Ce samedi 08 mars 2025, Ricky Gervais enflammait l’Accor Arena à Paris pour son nouveau spectacle, Mortality. Une nouvelle réussite de l’artiste, plus en forme que jamais, alors que la sagesse semble inexorablement le rattraper.
Après Humanity, Supernature et Armageddon, Rocky Gervais présente son nouveau stand-up comedy show sobrement intitulé Mortality, dont l’unique représentation en France (et sans traduction) s’est déroulée à l’Accor Arena ce samedi 08 mars 2025. Salle comble pour le comédien irrévérencieux malgré un show pourtant assez timide même si néanmoins toujours aussi incisif.

Pour rappel à ceux du fond, Ricky Gervais c’est le bonhomme derrière et devant les séries The Office (l’originale, britannique), After Life, Extras, Derek, ou les films The Invention of Lying, Special Correspondants et le quintuple maître de cérémonie de 5 éditions des Golden Globes. Il écrit, réalise, produit et joue dans tous ses projets (ou presque) et l’artiste anglais s’est donc forcément tourné vers le stand-up pour faire sensation, aidé de son discours iconoclaste et d’un humour british plus noir que noir. En somme, on est des gros fans du type et on se devait donc d’assister à cet événement historique (première fois qu’un comédien britannique non-traduit remplissait une salle de cette ampleur). Fuckin’ hell.
That won’t be in the special! (Spoilers ahead!)
Après une première partie un peu hâtive où on apprenait qu’un cheval coûte seulement 50 £ en Grande Bretagne ou qu’on constatait de l’absurdité pour un astronaute d’être fait Chevalier par la Reine d’Angleterre, the main course arrives. Face aux hurlements de 15000 personnes en délire, sous le feu des projecteurs et des premières notes de Hells Bells de ACDC, Ricky Gervais arrive enfin. Rutilant devant son public parisien, heureux d’être seul-en-scène face à l’Arena bondée d’un public hétéroclite et polyglotte, on dira cosmopolite, il s’élance sans préambule. Comme tout le monde, il prend de l’âge et Mortality serait son spectacle le plus « adulte ». On se gausse en attendant les vannes sur les pédophiles ou les nazis, ou les nazis pédophiles, ce qui évidemment ne se fait pas prier. Ce bon Ricky s’est certes assagit mais reste toujours aussi trash. Ouf, thank God!
Ainsi on jouit du florilège sarcastique de l’auteur qui nous assène ses sacro-saintes saillies, notamment celles sur la religion, en axant cette fois son sketch sur le film L’Exorciste et sa fameuse réplique « your mother sucks cocks in Hell!« . Une perspective moins désagréable que celle d’être empallé.e ou de servir de barbecue au Malin, sauf si la fameuse verge sucée s’avère être celle de Hitler… un détail concède Mr Gervais, pas chiche en mimes.
On rigole, on s’insurge, surtout quand le bougre nous fait imaginer Stephen Hawkins incrédule au milieu d’une orgie située sur l’île de Harvey Weinstein ou quand il nous fait un laïus sur la peine de mort et le cynisme de l’application de la loi du Talion (un oeil pour un oeil) puisqu’un criminel accusé de viol & de meurtre n’écopera finalement que d’une seule de ces punitions… Bref. Mais non content de choquer, il n’hésite pas à se mettre lui-même en dérision, comme il sait si bien le faire. De son immense fortune qu’il utiliserait pour sauvegarder son cerveau sur un corps qui aurait forcément un pénis plus gros que le sien, jusqu’à son armée d’esclaves en costume, mais en chaussettes pour qu’ils n’abiment pas le parquet de son manoir, c’est surtout son âge qui, ici, prend cher.
Old news…
Car sous couvert de se rebiffer face à plein de façon de mourir, ou de fausses idées véhiculées sur cette peur immuable de l’être humain, c’est surtout lui qui semble tétanisé par cette inévitable Mortality. Une impression de flashback nous saisit alors quand on repense aux nombreux show de Ricky Gervais où il se moque de ceux qui se plongeant dans les religions rassurantes pour se protéger du trépas. Ce sont finalement ses spectacles qui lui servent de thérapie (pour laquelle c’est lui qui se fait payer !) et au cours desquels il semble faire amende de ses erreurs, de ses jugements hâtifs, comme une confession publique, sans pudeur, mais avec beaucoup de gros mots.

Une direction plus intime, même s’il aborde également la joie d’avoir passé les soixante ans sans subir d’incontinence, pour l’instant. Une belle preuve de self-awareness pour ce génie de l’humour qui va même jusqu’à s’estimer tranquille si jamais il se retrouvait en prison (pour ses blagues dérangeantes) puisque personne n’irait le menacer dans les douches vu les rides et le bidou rebondi qu’il se paye. C’est mignon, ou presque, mais ça fait mouche.
Sauf que cette honnêteté semble ternir un peu l’ensemble de Mortality puisque finalement la plupart des vannes paraissent un peu des resucées de précédents spectacles, ou de ses hostings aux Golden Globes. Ainsi, on avait déjà eu vent des pratiques sexuelles rigolotes qui dénotent avec la descente aux enfers dans Humanity quand les nazis se retrouvent eux dans tous ses shows. La meilleure blague est souvent la plus répétée et force est de constater que le recyclage fonctionne toujours autant.
Alors, et c’est ce qui nous laissera un goût un peu artificiel face à cette mise à nue, c’est de conclure Mortality (soit un final de 15 minutes quand-même) sur les coulisses d’une vanne faite aux Golden Globes de 2020 où il raillait (à raison) James Corden et Judy Dench pour leur rôle dans le très nul Cats. L’anecdote est marrante, mais conclure un spectacle inédit par l’explication politico-sociale d’une tirade d’il y a 5 ans, on trouve ça un peu facile comme bouquet final. Simpliste mais surtout exagérément complaisant. Sorry not sorry Ricky.
In fine, Mortality reste un très bon spectacle d’un comédien maniant parfaitement le malaise et l’humour cinglant, absurde et grossier, même si les prémisses de l’arthrose semblent assagir un peu ce fifrelin.
Mortality sera prochainement disponible sur Netflix.
Avis
Mortality est le nouveau spectacle iconoclaste de Ricky Gervais, soit une nouvelle bonne pioche trash et hilarante, même s'il parait un peu trop sage par rapport aux productions habituelles du britannique.