Equalizer 3 clôt la trilogie menée par Denzel Washington avec le même manque de panache que ses deux prédécesseurs.
La trilogie Equalizer a ce petit quelque chose de pantouflard, tant les deux premiers films réalisés par Antoine Fuqua s’avèrent être en totale contradiction avec la concurrence des actionners bourrins portés par une légende hollywoodienne vieillissante sortis dans la même période. Que ce soit Taken, John Wick et tous les rejetons que les deux franchises ont engendrés (de Gunman à 3 Days to Kill et d’Atomic Blonde à Nobody), Equalizer s’avère ainsi incarner le pendant certes plus mature, mais aussi beaucoup plus ennuyeux du genre, véritable véhicule à la gloire de sa star au charisme heureusement immortel. Parce que depuis Training Day, Antoine Fuqua n’est devenu qu’un pâle exécuteur de commandes, enchaînant les projets tels des trains à prendre (2 films par an depuis deux années), sans ne plus jamais laisser aucune trace dans l’imaginaire collectif.
Il en est ainsi de même pour le grand Denzel Washington, s’illustrant ça et là dans des projets de grands metteurs en scène passant malheureusement inaperçus (Flight, The Tragedy of Macbeth), s’essayant même à la réalisation dans le drame à Oscars (Fences) où dénués d’âme et d’intérêt (2 Guns, Les Sept Mercenaires, Une affaire de détails), à des années lumières de ses grandes et prestigieuses années. Equalizer semble donc sonner l’heure de la retraite pour un acteur qui porte à lui seul cette franchise techniquement irréprochable, mais artistiquement complètement dispensable. Parce qu’en adaptant une série à succès de la fin des 80’s, Antoine Fuqua, outre le fait de délivrer une relecture complètement impersonnelle, dévoile surtout un véhicule pensée jusque dans les moindres détails pour son acteur, dévitalisant de son personnage pieux et invincible tout ce qu’il tente d’entreprendre. Est-ce que ce troisième volet viendra contredire les deux précédents et dynamiter cette sage formule ? Rien n’est moins sûr.
Denzelito
Equalizer 3 débute pourtant de manière bien plus intéressante que ses deux prédécesseurs, délivrant aisément l’une des meilleures scènes de la trilogie. La sage balade d’un père et de son fils au cœur d’un idyllique vignoble italien se voit ainsi troublée par l’apparition de cadavres d’hommes de mains, dont les corps malmenés paraissent successivement, faisant monter l’horreur crescendo, d’un monstre qui se dévoile ici enfin à sa pleine mesure. Ce monstre, c’est donc Robert McCall, tout de noir vêtu, ici plus iconique que jamais. En une introduction, tout ce qui faisait cruellement défaut à une franchise désespérément trop lisse se voit ici presque gommé, et l’annonce d’un volet plus sombre, débutant par la stature d’un impassible monstre qui se met enfin à saigner, laisse augurer du meilleur. Avant, malheureusement et très rapidement, de regagner sa ronflante ligne de conduite.
Parce que mis à part le décor d’une Sicile étouffé par une lumière noire et pesante, rappelant au passage le regard d’Olivier Marchal sur des villes comme Marseille transfigurées en de suffocants purgatoires (MR73), rien ne viendra troubler la ligne directrice d’Antoine Fuqua et de Denzel Washington. Equalizer 3 aurait ainsi très bien pu s’appeler Robert McCall en Italie, car même s’il aurait fallu faire sonner la fin d’une trilogie de manière plus marquante, rien ne vient apporter le moindre souffle nouveau à une franchise qui sera définitivement restée campée sur ses maigres acquis. La mafia russe du premier opus se voit ici remplacée par la camorra italienne, et la jeune prostituée en détresse par une jeune agente de la C.I.A., et puis, c’est à peu près tout. Néanmoins, une fois ce décevant constat tiré, peut-on quand même trouver du plaisir dans cet Equalizer 3 ?
Egaliseur
Il est ainsi réellement complexe de tirer un seul opus du lot de cette trilogie finalement très générique, tant tous s’avèrent n’être qu’une sempiternelle répétition de la même formule, avec pour maigre satisfaction le charisme indéboulonnable de son acteur principal et une poignée de scènes à la tension très travaillée. Ainsi, même si elles auront étés plus nombreuses dans le deuxième opus, la durée moins exagérée de ce dernier volet (1h49 contre plus de deux heures pour ses deux prédécesseurs) appelle à une certaine efficacité, même si l’enquête policière s’avère aussi inutile que sa faussement attendue et finalement décevante conclusion. Ainsi, Equalizer 3 remplit autant son contrat qu’attendu, à l’image d’un menu identique commandé au fast-food, qui malgré la satisfaction immédiate, n’apporte finalement aucune surprise ni découverte.
Si l’on aurait pu attendre de ce dernier opus un souffle nouveau, plus noir, plus violent et plus torturé, surtout après sa brillante introduction, il n’en sera finalement rien. Equalizer 3 se contente de nous resservir la même formule, sans ne jamais déroger à sa ronflante ligne de conduite. Ainsi, si certains y trouveront un divertissement honnête et efficace, d’autres y verront une certaine fatigue, mais ce qui réunira à coup sûr ces deux points de vue c’est le manque de souvenir marquant qui sera resté la véritable marque de fabrique de cette fade trilogie, et de la démonstration certes honnête mais complètement anesthésiée d’une équipe de grands talents ici au service minimum.
Equalizer 3 est actuellement en salles.
Avis
Que garder de cet Equalizer 3, qui après sa brillante introduction, laissait augurer d'un opus plus sombre et d'une conclusion plus surprenante ? Finalement autant que ses deux prédécesseurs, c'est à dire si peu, si ce n'est d'une formule qui à défaut de se répéter et de signer d'honnêtes divertissements, aura fait du manque d'audace et de folie sa ronflante marque de fabrique.