Les Huit Montagnes est en Compétition dans la Sélection du Festival de Cannes 2022, et est le nouveau film de Felix Van Groeningen (Alabama Monroe, My Beautiful Boy). Co-réalisé par Charlotte Vandermeersch, cette adaptation de roman est une belle ode à la nature, sur fond d’une histoire d’amitié à l’issue un brin balisée.
Le réalisateur belge Felix Van Groeningen revient pour un film en langue italienne ! Après Alabama Monroe et My Beautiful Boy, le voilà en Compétition Officielle du Festival de Cannes 2022, épaulé cette fois par Charlotte Vandermeersch (déjà scénariste sur Alabama Monroe). Les Huit Montagnes (Le Otto Montagne) est d’ailleurs un projet de choix : adaptation du roman éponyme de Paolo Cognetti sorti en 2016, les ingrédients sont là pour satisfaire les appétences émotionnelles du réalisateur !
Les Huit Montagnes débute au milieu des années 80, au sein des Alpes italiennes (la Vallée d’Aoste plus précisément). Nous y découvrons Pietro, jeune enfant réservé et fils d’un chimiste passionné de randonnées, venant se ressourcer chaque été dans ce lieu entouré de huit montagnes (ça ne s’invente pas !). Il va ainsi faire la rencontre de Bruno, fils de paysans plein de débrouillardise. Ce sera le début d’une longue amitié (le sujet premier du métrage), narrée en voix-off par Luca Marinelli (On l’appelle Jeeg Robot, The Old Guard), qui interprète Pietro une fois adulte !
Italians in the Wild
D’entrée de jeu, Les Huit Montagnes nous saisit par son soin visuel et l’ampleur des décors transalpins : c’est beau ! Via une photographie ultra soignée signée Ruben Impens (Titane), fidèle collaborateur de Groeningen, le film procure un vrai sentiment de délectation picturale en plus d’un joli moment d’évasion tout au long de ses 2h37. Le format carré 4:3 participe ainsi grandement au souffle global, allié à une mise en scène sobre laissant avant tout parler l’image et la nature écrasante (attendez de voir les montagnes népalaises).
Le film enchaînera par ailleurs plusieurs séquences de tranches de vie de ses persos, avec une âpreté et une certaine authenticité, alors que les 2 personnages centraux avancent dans leur vie respective. On pourra donc saluer la 1e partie du métrage, assez riche et allant de l’avant, qui explore l’enfance, succinctement l’adolescence, puis la traversée vers l’âge adulte.
Dommage que par instants (et surtout dans sa 2nde partie, Les Huit Montagnes verse parfois un peu trop dans la séquence rando-écolo-musicale folk, en mode pub pour le boursin et Ushuïa Nature (en grossissant le trait), ce qui a de quoi diminuer un tantinet son discours (certes attendu) sur le caractère précieux d’une nature incomprise par le commun des mortels. Dommage, mais pas de quoi tirer sur l’ambulance, là encore, les images parlent d’elles-mêmes !
We Do Talk About Bruno
Au centre de Les Huit Montagnes, Luca Marinelli et Alessandro Borghi (Suburra) dont l’amitié de leurs personnages est le vrai fil rouge de l’histoire, et leur alchimie la charpente globale du film. Pietro et Bruno ont par ailleurs une caractérisation et un parcours inversé : une complémentarité explicite (l’un reste dans un monde restreint, l’autre part à l’aventure pour se découvrir) bien qu’un poil trop surlignée lors d’une séquence-pivot. Cependant, cette relation de bros aurait mérité un regain d’écriture supplémentaire pour mieux véhiculer d’où vient réellement cet attachement (même après 15 ans sans se voir), plutôt que par la simple excuse du script ou de l’œuvre originale.
L’élément intéressant néanmoins reste l’entité paternelle (jouée avec professionnalisme par Filipo Timi) de Pietro, entretenant un rapport différent avec les 2 faux-frères et absent par la suite, tout en étant une figure présente dans leur psyché. Car au final, on parle bien d’individus en pleine construction (à travers leurs amours, leurs rapports familiaux, amicaux, professionnels ou bien socio-environnemental), forgés par la présence (ou l’absence) du pater familias.
Joli et tendre, avec un peu de gras
In fine, Les Huit Montagnes est un beau film, empli de sincérité et d’une envie de liberté. Le casting principal de bonne facture parvient à donner de l’incarnation à leurs personnages, malgré une tendance à tourner un tantinet autour du pot (de boursin) et de surligner un aspect émotionnel manquant de coffre sur sa dernière partie. Néanmoins, Le Otto Montagne se conclut de manière sobre, sans fioritures ni grand pathos. Un bon film, aux visuels léchés et agréable, à défaut de l’uppercut émotionnel qu’il aurait pu asséner !
Les Huit Montagnes sortira en salle le 21 décembre 2022
avis
Les Huit Montagnes ne met pas à valeur égale toutes les composantes de sa narration, mais ce nouveau film de Felix Van Groeningen (co-réalisé par Charlotte Vandermeersch) est une belle histoire d'amitié,sublimée par de grands et beaux visuels des décors transalpins. Une bonne pioche !