ambitions respectives. Un constat que l’on pourrait (presque) appliquer à ce SISU – De l’Or et du Sang, amené il est vrai, avec beaucoup plus de modestie.

Le troisième long-métrage de Jalmari Helander s’avère ainsi beaucoup plus minimaliste sur son pitch, comme sur ses ambitions : prenez un terme filandais intraduisible, SISU (d’un sens proche de « courage », « ténacité », « persévérance » ou « détermination »), appliqué à un ancien soldat réfugié en Laponie pour y chercher de l’or. Ce dernier sera ainsi prêt à tout pour protéger son butin, même face à un escadron de nazis. Et l’intention de série B jouissive se greffe une fois de plus assez maladroitement à l’isolement de cet homme mutique et diablement charismatique au milieu des superbes paysages de Laponie. L’introduction, sans aucun autre son que celui de la nature, est ainsi réellement prenante. Mais voilà : Jalmari Helander ramène très vite l’artillerie (trop) lourde, et dégomme, à coups de chapitrages 70’s, servant plus de gadgets, (coucou Tarantino), d’incohérences scénaristiques et surtout d’abus, sa minérale promesse.
Un corps à raconter
Un ancien soldat increvable (Jorma Tommila), un escadron de nazis n’ayant plus rien à perdre, des prisonnières, de l’or, la Laponie et un chien. Voilà, pour le décor, et aussi le pitch de SISU – De l’Or et du Sang, vendu dans sa bande-annonce par le studio à l’origine de John Wick. Pourtant, à part son personnage de tueur sadique au passé légendaire , un chien et son côté revenge-movie le film de Jalmari Helander s’avère être presque l’antithèse de la franchise de Chad Stahelski et Keanu Reeves, tant le cinéaste ne surabuse jamais d’effets de style où de marqueurs de mise en scène stylisés lorgnant volontiers vers John Woo et le thriller urbain. SISU – De l’Or et du Sang s’avère aussi sec que son héros à la mise en scène, qui pourrait presque paraître discrète au vu du pitch sanglant et bourrin qu’elle s’entend raconter.

Et c’est peut-être ce qu’il y a de plus passionnant dans cette volonté de série B bourrine pétrie d’incohérences et d’inutile surenchère : le corps malmené de son acteur et de son personnage, qui au travers de ses nombreuses cicatrices et son absence totale de dialogues, pourrait raconter un tout autre récit sur ses seules (solides) épaules. Parce que l’autre film, celui dont on doit vous parler, s’avère malheureusement beaucoup moins passionnant et surtout jouissif qu’il ne voudrait grossièrement l’être. Oui, les antagonistes sont d’affreux monstres, et leurs mises à morts, souvent tranchantes, raviront sûrement nombre d’aficionados, non à cause de leur inventivité mais surtout de leur seule brutalité. Parce que même doté de cette promesse minimaliste, Jalmari Helander en fait malheureusement (beaucoup) trop.
De l’or se barre
Affublé d’un inutile chapitrage, et du récit légendaire de son soldat, comme si sa capacité de survie et ses nombreuses blessures ne suffisaient pas à nous prouver de sa résistance, SISU – De l’Or et du Sang s’essoufle, à contrario de son increvable héros. Même doté d’un casting et de décors ressérés, le récit n’évite pas les nombreuses incohérences (ben, comment il est arrivé là le chien ?), traduisant son désir de délire bourrin ultra-violent en résultat surgonflé et un brin carricatural. La sécheresse se voit transfigurée en surenchère, et alors que les mises à morts continues, promesse minérale du projet, devraient s’avérer satisfaisantes, elles finissent tout simplement par fatiguer, de par le manque d’inventivité de ces dernières et d’un chapitrage servant de simple gadget tandis que la tension du film devrait pourtant montrer crescendo.

On reste alors autant de marbre que le héros devant ce SISU – De l’Or et du Sang, qui ne se paye même pas le petit luxe de réjouir. Il en demeure alors une promesse minérale, inutilement surgonflée et appuyée en de carricatures et incohérences d’un cinéaste tellement persuadé de livrer un délire de sale gosse, alors qu’il n’en est finalement qu’un petit revenge-movie un peu trop conscient de lui-même pour délivrer le plaisir nécessaire. On ne retiendra alors que le charisme d’un acteur et le corps malmené de son personnage, qui en bien des cicatrices, raconte (presque) sans une seule ligne de dialogue un film bien plus passionnant que cet amas artificiel de morts déployées sans la moindre inventivité.
SISU – De l’Or et du Sang est actuellement en salles.
Avis
SISU - De l'Or et du Sang semble un peu trop conscient de lui même pour pleinement satisfaire. Même doté d'une promesse bourrine minérale de série B sanglante, Jalmari Helander surcharge inutilement la barque, en de gadgets inutiles et d'incohérences ayant raison de la brutalité et de la sécheresse du propos, pour le muer en une simple avalanche de meurtres déployée sans le moindre inventivité.