Si on retenait notre souffle quant à la collaboration entre Alexandre Aja et Netflix, Oxygène fut une bouffée d’air frais, délivrant tout ce qu’on espérait et plus encore.
En se réveillant amnésique dans une capsule cryogénique, Lise découvre qu’elle n’a plus que 100 minutes d’oxygène pour s’en échapper. Filmé entre les deux confinements de 2020 en France, le nouveau film angoissant de notre Alexandre Aja national vient d’être diffusé sur Netflix et le moins que l’on puisse dire c’est que Oxygène est une réussite incontestable.
Écrit par Christie Leblanc et déposé sur la blacklist hollywoodienne en attendant un réalisateur intéressé, Oxygène tape vite dans l’œil du metteur en scène de Haute Tension, de La Colline a des Yeux ou du récent Crawl. En effet, le long-métrage prend la forme d’un survival traumatique, un thriller claustrophobe qui repose sur les épaules de Mélanie Laurent, seule face à la caméra de ce long-métrage anxiogène.
Claustration ingénieuse
Huis clos parfaitement organisé, Oxygène nous offre un high concept à l’efficacité criante. Une femme enfermée dans un caisson, commence à suffoquer et n’a comme seul interlocuteur qu’une intelligence artificielle. De quoi confiner son protagoniste en même temps que son spectateur dans un espace minimaliste pour les confronter à leur peur la plus intime. Ainsi, la fascination de Aja pour la mise en scène malaisante est ici poussée à son paroxysme, en cela qu’il abandonne la violence physique et les jump scares énervés pour une approche psychologique terriblement asphyxiante, mais rassurez-vous, on sursaute quand-même joyeusement.
En enfermant sa protagoniste, seule face à ses propres démons et une fin anticipée, Oxygène joue d’un stress latent, de la découverte de l’identité du personnage amnésique jusqu’à nombre de rebondissements particulièrement malins. Ainsi, pour Lise comme pour nous, les seuls échappatoires et scènes à l’extérieur de la capsule résident dans les scènes fragmentées d’une mémoire défaillante. Des bribes d’informations pareils à de revigorantes respirations pour imager cette quête identitaire avant de retourner affronter notre propre isolement et notre propre mortalité.
Surtout que Oxygène parvient sans mal à déstabiliser le spectateur grâce à la maestria de Aja qui alterne cadrages macroscopiques, plans lancinants, insidieux et un montage énervé pour représenter un stress inévitable pour enrichir son récit. De quoi offrir au film une désorientation visuelle et narrative folle, alliée à de jolies expérimentations visuelles et de belles CGI, sans aucune faute de rythme. Une réussite que l’on doit également à une mise en abîme de la situation actuelle alors que le film, à l’image des fluctuations temporelles éprouvées par notre claustrophobe de protagoniste, s’offre le luxe de s’articuler en deux parties distinctes. Deux structures narratives avec deux genres qui se confrontent et s’arrangent, du thriller claustrophobique à la quête de mémoire jusqu’à la science-fiction la plus soigneusement proposée.
Une façon de toujours repousser les limites du postulat simplissime de départ mais également celles de l’esprit déjà terrorisé et halluciné du personnage joué par Mélanie Laurent. Laquelle alterne entre dialogues introspectifs parfois mal interprétés et une justesse de ton incroyable, un résultat parfois ambivalent, qui rajoute encore au malaise général. De même, la voix métallique et aseptisée de Mathieu Amalric tend à rassurer tout en accentuant l’horreur dans laquelle on navigue. Une ambiance glauque et dérangeante galvanisée par la musique plaintive et fascinante de Robin Coudert.
Alexandre Aja réussit donc avec Oxygène à proposer un véritable coup de poing dans le catalogue de Netflix et le paysage cinématographique français, un film de genre parfaitement assumé, une pure réussite tétanisante.