Kraven arrive sur grand écran, par les mêmes producteurs véreux de Venom, Morbius ou Madame Web. Après moult ratages, la promesse d’un film de super-vilain violent et méchant semblait présente. Et pourtant, on tient à nouveau un beau ratage faisant de cette production un autre joyau de la couronne des pires adaptations de comic book !
On espérait naïvement une remontada de dernière minute avec Kraven. En effet, là où Amy Pascal, Avi Arad et la team de Sony surfaient depuis quelques années sur le MCU et l’IP Spider-Man, l’espoir semblait permis : on a été consternés par une trilogie Venom virant vers le navet abyssal et l’épilogue honteux, un Morbius incroyablement insipide et un Madame Web sous forme de gros navet.
Et alors que le studio semble n’avoir aucune compréhension des personnages avec lesquels ils jouent ou tout simplement des ingrédients prépondérants pour accoucher d’un blockbuster réussi, Kraven s’impose comme l’ultime clou du cercueil de ce « Spider-less Cinematic Universe« .
Vilain dévitalisé..encore !
Pour rappel, Kraven est un ennemi culte de Peter Parker mais également de Black Panther : un super-chasseur d’origine russe ayant des facultés surhumaines grâce à un sorcier africain. Extrêmement bien représenté dans le récent Marvel’s Spider-Man 2, ce super-vilain adepte des armes blanches ou à pointes a pour but de chasser les plus dangereux gibiers de la planète, y compris les super-héros !
Mais l’adaptation filmique que voici prend une toute autre route évidemment, malgré la tagline (évidemment mensongère) à base de « On ne naît pas super-vilain, on le devient ! ». Pourtant les origines du bougre semblent curieusement respectées : Sergei Nikolaievitch Kravinoff (Aaron Taylor-Johnson) est le fils Nikolaï Kravinoff (Russel Crowe), un oligarque mafieux adepte de chasse et prônant la loi du plus fort. Laissé pour mort dans sa jeunesse par la faute de son père, Sergei se retrouve soigné d’une morsure de lion par de la magie vaudou.
Désormais renommé Kraven, ce dernier s’évertue d’user de ses facultés surhumaines (force, agilité, sens et endurance bien au-dessus de la moyenne) pour traquer et tuer les braconniers tels que son père. Sa route va non seulement le mener de nouveau face à sa famille, mais aussi en opposition à un chef de gang se nommant le Rhino (Alessandro Nivola).
Elle est pas belle ma fausse fourrure ?
Vous l’aurez compris, point de super-vilain en devenir, juste un anti-héros faisant le bien mais adepte du meurtre pour arriver à ses fins? Mais là où à la rigueur l’intention pouvait être louable (alors que The Penguin a prouvé qu’on pouvait faire un drama adulte avec de vrais personnages complexes qui ne s’apparentent pas à des anges), Kraven s’évertue à distribuer chaque étape de l’origin story mièvre dans un agenda orchestré sans passion.
Pourtant J.C. Chandor (A Most Violent Year, Triple Frontière) n’est pas un manchot, et cela se ressent lors de quelques rares séquences plus musclées où Aaron Taylor-Johnson s’amuse à virevolter face à des malotrus armés jusqu’au cou. Clés de bras, égorgements et autres brisages de nuques à la Steven Seagal..bref Kraven semble parfois tomber dans la réjouissance régressive comme on aime, rendant le visionnage des pugilats plutôt agréables devant leur lisibilité.
L’écologie pour les teubés
Mais où est donc le problème ? Le résultat oscille entre l’ennui poli devant une tragédie familiale sans aucun gravitas, une chasse à l’homme étonnamment pépère et le DTV super-héroïque frôlant le turbo-nanar ! Et c’est sur ce dernier point que Kraven marque irrémédiablement des points (et en fait de facto le meilleur film de la fournée!), tandis que le ton résolument sérieux du film (et son message écolo sponsorisé par la whey de Basic Fit) laisse parfois place à des notes d’humour involontaires complètement réjouissantes.
Outre les traditionnels clins d’œil à un univers étendu déjà mort (« il peut imiter n’importe quelle voix..c’est un vrai caméléon ! »), l’intrigue se contente de faire un monumental sur-place narratif après avoir passé 20 min à nous abreuver de flash-back. Point de confrontation directe avec le père (Russel Crowe est venu prendre son chèque pour s’entraîner à l’accent russe), Kraven a la bonne idée de laisser Alessandro Nivola (A Beautiful Day) cabotiner comme un sagouin.
En résulte un (super)vilain à la fois trop propre sur lui aux motivations vengeresses aussi fines que du PQ, délivrant parfois ses lignes de dialogues tel Tommy Wiseau dans The Room : un pur régal de déviance (qui donne paradoxalement un peu de vie dans ce foutoir éclairé à la lumière grise, par le pourtant compétent chef op’ des Éternels ou les Banshees d’Inisherin) parfois impeccablement transféré à un Aaron Taylor-Johnson s’essayant tantôt à James Bond (une scène d’arbalète en plein bureau), tantôt à Stallone (pour un résultat moins incarné malgré les muscles sortis).
Festival de la roue libre
Même la brillante Ariana DeBose (West Side Story) semble perdue à cachetonner dans un rôle de sidekick avocate/deus ex machina ayant lu le script (détentrice de la réplique la plus drôle du film !), tandis que Kraven s’amuse même à bazarder un énigmatique personnage d’assassin alien comme un énième méchant à savater. Le je-m’en-foutisme est ainsi total !
BO programmatique, production design semblant venir de Roumanie, enjeux sans portée émotionnelle, climax ringard (Abraham Lincoln chasseur de vampires et sa charge de gnous n’est pas loin) aussi laid que la modélisation du Rhino. Pourtant le plus cocasse dans ce nouveau ratage qu’est Kraven tient dans son ultime séquence : entre hommage mercantile pour faire mousser le geek, respect balancé aux toilettes des œuvres pillées et non-compréhension absolue de l’histoire qu’on essaye de nous faire avaler à l’étau noir, Kraven est la preuve qu’il faut à tout prix cesser ces univers partagés sans âme.
Kraven sortira au cinéma le 18 décembre 2024
avis
Kraven est un nouveau crachat à la face des fans de comics et de tout adepte de blockbuster : après Venom, Morbius et Madame Web, c'est à un ultime saccage virant vers le nanar parfois réjouissant que le spectateur est invité. Derrière une promesse de film violent et régressif, les quelques gerbes de sang numériques et un Aaron Taylor-Johnson aux muscles huilés ne peuvent pas sauver un casting en roue libre, une direction artistique aux fraises, un script abyssal de bêtises et une narration enchaînant les non-sens. Un joli et abrutissant ratage !