Le phénomène Minecraft entend cette fois conquérir le grand écran des salles de cinéma, de la même manière qu’il a su s’imposer comme une œuvre fun, fédératrice et inédite dans le jeu vidéo. Réalisé par Jared Hess (Napoleon Dynamite), le résultat est simplement honteux !
Difficile de trouver quelqu’un qui ne soit pas familier avec Minecraft, ce simulateur de bac à sable gargantuesque imaginé par Notch en 2011, et à ce jour le 2e jeu vidéo le plus vendu de tous les temps ! Conçu tel un jeu de survie initialement (où l’avatar munie d’une simple pioche doit se démener dans un monde vierge rythmé par des attaques de créatures nocturnes et la gestion de ressources primaires), Minecraft a été décliné via plusieurs modes, et essentiellement démocratisé dans une communauté geek avide des possibilités créatives allouées par la pépite du studio Mojang !

Et tandis que les adaptations JV ont le vent en poupe (Super Mario, Castlevania, Uncharted, Resident Evil…), retrouver Minecraft au cinéma pourrait être une évidence. C’est oublier que le projet est dans les starting blocks depuis des années, maintes fois remanié, mais désormais sur les écrans via un studio Warner Bros s’aventurant sur les plates-bandes des récents Jumanji.
Un monde dénué de vie à sauver
Car oui, Minecraft le film nous présente Steve (Jack Black), un hurluberlu fan de construction depuis le plus jeune âge qui va découvrir un portail vers « la Surface », une terre de tous les possibles où tout est cubique. Mais après voir fraternisé avec Dennys (un loup et acolyte qu’il renverra dans le monde réel afin de conserver le secret de ce monde fantastique), il se retrouve piégé dans le Nether, un Outre-monde dominé par la reine porcine Malgosha.
C’est dans ce contexte que Garrett « la Poubelle » Garrisson (Jason Momoa en looser ex-star du versus fighting sur arcade dans les 80’s), le jeune Henry (un garçon brillant dans l’ingénierie), sa sœur Natalie et Dawn (Danielle Brooks en responsable d’un zoo itinérant dans sa propre voiture) vont trouver l’entrée du monde de Minecraft, et tenter de s’opposer au plan de conquête mondiale de Malgosha.

Bref, un pitch classique renvoyant à tout un tas d’œuvres similaires où des nobodys deviennent des héros dans un monde parallèle. Mais rien ne nous prépare réellement au je-m’en-foutisme général qui suinte de toute cette entreprise à plusieurs millions de dollars. Car si le film Super Mario Bros peinait de par un scénario globalement prétexte à enchaîner les easter eggs, Minecraft le film s’apparente à une extension digne d’une pub géante (on pense même à JCVD pour World of Warcraft il y a 20 ans), dont le seul capital sympathie provient d’un Jack Black fidèle à lui-même en trublion sorti de Rock Academy.
Là encore, l’entièreté de la « dramaturgie » ne repose que sur l’énonciation pure et simple des règles de gameplay du jeu de base, tel un gros tutoriel méta et cynique . Introduction du creeper, des zombies, de la création d’objets, présentation d’un village anonyme aux habitants qui le sont tout autant, caractérisation post-it des antagonistes… le B-A BA y passe comme un panneau géant où les acteurs récitent le script !
Minecraft, ou une énième transposition catastrophe de jeu vidéo
Rien n’est vecteur de chair ou de réel enjeu dans ce film Minecraft qui n’a définitivement pas compris la notion même d’adaptation. Car même si l’équipe de scénaristes n’a pas jugé pertinent d’investir le matériau source ou bien de jouer avec, la Surface s’apparente moins au monde de Tron (un monde dans le jeu) qu’à un fantasme dans la propriété intellectuelle de Notch.

Les personnages archétypaux sans arc narratif (si ce n’est une amitié au forceps entre Momoa rejouant sa partition de beauf à race anachronique puissance x10) sont donc contraints à errer entre chaque set piece insipide, tourné dans des fonds verts interchangeables et sans capacité d’ancrage réel ni pourvoyeur de gravitas.
Village random, construction intra-diégétique pour faire d’une simple tour un bataillon de golems, grotte sans relief… le bac à sable de Minecraft se retrouve à la fois dépeint tel qu’il est dans toute session de jeu vanilla, mais également dévitalisé devant un nivellement total vers le bas des possibilités créatives que représente la marque. C’est simple, le spectre d’un Spy Kids 3 n’est même pas loin !
Film pour têtes de pioche
Certes, le film décoche parfois un sourire facile par la simple présence d’un Jack Black au capital sympathie certain, ou bien une blague graveleuse impliquant un Momoa qui n’en a décidément plus rien à faire de son image (le « double sandwich d’hommes » !). Mais malgré une facture technique loin d’être honteuse, la finalité de cette adaptation de Minecraft est que le résultat est sous-écrit et dénué de passion. On bafouera gentiment face à des séquences humoristiques poussives impliquant Jennifer Coolidge, semblant tout droit sorties d’un mauvais sketch SNL raccordé à la dernière minute. Un bon gros gâchis qui ne peut même pas se targuer de verser dans le What the Fuck le plus complet. Bref du faussement cool sans intérêt comme le tout récent Borderlands !
Minecraft le film sort ce jour au cinéma
avis
Minecraft le film n'est pas une adaptation du célèbre jeu de Mojang, mais bien un giganteque panneau publicitaire n'ayant que faire des possibilités créatives du matériau de base. Non, seuls surnagent derrière ce blockbuster techniquement propre mais sans âme la participation en roue libre d'un Jack Black ayant compris dans quelle entreprise il se croyait : celle de la marchandisation et l'exploitation à mêmes de toutes les grandes œuvres multimédium contemporaines. Une gigantesque mascarade tout simplement, malgré l'esquisse d'un 1 ou 2 sourires !