Après avoir engendré une des plus grandes séries de la décennie avec Atlanta, Donald Glover et Francesca Sloane reviennent pour rebooter Mr & Mrs Smith. En abordant de manière authentique et approfondie les dynamiques de couple dans une intrigue d’espionnage, cette nouvelle itération est une franche réussite !
Pour beaucoup, Mr & Mrs Smith renvoie au fameux film de 2005 porté par Brad Pitt et Angelina Jolie. Une comédie avec ses accents sympathiques, mais qui se révélait assez vaine dans son écriture ou son potentiel mal exploité. Pourtant, il existait à la base une sympathique série du même nom en 1996, avortée après une saison.
Il est donc tout naturel de voir une nouvelle itération aujourd’hui, chapeautée par les têtes pensantes d’Atlanta, une des plus grandes séries de ces dernières années, autopsiant avec un humour mordant et une brillante dose de surréalisme l’Amérique d’aujourd’hui. Ainsi, Mr & Mrs Smith sont désormais incarnés par Donald Glover (qui en tant que showrunner, scénariste, producteur & réalisateur prend aussi la casquette d’acteur) et Maya Erskine (également scénariste que l’on a vu dans PEN15, ou dans le doublage de Blue Eye Samurai).
Néanmoins, pas de redite ici (à part deux ou trois clins d’œil des œuvres précédentes), rien que dans son pitch de départ qui prend le contre-point de Mr & Mrs Smith : nous découvrons lors d’un interrogatoire John et Jane, deux agents d’une division secrète de la CIA chargés de vivre ensemble sous une fausse identité d’ingénieurs informatiques en couple. L’un a été exclu des Marines après avoir piloté des drones de l’armée, l’autre est une asociale antipathique au premier abord.
Mariez-vous, si toute fois vous l’acceptez
Ainsi, cette saison 1 de Mr & Mrs Smith nous invite à suivre l’évolution de ce couple improbable, au gré de missions d’assassinat ou d’exfiltration à haut risque. Et comme l’intitulé de chaque épisode l’indique, c’est donc à une vraie exploration du « pour le meilleur et pour le pire » que le spectateur est convié, sur un ton aussi tendre que caustique.
Une approche qui en déconcertera plus d’un s’attendant à un déluge d’action-comédie, mais Mr & Mrs Smith abandonne toute glamourisation pour une étude de personnage approfondie, affectueuse initialement et plus méchante par la suite. Un refus du sexy qui fait parfois penser à la très bonne Acharnés, mais dont la substantifique moelle dramaturgique repose avant tout sur ses personnages incarnés et attachants.
Pourtant ce n’est pas gagné initialement pour ce couple à la fois aux antipodes mais complémentaire, qui dans le rush des premiers objectifs/émois va se voir naître une intimité amoureuse, peu à peu menacée. Chaque épisode adjoint donc une mission précise plus ou moins maîtresse du fil rouge narratif (livrer une bombe, transporter un atout, éliminer une cible..) dans un emballage d’espionnage tenu (de la jungle urbaine de New York à celle luxuriante d’Amérique du Sud, en passant par l’Italie transalpine ou bien le lac de Côme).
La fabrication globale est donc sacrément élégante (on retrouve d’ailleurs Hiro Murai ou Amy Seimetz à la mise en scène) jusque dans sa BO atmosphérique signée David Fleming. Mais si les mini-intrigues musclées ne surprendront personne (à un ou deux arcs près), celles-ci supportent avant tout la dynamique de couple principale, dont la mission réelle est de faire tenir ce mariage !
Anatomie d’un couple
Dès lors tout y passe, de la première flamme en passant par les premières engueulades, jusqu’au violent point de rupture en passant par la naissance de la jalousie, la thérapie de couple ou la fin du dialogue. Des enjeux communs auxquels toute personne pourra se connecter, et qui se révèlent moteurs du récit tout en symbiose totale avec cet univers d’assassins (jusque dans le jeu de mensonges/vérités). Un exercice complètement tenu donc, offrant une réflexion bien plus approfondie sur la notion même de couple que dans les précédentes versions de Mr & Mrs Smith.
Une qualité que l’on doit bien sûr à son excellent duo principal. On ne présente plus Donald Glover, dont le flegme jovial rend John Smith immédiatement attachant, avant de mieux explorer un délitement émotionnel à mesure que les missions à haut risque et les effusions de sang s’accumulent au fil des mois.
Mais c’est bien sûr Maya Erskine qui impressionne le plus dans un rôle à contre-emploi de sociopathie tentant de laisser ses sentiments s’exprimer ! Un casting qui fonctionne parfaitement malgré leur allure éloignée des standards du film d’action, mais qui se révèlent à l’aise dans chaque registre (même dans les moments musclés bien goupillés du show).
Mr & Mrs Smith plus sophistiqué que jamais
Enfin, Mr & Mrs Smith propose également un impressionnant trombinoscope de talent pour les personnages secondaires. On regrettera peut-être des caméos un peu trop fugaces (Alexander Skarsgård, Eiza Gonzalez) ou qu’on aimerait encore plus exploités (Ron Perlman, Paul Dano, John Tururro). Néanmoins, Mr & Mrs Smith use aussi de ces atouts à bon escient pour soit contre-balancée la relation maritale principale (excellente Micaela Coel, et surtout le duo Wagner Moura-Parker Posey).
Au final, on tient là un cocktail des plus réussis, qui ne se contente pas de rebooter Mr & Mrs Smith sans idée ou sentiment de déjà vu. Outre le mélange de comédie, de drame et d’action, le duo formé par Donald Glover et Maya Erskine s’impose aisément comme les meilleurs John & Jane Smith qu’on ait eu, incarnant avec brio chaque homme/femme dans ce qu’il y a de plus humain. Une franche réussite donc on espère déjà une Saison 2 poussant le danger et l’espionnage au niveau supérieur !
Mr & Mrs Smith est disponible sur Prime Video depuis le 2 février 2024
avis
Donald Glover et Maya Erskine incarnent désormais les Mr & Mrs Smith définitifs, dans un reboot poussant de manière beaucoup plus approfondie l'étude de personnages, dans une réflexion authentique (et parfois cruelle) sur le mariage. Bénéficiant d'un casting et d'une fabrication de premier plan, on a déjà hâte de voir une saison 2 que l'on espère encore plus ample dans cet univers surréaliste de contre-espionnage. Une franche réussite donc !