Pour bien commencer l’année 2021, la dernière mi-saison de Vikings vient d’être diffusée, pour conclure l’épopée sanglante et onirique de ces guerriers du nord.
Les fils de Ragnar, disséminés aux quatre coins de l’Europe, tentent chacun d’accomplir leur destinée propre. Diffusés sur Amazon Prime vidéo partout dans le monde sauf chez nous le 30 décembre 2020, c’est Canal+ Séries qui nous fait un superbe cadeau en mettant en ligne tous les épisodes le 1er janvier 2021 de cette saison 6B de Vikings. Une page se tourne, nostalgique, pour la fin d’un show qui longtemps avait tutoyé les dieux télévisuels.
En renouvelant pour une dernière fois son générique d’introduction, avec des notes électroniques pour moderniser le fameux If I Had a Heart de Fever Ray et de nouvelles images en double exposition où sont mis en avant chacun des enfants de Ragnar, Vikings change de peau pour bien démontrer de son ultime mue. Pourtant, on replonge dans l’aventure pile où se terminait la saison 6A (notre critique). Les Russes aidés de Ivar et de Hvitserk attaquent Kattegat, défendue par Bjorn, tandis que Ubbe retourne en Islande.
Welcome to Valhalla
On va être honnêtes, on s’est envoyé les 10 épisodes d’un seul coup, sans qu’aucune faute de rythme ne vienne pénaliser ce bingewatching, ces adieux déchirants. Une excellente façon de commencer l’année. Pourtant, quand on voit la lenteur des saisons précédentes, qui se gargarisaient dans l’inactivité des Vikings, avec une ou deux bastons pour redynamiser un peu les foules, on s’attendait au pire. Or, même si cette dernière flopée d’épisodes semble presque précipitée, elle n’est aucunement éparpillée. Force est de constater que malgré quelques lenteurs et une absence de tension un peu bavarde, le show excelle à se conclure. A l’image de Kattegat qui change de leadership et donc de visage, oubliant les figures déifiées de ses anciens leaders charismatiques pour de vulgaires usurpateurs, la série évolue, se transforme pour mieux entrer dans la légende. Une belle réussite, par moments incertaine, comme incapable de se résoudre à dire adieux à ses personnages, mais toujours fidèle à leur développement et rien que ça, c’est beau.
Certains évènements s’enchaînent un peu vite, les destins de certains éludés en deux mouvements de caméra tandis que le développement narratif tend à se concentrer pour terminer vite fait bien fait l’épopée commencée il y a maintenant 8 ans… Mais à l’encontre du final tout pété de Game of Thrones, celui de Vikings fait la part belle à ses protagonistes et vient récompenser notre ferveur en donnant toute latitude narrative et une fin respective en pleine adéquation à leurs caractères singuliers. Les adieux fraternels et plein d’émotion montrent tantôt des enfants apeurés mais fiers d’entrer enfin au Valhalla, quand d’autres, explorateurs et agnostiques s’émerveillent du chemin parcouru tout en s’impatientant des nouvelles aventures qui s’ouvrent devant eux.
Pourtant, si le périple sanglant et mouvementé de nos Vikings aura mis à mal leur polythéisme, à l’instar de l’iconique Ragnar (notre deuil n’est toujours pas fait), la caméra ne semble pas en adéquation avec l’émancipation de nos guerriers, de plus en plus sceptiques. Une détermination à assumer leurs actes, une remise en question plus réaliste pourtant contrebalancée par une mise en scène des plus onirique et une bande-originale parfaitement mystique. Les ralentis, fumigations et particules enflammées en stop motion se démultiplient et n’ont d’égales que les apparitions religieuses. Par exemple, le devin, pourtant assassiné dans la saison 5, accompagne chacun de nos personnages qui aperçoivent également Odin, Jésus ou Jörmungand (le serpent marin mythologique) lors d’ego trips iconiques, rassurants. Un vestige païen de l’ancien temps.
A ces élans visuels lourds de symbolisme on comprend surtout que le show de History essaye au maximum d’accéder à une forme d’immortalité où récompenses narratives et spiritualité formelle font fi des manipulations, bains de sang pour plutôt se concentrer sur la rhétorique. Ainsi, les rebondissements et conquêtes sanglantes s’agencent pour nous offrir des dernières retrouvailles qui s’achèvent en un dernier dialogue final. Une boucle pour retrouver le point névralgique de la série puisqu’à l’origine du show, s’imageait en effet la confrontation idéologique, cet échange de doute, un questionnement philosophico théologique. Ici, dans une ultime conversation entre les deux derniers Vikings, dont l’un des tout premiers (on vous taira la surprise pour la découvrir vous-même), la conclusion se fait pleine d’amour et d’optimisme.
Au bruit des vagues résonne la fin d’une époque, celle des grands Vikings, dont les noms retentissent encore aujourd’hui, et retentiront à jamais. Skål.