Largo Winch – Le prix de l’argent revient treize années trop tard, dans une proposition aussi vaine que pauvre en spectacle.
Qui attendait vraiment le retour de Largo Winch au cinéma ? Treize années ont passé depuis Largo Winch 2, qui avait en son temps réalisé un score en dessous du premier opus (450 000 entrées d’écart), premier (petit, certes) signe d’essoufflement d’une franchise ensuite enterrée, à l’image de la carrière cinématographique de son acteur principal, Tomer Sisley. Mais voilà, depuis, ce dernier a opéré un comeback retentissant (s’étant même payé le luxe d’apparaître dans Don’t Look Up) avec la série Balthazar sur TF1, rassemblant plusieurs millions de téléspectateurs à chaque diffusion, reconfirmant au passage sa stature d’homme d’action charismatique, et effaçant ainsi tranquillement le scandale CopyComic, où l’on apprenait qu’un spectacle entier de l’acteur, jadis humoriste, relevait du plagiat.
Exit Jérôme Salle, qui laisse ici sa place à l’inattendu Olivier Masset-Depasse, cinéaste belge ici à des années lumières de son multirécompensé Duelles, le drame d’auteur qui l’a consacré, pour un passage risqué au film d’action pur et dur. Se chargeant également en partie du scénario, Clothilde Hesme et James Franco complètent la distribution, confirmant le statut à part du cinéma français lorsqu’il s’agit de remettre sur le devant de la scène des gloires déchues rejetées d’Hollywood pour leur comportement inacceptable, rejoignant ainsi des prestations similaires à celle de Johnny Depp dans Jeanne du Barry, c’est à dire le service minimum. Est-ce vraiment une surprise si au vu de tous ces éléments, l’on vous annonce déjà que ce Largo Winch – Le prix de l’argent s’avère n’être qu’un petit ratage sans aucune prétention ?
Largo largué
Largo Winch – Le prix de l’argent reprend donc Largo Winch là où on l’avait laissé treize années auparavant. Père solitaire, on lui enlève son fils, entrepreneur exemplaire ayant mué la transition de son entreprise tentaculaire vers les énergies renouvelables, on lui apprend que de sombres manipulations lui sont cachées. En clair, rien ne va pour l’héritier, surtout lorsqu’un mystérieux ennemi s’en prend à lui (James Franco, complètement éteint) et qu’il se voit accusé de meurtre. Heureusement, il rencontre une TikTokeuse écologiste (Élise Tilloloy). Ainsi, si l’on pouvait reprocher beaucoup, beaucoup, beaucoup de choses aux deux opus mis en scène par Jérôme Salle, on ne pouvait leur enlever leur efficacité, chose que ce troisième opus, se la jouant plus sombre, semble avoir totalement égaré.
On se retrouve donc avec tous les défauts de la franchise réunis en un seul et même opus, sans même pouvoir y éprouver ne serait-ce qu’une once de satisfaction. Scénario rocambolesque, personnages complètement désincarnés (le duo avec l’influenceuse écologiste relève d’un certain malaise), intrigue alambiquée, et donc, spectacle cruellement pauvre. Si la promotion du film se concentrait sur la préparation physique intense de Tomer Sisley, on n’en voit hélas que trop peu à l’écran, et si cela aurait pu être un certain refuge, l’acteur n’excellant que dans les petits blagues et les scènes de bagarre, la dramaturgie éclate et s’avère ainsi fatale à la fois pour l’acteur et le spectateur. On ne croit ainsi en rien de cette histoire absurde, inutilement étirée, où les révélations fusent comme autant de coup de poings et d’explosions que l’on ne verra jamais.
Le prix du ticket
Largo Winch – Le prix de l’argent, comme ses deux prédécesseurs en son temps, n’est ainsi jamais d’une grande inventivité, continuant à piller sans aucune vergogne les derniers opus de la saga James Bond. Après Casino Royale et Quantum of Solace (revoir la scène d’introduction de Largo Winch 2, c’en est caricatural), voici donc le pot-pourri Spectre–Mourir peut attendre en un seul coup. Ou le versant sombre dénué de profondeur et la conclusion qui annonce déjà la suite d’une franchise beaucoup trop confiante de sa recette. Parce qu’il n’y a ici plus rien, même plus l’ombre d’un ersatz efficace confondant ambition et excès, plus de grands acteurs (autrefois Kristin Scott Thomas, Gilbert Melki, Laurent Terzieff, et malgré tout le bien que l’on pense de Clothilde Hesme) venus apporter une once de prestige à une franchise qui ne cache même plus sa vacuité.
Parce que ce qu’il y a de plus désespérant dans ce Largo Winch – Le prix de l’argent, c’est bel et bien le prix du ticket. N’ayant même pas eu la bonne idée de sortir en pleine Fête du Cinéma, ce troisième opus s’avère ainsi trahir ses promesses les plus minérales. Plus de dépaysement, rendu pauvre par une photographie terne, plus d’action, rendue inexistante par la mise en scène maladroite d’un jeune cinéaste inhabitué à l’exercice, et surtout, plus la moindre émotion, qu’une possible léthargie, suscité par un héros complètement largué que l’on espère revoir endormi le plus longtemps possible.
Largo Winch – Le prix de l’argent est actuellement en salles.
Avis
Ce troisième opus n'a même plus le luxe d'être une copie invraisemblable mais efficace de film d'action singeant grossièrement la concurrence : il ne reste ainsi rien que le spectacle triste du vide, d'un épisode n'ayant conservé que le pire des précédents épisodes, du scénario invraisemblable aux personnages creux, où les révélations débiles remplacent les coups de poings. Remboursez.