La Ferme des Animaux (Animal Farm) a été présenté en avant-première au Festival d’animation d’Annecy ! Projet de passion pour Andy Serkis depuis 15 ans, cette adaptation du classique de George Orwell égaye le matériau de base pour un résultat qui manque malheureusement de piquant.
La Ferme des animaux est un classique intemporel de George Orwell (1984) que toute personne se doit d’avoir lu au moins une fois dans sa vie ! Prenant place (comme son nom l’indique) dans une ferme après que les animaux en question aient chassé les humains propriétaires des lieux, ce récit adapté à tout âge voyait toute cette basse-cour s’organiser en démocratie afin de fonctionner dans la plus joyeuse des autonomies.
Mais rapidement, le cochon Napoléon décide de prendre le pouvoir, manipulant l’opinion globale en sa faveur. Exploitant les autres animaux concernant les tâches ingrates, ce dernier couvre de privilège les autres cochons et instaure un régime totalitaire. Bref, une vraie fable dystopique qui puisait sa source dans la révolution russe du début du XXe siècle.

Et force est de constater que 80 ans après sa parution, La Ferme des animaux conserve encore aujourd’hui une charge socio-politique et existentielle confinant à la fois au mythe, mais également applicable à divers sujets de société contemporains. Inutile donc de dire qu’une nouvelle adaptation trouvait toute sa place aujourd’hui !
Gestation contrariée
Certes, La Ferme des animaux est déjà passé par la case cinéma (un chouette film d’animation des années 50 mais dont le discours été modifié par la CIA, ou encore un film live de 1999 très oubliable), mais c’est Andy Serkis (éternel Gollum mais aussi derrière la cata Venom 2) qui porte le projet depuis près de 15 ans maintenant ! D’abord conceptualisé avec Rupert Wyatt (La Planète des Singes – Les Origines) pour être une transposition fidèle usant des dernières technologies 3D HFR, le projet a muté en 2018 avec la venue de Nicholas Stoller (Nos pires voisins) pour rédiger le script.
Un changement de scénariste qui veut ainsi tout dire, alors que La Ferme des animaux selon Andy Serkis prend la forme d’un film d’animation tous publics à destination des plates-formes. Dès l’ouverture, le bât blesse avec un style visuel Dreamworks-lite résolument enfantin et passe-partout, alors que la ferme se rebelle face à des humains corporates aussi caricaturés que dans Le Lorax ou Moi, Moche et Méchant.

Pourtant, un gag ici et là parvient globalement à fonctionner, tandis que le canevas initial de George Orwell se retrouve plutôt rapidement au centre de la dramaturgie. Mais très vite, ce Animal Farm sauce Serkis suivra des diktats de film d’animation tous publics contemporain, préférant la vanne facile plutôt que de tirer à boulets rouges sur les figures politiques qu’il dénonce presque ouvertement (Musk, Bezos et Poutine en tête).
De l’âne au coq
Blagues de pet et vannes sur l’achat de bolides de luxe viennent donc parasiter une narration qui ne se mouille jamais, survolant de manière superficielle le matériau de base par peur de froisser. Pire, à chaque bascule du scénario (et donc de la prise de pouvoir du cochon Napoléon qui devient grossièrement Donald Trump), une voix-off vient gentiment nous l’expliquer sans que l’écriture ne daigne nous montrer le cheminement interne des divers animaux. Pire encore : l’incorporation des humains comme antagonistes majeurs amenuise l’étude sociologique de base que constitue cette ferme symbolique !
C’est bien dommage, étant donné que La Ferme des Animaux réussit par instants à interpeller le spectateur devant ce que le film aurait pu être. C’est particulièrement le cas via le regard ambivalent du cochon Lucky (le véritable protagoniste du film) et sa relation avec le cheval Boxer. Un propos universel face au fascisme tente donc d’émaner, alors que Serkis et Stoller amènent la satire initiale vers une résolution passant obligatoirement par la révolte populiste.

Un choix ambivalent en terme d’intention, d’autant que le script ne se mouille pas et n’embrasse pas vraiment cette décision proactive des protagonistes, lorsque lors du climax, une explosion de barrage fait dire à un animal que tout cela n’est pas fait exprès. Pourtant, on appréciera au moins cette prise de position singulière dans son « travail » d’adaptation, d’autant que la fameuse tour où sont édictées (puis modifiées) les fameuses lois a son utilité même dans la conclusion du film.
Dévitalisation Orwellienne
Un rayon d’espoir bienvenu sans doute anime La Ferme des Animaux, mais le constat global reste globalement amer… encore plus lorsqu’on connait la gestation initiale d’un projet vieux de quasi 2 décennies ! En résulte une adaptation bâtarde (même si curieusement divertissante de par son casting vocal réussi et sa rythmique) afin d’être vue par le plus grand nombre, sans être un caillou dans la chaussure ni questionner le spectateur…mais c’est oublier que le matériau de base savait taper là où ça fait mal sans restreindre son lectorat non plus !
La Ferme des Animaux n’a pour le moment pas de date de sortie. Retrouvez tous nos articles du Festival d’Annecy ici.
avis
Dévitalisation pure et simple du classique de Goerge Orwell, cette adaptation de La Ferme des animaux met Andy Serkis dans une position rassurante : celle de pseudo-conteur pour petits et grands destiné à ne jamais froisser qui que ce soit derrière cette satire tombée sous les diktats du divertissement pour enfants. Le casting vocal est bon, le film divertissant et quelques émanations du matériau d'origine jalonnent un récit finalement inoffensif, bien éloigné de ses ambitions d'origine. Pas terrible !