Avant la sortie de son film événement Tenet, revenons sur la toute première incursion dans le blockbuster de Christopher Nolan, avec Batman Begins. Après avoir fait ses preuves dans le genre du thriller, il s’attèle au plus grand super héros de la pop culture et cela avec succès !
La catastrophe commerciale et surtout critique qu’est Batman et Robin aura eu raison de la célèbre chauve-souris pendant 8 ans. Il fallait donc une vision forte et nouvelle pour pouvoir faire renaître le héros. D’abord attaché à Darren Aronofsky, le projet Batman Begins atterrit entre les mains de Nolan suite à sa première collaboration avec la Warner sur Insomnia. Et le cinéaste s’appropriera totalement le genre super-héroïque pour mieux le renouveler.
Après avoir embrasser l’aspect gothique du personnage sous Tim Burton et son aspect cartoonesque sous Joel Schumacher, Christopher Nolan s’inspirera de Batman : Year One pour imposer sa vision réaliste du héros. Une intention en totale concordance avec le monde post-11 septembre, où l’imaginaire grandiloquent est vite redescendu à la sombre réalité. Mais plus encore qu’un produit de son époque, cette nouvelle itération pose la recherche obsessionnel de réalisme de son cinéaste.
En résulte des scènes d’action aux effets tangibles, renforçant le sensationnel; et un style urbain qui nous immerge dans cette nouvelle Gotham poisseuse. Certains fans pourront se plaindre du manque d’esthétisme et de fantasmagorie de l’univers, mais la force de proposition est telle qu’on en oublie le manque de fantastique issu des comics. Le mythe de l’homme chauve-souris est alors déconstruit à travers une première (enfin!) origin story ingénieuse qui décortique toutes les étapes qui mèneront Bruce Wayne à devenir Batman.
Une origin story brillante
Des origines brillamment racontée dans le premier acte à travers un récit éclaté comme Nolan sait si bien les faire. Grâce à cela, nous pouvons découvrir la formation de Bruce en parallèle de sa jeunesse endeuillé dans un rythme narratif soutenu. La lourdeur et la lenteur que peuvent avoir certaines origin story sont éclipsées par cette technique maligne qui donne toutes les informations nécessaires à l’approfondissement du personnage mais aussi au développement de l’intrigue.
L’histoire adopte une dimension psychologique occultée des précédentes versions (peut-être exception faite de quelque moment de Forever) qui donne toute sa profondeur à son personnage. Le combat entre l’homme et ses peurs, son désir vengeance, son ambivalence, ses dilemmes, son impossibilité de deuil : toutes ces thématiques élèvent le film au delà du simple blockbuster super-héroïque et aborde le genre de manière sérieuse.
Le métrage n’est pas pour autant parfait. Certaines extravagances de scénario, très certainement dû à un cahier des charges et à son co-scénariste David S Goyer, sont à noter : une machine micro-onde géante qui évapore les eaux de la ville mais pas celle du corps humain, un plan machiavélique rocambolesque viennent entacher le réalisme de l’œuvre et sa pleine immersion.
Nolan aborde ici son premier film d’action et cela se voit dans sa réalisation brouillonnes qui ne rend pas honneur aux chorégraphies. Cependant cela est compensé par la magistrale composition de Hans Zimmer et James Newton Howard. Elle rend le tout épique et arrive à faire oublier le thème culte d’Elfman.
Le cinéaste passe aussi un peu à côté du personnage de l’épouvantail de par sa mise au second plan dans l’intrigue et n’exploite pas toutes ses possibilités de terreur. Pour le coup, à vouloir trop ancré dans le réel et comme pour Insomnia, il ne tire pas profit du potentiel sensoriel.
Mais Batman Begins s’impose tout de même comme une renaissance parfaite, malgré tout le cahier des charges ou les possibilités qu’offre une origin story. Nolan s’appropriera totalement le genre pour lui offrir ses lettres de noblesse et un nouveau style sombre. Cependant là où Begins permet d’installer des bases solides, le cinéaste va totalement prendre son envol et chambouler l’industrie avec son chef d’oeuvre, The Dark Knight. Mais avant cela, il réalisera un film beaucoup plus intimiste et trop souvent mésestimé qui concentrera toute l’essence du cinéma de Christopher Nolan…