Au hasard d’un jeu gratuit disponible en 2020 sur l’Epic Games Store, j’ai pris sans trop réfléchir Kingdom Come: Deliverance. Premier du nom, il est sorti en 2018 avec des soucis de performance, mais Warhorse Studios avait su rattraper le coup. Les critiques étaient bonnes et j’avais besoin d’un bon RPG qui m’immerge dans un autre monde (2020 oblige). J’étais loin d’imaginer la fascination que j’allais avoir pour ce jeu exigeant, mais brillant et unique. J’attendais donc de pied ferme la sortie du second opus et je n’ai pas été déçu.
L’intrigue de Kingdom Come: Deliverance II suit celle du premier jeu qui se déroule au début du XVe siècle en Bohême (République tchèque actuelle). On incarne Henry, fils de forgeron, qui a vu ses parents et son village se faire massacrer par une armée aux ordres d’un roi félon qui a kidnappé son propre frère pour prendre le contrôle du royaume. Le jeune homme se retrouve ainsi propulsé dans la grande Histoire à travers un récit épique qui fait la part belle aux intrigues politiques et autres joyeusetés de cette époque troublée.

Un monde ouvert exceptionnel
Les mondes ouverts sont la proie facile de nombreuses critiques dans le monde du jeu vidéo – il suffit de regarder l’accueil de ceux créés par Ubisoft, souvent descendus avant même d’être testés. Néanmoins, Kingdom Come: Deliverance (notre test du premier KCD) avait déjà réussi « open world » et on se sentait immergé dans cet univers réaliste sans pour autant qu’il y ait 40 000 points d’intérêts sur la carte pour artificiellement la remplir. Le 2 améliore la formule et en fait un monde ouvert qui joue d’égal à égal avec Red Dead Redemption 2 et Cyberpunk 2077 (toutes proportions gardées par rapport aux moyens financiers et humains colossaux déployés par ces deux titres).
Tout a été habilement pensé pour rendre l’exploration des deux vastes cartes aussi plaisante que possible. On ne compte plus le nombre de fois qu’en chemin pour accomplir une quête, on fait une rencontre inattendue : une querelle de village pour un pommier ? Un villageois disparu dans des circonstances troublantes ? Une rencontre avec ce qu’on pensait être des ennemis, mais qui ne le sont peut-être pas ? On peut aussi bien continuer notre chemin ou nous en mêler, le choix est toujours nôtre. Et à la fin (deux heures plus tard ), on est toujours à cet endroit inattendu alors que ce n’était pas notre destination première. De ce fait, je vous laisse imaginer au passage la durée de vie du jeu… (spoiler : 50h grand minimum, mais plutôt entre 70 et 100h).

Or, si on est tant captivé par tout ce que le jeu nous propose en chemin, c’est parce qu’on fait face à des quêtes qui ont une vraie richesse narrative même pour les plus simples d’entre elles. Kingdom Come: Deliverance II a de passionnantes quêtes secondaires qui marquent l’esprit du joueur tout autant que la quête principale. On n’avait plus vu ça à un tel niveau depuis Cyberpunk 2077 ou The Witcher 3, tout deux réalisés par les rois de l’écriture : CD Projekt. La trame principale n’est pour autant pas en reste, loin de là, et nous aspire dans le récit telle une série addictive aux multiples rebondissements.
Concrètement, Kingdom Come: Deliverance II récompense la curiosité et c’est pour cela que les mondes ouverts ont été crée en tout premier lieu. Il est plaisant de surprendre des conversations entre pnj (personnage non joueur) qui attisent notre curiosité et qui nous poussent à leur poser des questions ou à nous rendre sur le lieu qu’ils ont décrit. Ces derniers ont d’ailleurs une vie avec des multiples tâches quotidiennes qui font qu’on les croise aussi bien à la taverne le soir que dans leur atelier le jour et bien entendu dans leur lit la nuit.

Qui plus est, le jeu propose de nombreux choix dans les dialogues et différents styles d’attitude. On peut tout aussi bien se comporter comme un noble, un érudit ou encore comme un brigand et les pnj auront des réactions différentes à chaque fois. Il faut aussi faire attention à comment on se présente, si jamais on est ensanglanté et habillé comme un paysan, personne ne croira qu’on est un noble. Ce système enrichit la moindre interaction dans le monde la rendant plus palpitante et immersive.
Car l’immersion se révèle être la clé de voûte de tout l’univers de Kingdom Come. Pour cela Warhorse Studios a mis les petits plats dans les grands en poussant au maximum les détails du monde. La direction artistique est très belle et organique – entre autres, on a rarement vu d’aussi belles forêts dans un jeu vidéo – et on prend un plaisir de tous les instants à flâner pour admirer le moindre petit recoin de la Bohême du XVe siècle. Cette immersion visuelle est accompagnée d’une riche bande-son, aussi bien du point de vue de la musique que des bruitages ou des doublages (anglais, je précise, car pour le moment les français ne sont pas à la hauteur).
Le gameplay du 1… En mieux
Pour ceux qui ont détesté l’expérience de gameplay du 1, il est difficile de vous conseiller de retenter votre chance avec le 2, car fondamentalement on reste sur les mêmes bases. Ainsi, le système de combat est toujours exigeant et demande de la pratique. Warhorse a tout de même amélioré la lisibilité des rixes lorsqu’on affronte plusieurs ennemis qui devenaient souvent très bordéliques dans le 1 (cela rendait le jeu encore plus réaliste vous me direz…). On note aussi un bon nombre d’améliorations non négligeables telles que la possibilité de suivre automatiquement des pnj sans avoir à tenter maladroitement de rester près d’eux. Sans oublier l’excellente idée d’offrir au joueur trois tenues configurables et changeables en 1 clic – ce qui rend nos changements d’une tenue faite pour la furtivité à celle d’un noble ou d’un chevalier bien (euphémisme) plus agréable.

Néanmoins, le gameplay est à la fois brillant et particulièrement frustrant. Kingdom Come demande beaucoup de patience au non-initié pour qui rien n’a été prémâché. Il n’est pas nécessaire d’avoir jouer au premier pour apprécier le second, mais l’expérience du jeu de 2018 aide grandement lorsqu’on se lance dans l’aventure en 2025 et on ne peut que conseiller aux joueurs qui découvrent l’univers d’y aller doucement, de prendre le temps de se familiariser avec le monde et ses mécaniques. Paradoxalement, la difficulté n’est pas toujours bien dosée (comme dans le 1), le jeu peut à la fois être beaucoup trop compliqué et beaucoup trop simple. En tout cas, il y a un palier d’apprentissage des mécaniques de jeu à franchir qui donne accès à tout ce que Kingdom Come à de mieux à offrir. Après, c’est que du plaisir !
Un jeu qui tourne bien à son lancement
Côté optimisation, on est loin du premier cette fois-ci avec une solide optimisation qui permet de profiter pleinement des beaux graphismes du jeu. Pour le test, on a utilisé un PC avec une RTX 3070 et 28go de ram, ce qui permet de jouer en très élevé (voir pour certains paramètres en expérimental) avec le DLSS sur qualité et le jeu tournait autour des 50-60 fps. Même la grande ville de Kuttenberg ne réussit pas à faire baisser de manière notable le nombre d’images par seconde, qui restent au même niveau malgré la densité de cet environnement urbain.
De plus, on peut profiter de Kingdom Come sans un festival de bugs en tout genre. Il y en a tout de même quelques-uns – on ne va pas se mentir – mais rien qui ne casse une quête ou qui soit vraiment embêtant pour la narration. Cela rajoute même un certain humour comme avec ce bug plutôt rare où les toits n’arrêtent pas la pluie, ce qui donne des scènes en intérieur assez cocasses ! En tout cas, il semble évident que ce type de problème sera corrigé par Warhorse Studios à un moment ou un autre.

Au final, le seul défaut de ce second opus s’avère plus être un regret : le jeu est très (trop ?) proche du 1, mais avec tous les curseurs poussés au maximum. Plus immersif, plus beau, plus grand, mieux écrit et encore plus charmant. On aurait voulu que le studio prenne un peu plus de risques dans l’évolution de la formule, mais ils ont tellement bien peaufiné ce qu’ils avaient conçu dans le 1 qu’on les pardonne aisément pour ce parti pris. Vous l’aurez donc compris : Kingdom Come Deliverance II est une leçon de maître de RPG en monde ouvert qui marque l’esprit du joueur et, avec un peu de chance, le monde du jeu vidéo.
Kingdom Come: Deliverance 2 est sorti sur PC, PlayStation 5 et Xbox Series X/S le 4 février 2025.
Avis
Cette suite de Kingdom Come: Deliverance réussit le pari de pousser la formule du RPG médiéval réaliste à son paroxysme. Ce second opus se révèle encore plus beau et plus immersif que le premier avec une narration aux petits oignons et une durée de vie dantesque. Bref, c'est tout simplement une pépite du jeu vidéo qui rivalise avec les grands noms du genre (Red Dead Redemption 2, The Witcher 3...), ce qui n'est pas peu dire !
- Graphismes
- Direction artistique
- Gameplay
- Scénario
- Durée de vie
- Son