Affaires sensibles est l’adaptation théâtrale de l’émission de radio de Fabrice Drouelle sur France Inter.
Affaires sensibles est la première émission de radio adaptée au théâtre ! Un pari original et plutôt réussi pour un duo qui se complète à merveille. En effet, Fabrice Drouelle et Clémence Thioly mêlent jeu et narration pour nous livrer trois destins de femmes. Trois histoires marquantes de ces 50 dernières années parmi les quelques 700 racontées depuis six ans dans l’émission populaire éponyme. Et on en redemande volontiers !
Trois destins de femmes hors-normes
La première histoire retrace le crime passionnel de Pauline Dubuisson et son passé maudit et secret ; la seconde évoque le parcours à l’Élysée de la Première Ministre de François Mitterrand, Édith Cresson, à une époque ou le machisme et les propos sexistes étaient presque la norme ; et la troisième nous replonge dans l’histoire tragique du jeune Vincent Humbert, devenu tétraplégique, sourd et muet à la suite d’un accident de voiture, et du combat de sa mère pour le droit à mourir dans la dignité.
Derrière ces faits d’actualité très différents et bien documentés, ce sont des thématiques sociales, politiques, culturelles fortes qui sont abordées, et qui entrent évidemment en résonance avec notre époque. Ainsi, ces affaires sensibles invitent à pousser davantage la réflexion sur les questions de l’euthanasie, de la place des femmes dans la vie politique et dans la société en général, ou encore de la quête d’identité.
Quand la radio se met en scène
La mise en scène est simple, épurée, et très visuelle. En effet, les effets d’ombres et de lumières de Johan Chabal créent une atmosphère intimiste pour un moment de partage fort. Sur des draps blancs suspendus qui vont et viennent des images et vidéos d’archives sont régulièrement projetées pour donner de l’épaisseur au contexte et nous immerger un peu plus dans ces tranches de vie.
Et puis, les musiques de Sebastien Galiana viennent ajouter ce qu’il faut d’intensité pour nous maintenir en alerte. Pour ne pas céder à l’envie qui rôde parfois de fermer les yeux pour se laisser bercer par cette voix… comme si on l’écoutait à la radio finalement !
Il était une voix…
Car, le talent de conteur de Fabrice Drouelle – dont la voix et le phrasé à eux seuls offrent une mise en scène – est indéniable. Et, sur les planches comme sur les ondes, c’est presque la même magie qui opère. Sauf qu’ici, à cette narration très captivante s’entremêle le jeu très juste de Clémence Thioly. La comédienne donne vie avec une belle sensibilité à ces femmes en quête d’une liberté, d’une reconnaissance qu’elles ont chacune incarnée à leur manière.
Dommage que le rythme un peu rapide empêche de profiter pleinement de certains passages poignants. C’est notamment le cas lorsque les mots bouleversants de Vincent Humbert demandant sa propre mort s’écrivent sous nos yeux. Et puis il y a cette fin un peu confuse, sensée confier ce qui a fait naître l’intérêt du journaliste pour ces faits de société, mais qui nous est plutôt apparue comme l’introduction d’une nouvelle histoire… que nous n’entendrons finalement pas.
Hormis cela, on est captivé d’un bout à l’autre, et on reviendrait bien volontiers pour écouter (et voir du coup !) d’autres affaires.