Après le très bon Lion et le sympathique Marie Madeleine, Garth Davis revient avec Foe. Ce récit de science-fiction intimiste place Paul Mescal (Aftersun) et Saoirse Ronan (Lady Bird) en couple voué à se séparer pour l’avenir de l’humanité…dans un mélodrame aussi poussif qu’approximatif dans son exécution !
L’australien Garth Davis avait frappé fort dès Lion, avant de proposer au couple Joaquin Phoenix-Rooney Mara une tendre relecture de l’histoire de Marie Madeleine. C’était donc logique d’attendre de quoi était capable le réalisateur avec Foe, récit de science-fiction présenté l’an dernier au Festival de New York, désormais sorti en catimini sur Prime Video. Fait étrange, quand on sait que la talentueuse Saoirse Ronan (Lady Bird) est au casting, affublé de deux stars masculines montantes (Paul Mescal & Aaron Pierre). Il suffira malheureusement de visionner le métrage pour mieux comprendre..
Foe nous place en Amérique rurale, en 2065. Futur dystopique classique : la Terre se meure via le réchauffement climatique et la rapide pénurie des ressources suite à des centaines d’années de surconsommation. C’est dans ce rapide contexte que le spectateur est introduit au couple formé par Junior (sobriquet d’un Paul Mescal qui parvient à vendre la mèche sur la suite de l’intrigue en 2 secondes) et Henrietta (Saoirse Ronan).
Reclus dans la maison familiale et vivant de peu de biens, leur tranquillité est ébranlée un soir par la venue de Terrence (Aaron Pierre). Ce dernier vient recruter Junior pour l’envoyer dans l’espace pour 2 ans, afin de préparer l’exil progressif de l’Homme. Mais ce faisant, une réplique de lui-même sera présent aux côtés d’Henrietta pour la soutenir.
Quand le cancre copie le voisin
Le concept de Foe vous paraît familier ? C’est normal, il s’agissait du même canevas que pour « Mon cœur pour la vie », le meilleur épisode de Black Mirror Saison 6. Un segment qui offrait ainsi un scénario plutôt malin, en embrassant son concept, que Foe abandonnera lâchement une fois l’avoir fait miroiter !
Car en effet, Garth Davis et son co-scénariste Ian Reid (Je veux juste en finir) sont plus intéressés à brasser le vide, dans un mélodrame laborieux et sur-explicatif dans ses intentions. D’abord plutôt intriguant de par la venue d’Aaron Pierre (The Undergound Railroad) en personnage suave, l’intrigue de Foe va rapidement tourner en circuit fermé, préférant empiler les séquences illustratives d’un couple déchiré par l’inévitable départ à venir.
Mais si cela était bien écrit Foe vaudrait le coup d’œil : hors il faudra s’infliger près d’un heure et demi de pseudo-psychanalyse de couple, dans un étalage sur-démonstratif. Tout y passe, du monologue poussif sur les souvenirs à deux (« le craquelage du carrelage », « je ne veux pas que tu portes le T-shirt de notre première rencontre sinon il s’usera ») jusqu’aux élucubrations cosmiques type CE2 (« imagine qu’on regarde le ciel vers le haut, mais qu’en fait on regarde en bas »), en passant par la thérapie de couple forcée.
Anatomie d’un trouple
Tout ou presque sonnera faux, le drama tapant constamment à côté, jusque dans un inévitable twist grillé dès les 15 premières minutes du film…qui se paie le luxe d’annihiler toute construction dramaturgique de personnage pré-établie pour au final accoucher d’une non-finalité crasse avec pour simple justification une expérimentation survolée vue dans plusieurs films d’anticipation. Même pour les fans purs et durs de SF minimalistes, Foe s’avèrera complètement chiche en biscuit ,n’exploitant là encore jamais son setting ou son contexte, préférant afficher un vaisseau et 2 plans de ferme agro-alimentaire futuriste pour rappeler que nous sommes dans de la science-fiction.
Les quelques réjouissances de Foe paraissent ainsi bien maigres. Le film a le mérite de proposer une photographie léchée (en pellicule s’il vous plaît), faisant preuve de vrais sursauts qualitatifs lors d’un court instant de feu de grange ou dans sa manière de capter les divers paysages naturels de Foe. De l’autre, le trio d’acteurs se démène comme il peut pour tenter de donner un peu d’épaisseur à des personnages aussi caricaturaux que dénués d’authenticité dans leur réaction stéréotypée.
Bref, le constat est là et il est triste : via son 3e long-métrage, Garth Davis signe avec Foe non seulement son premier film raté, mais également le pire film de ce début 2024. Un gros gâchis qui confine à l’ennui poli, malgré son concept de départ intéressant et son casting de talent. Dommage donc !
Foe est disponible sur Amazon Prime Video depuis le 5 janvier 2024
avis
Foe est un malheureux ratage pour Garth Davis, annihilant son concept accrocheur et ses velléités de drame intimiste par une écriture pachydermique. Constamment à côté de la plaque dans sa laborieuse exécution, ce crypto-métrage de SF ne peut même pas être sauvé par un aspect visuel léché et son très bon trio d'acteurs aux personnages laborieux.