Renfield est une comédie aussi amusante que malheureusement complètement inconséquente, et ce en dépit du charme de ses interprètes et de quelques bonnes idées.
Renfield est un énième échec pour Universal, qui semble cependant avoir fait une croix sur un possible univers partagé. Pourtant, après les flops consécutifs de Dracula Untold et La Momie, (et son annonce de casting en grandes pompes, aussitôt avortée) le Invisible Man de Leigh Whannell semblait avoir rebattu les cartes pour le studio, qui en plus de délivrer un projet réussi, permettait à l’une des créatures de son bestiaire, soigneusement rangée dans un tiroir, de revenir plus moderne que jamais, dans l’incarnation très réussie d’un mâle toxique, malgré une conclusion poussive quelque peu décevante. Karyn Kusama avait alors été approchée pour s’emparer du roman de Bram Stoker, en expliquant avoir voulu centrer son intrigue sur un personnage féminin, et ne se servir du personnage de Dracula que comme toile de fond, dans un Los Angeles contemporain.
S’il avait un temps aussi emergé l’idée de faire du vampire un personnage très éloigné de son incarnation de héros romantique, on ne saura ensuite plus rien du projet, puisqu’il a depuis été tout simplement annulé. Pourtant, on ne peut pas dans ce Renfield, ne pas penser au projet avorté de Karyn Kusama, tant l’approche de mâle toxique et véritable pervers narcissique adaptée à La Nouvelle-Orléans de nos jours semble poursuivre cette évocation, comme celle de s’intéresser à un personnage plus secondaire, certes masculin, en la personne du serviteur du fameux Comte. Mais voilà, Renfield est désormais une comédie, scénarisée par Robert Kirkman (The Walking Dead, évidemment), réalisée par Chris McKay (Lego Batman, le film et… The Tomorrow War) et surtout portée par Nicholas Hoult, Nicolas Cage et la toujours parfaite Awkwafina. Un casting alléchant pour une comédie en dents de scie, aussi plaisante que toute aussi frustrante.
Sans pur sang
Reinfield (Nicholas Hoult) en a donc plus qu’assez de l’emprise qu’exerce sur lui depuis des siècles son maître Dracula (Nicolas Cage). Bien décidé à reprendre sa vie en main après avoir accompli un acte héroique aux côtés de la seule policière honnête (Awkwafina) d’une ville au service d’une famille mafieuse (et poussive), le serviteur semble vouloir reprendre sa vie en mains. Et sur son heure et demie, on peut dire que le contrat de divertisemment s’avère complètement rempli : venant de l’animation, (La Grande Aventure Lego) Chris McKay signe une réalisation soignée aux effusions de sang jouissives parfaitement gérées. Le travail d’adaptation de Robert Kirkman est aussi assez réjouissant, du moins dans son introduction, faisant de Reinfield un sur-homme dès qu’il ingère des insectes, et Dracula un montre d’égo assez jouissif, surtout campé par un Nicolas Cage qui a véritablement l’air de s’amuser.
Ainsi, une certaine énergie communicative règne sur l’entièreté du métrage : le duo Nicholas Hoult et Awkwafina fonctionne à merveille, et l’idée de transfigurer Dracula en pervers narcissique et de traiter l’emprise de son serviteur s’avère être une bonne idée. Mais voilà : Reinfield souffre, au-délà de sa mission de divertissement en mode comédie horrifique sanglante, d’une cruelle absence d’ambition, et d’une quelconque autre prétention que de remplir sa mission sans ne jamais proposer rien de plus à se mettre sous la dent. Troquant trop rapidement son originalité pour un spectacle cruellement balisé, le film de Chris McKay ne pourra ainsi ensuite compter uniquement que sur ses attachants personnages pour dynamiter une proposition qui demeure ensuite en cruel manque de sang neuf.
Originalité vampirisée
Reinfield demeure ainsi assez frustrant, tandis qu’un éventail d’autres possibilités s’offrait à rendre la promesse beaucoup plus colorée que ce finalement très atone résultat final. L’idée d’un Dracula voulant conquérir le monde, d’une armée de sbires surarmés possédant les mêmes capacités que Reinfield, et d’une ville entière en proie à la même servitude, tout cela s’avère finalement réduit au strict minimum, d’un affrontement final sans artifices n’excédant jamais aucune folie que de remplir bêtement un contrat. Les répliques, comme les coups, et évidemment la conclusion, tout paraît cruellement téléphoné, retirant alors toute l’originalité d’une toute nouvelle relecture, fraîche et moderne, de l’oeuvre de Bram Stoker.
Délesté d’autres attentes, et ne se consommant alors qu’en pur divertissement estival dénué de la moindre réflexion, Renfield pourra lors pleinement s’apprécier et même s’inscrire facilement au-dessus de la mêlée des productions horrifiques récentes. Pourtant, l’on était en droit d’en attendre un peu plus, surtout en convoquant une créature aussi emblématique et un tel casting, dont le charme mène vers le haut les parties les plus convenues du récit (toute la conclusion du coup). Mais voilà, Renfield n’est pas son maître, et c’est peut-être ce qui lui va le mieux, après tout.
Renfield est actuellement en salles.
Avis
Reinfield s'appécie comme un honnête divertissement estival, dont la mission n'est jamais d'être véritablement marquant mais plutôt de séduire durant son heure et demie au rythme parfaitement géré. Les interprètes s'amusent, l'énergie est communicative, mais derrière les dents ne se cachent finalement pas grand chose qu'un récit trop balisé en cruel manque de sang neuf, malgré une introduction très réussie.